ET DE LA
L'exécution du 1" de ces tableaux est confiée à
M. Garnier, colle du 2e à M. Gautherot.
Article 7
La dépense do ces tableaux sera imputée sur les
fonds alloués annuellement pour les travaux de
l'Église de la Madeleine.
Paris, le 31 Mai 1816.
Signé : Lainé. »
Gelait, on le voit, à une dépense totale de 223.000
francs que l'exécution de ces peintures aurait donné
lieu.
Le jour même do la signature de l'arrêté minis-
tériel, les peintres désignés .?n reçurent notification
et furent priés d'indiquer lo sujet qu'ils désiraient
traiter.
Ils no répondirent pas tous avec le même empres-
sement.
Gros, Girodet et Guérin se bâtèrent si peu d'ac-
cuser réception de l'avis officiel qu'une lettre de
rappel dut leur être envoyée lo 12 juillet suivant.
Enfin, toutes les réponses étant parvenues, le
chef do la 2" division du ministère de l'Intérieur,
chargé do suivre celte affaire, fut on mesure d'en
rendre compte au ministre.
Son rapport est intéressant par l'indication qu'il
nous donne des sujets que les artistes avaient
proposes.
Je reproduis textuellement le passage qui en con-
tient la liste :
M. Vcrnot — le premier qui ait écrit — propose
Le Débarquement de saint Louis à Damiette.
« A la vue des ennemis rangés sur la côte le roi
« se jette le premier hors du navire ot, ayant de
o l'eau jusqu'aux épaules, il marche couvert do son
<« bouclier, l'cpée à la main. Son exemple entraîne
« le reste de l'armée.
M. Prudhon propose doux sujets. L'un est
La Cérémonie de la couronne d'épines.
« Saint Louis, accompagné do la reine Blanche,
« des princes ses frères, do plusieurs prélats et do
« toute sa cour, alla au devant de cette relique
« sainte, jusqu'à Villencuve-l'Archevêquc.
L'autre sujet est celui dcSaint François de Sales
toréchant devant Henri IV, en 160?.
M. Gérard présente également doux sujets :
Le premier : La Conversion de Clovis et son
baptême.
Le second : Le départ de saint Louis pour la
Terre Sainte.
M. Meynier propose aussi deux sujets :
1° Pliilippe-Auguste.
« Après avoir déposé la couronne sur l'autel,
« donne la bénédiction aux chevaliers ot barons du
« royaume avant la bataille do Bovines. »
2" Le corps de saint Louis est après sa mort ex-
posé à la vénération de l'armée.
M. Gros demande à traiter le sujet de : Saint
Denis prêchant dans les Gaules.
M. Guérin demande à consacrer Le Rachat des
esclaves chrétiens par les religieux de la Merci.
M. Girodet voudrait être admis à représenter:
^'Apothéose de Louis XVI.
tous ces sujets me paraissent susceptibles do
°urnir aux peintres l'occasion de développer les
CURIOSITÉ 309
qualités propres à leur talent et je ne pense pas
que sous le rapport pittoresque il y ait rien à dire.
On pourrait autoriser ces Messieurs à traiter :
M. Vernct. — Saint Louis à Damiette.
M. Prudhon. — La Couronne d'épines.
M. Gérard. — Le Baptême do Clovis.
M. Meynier. — Philippe-Auguste à Bouvinos.
M. Gros. — Saint Denis dans les Gaules.
M. Guérin. — Le Piachat des esclaves.
Jusqu'ici, tout va bien: les projets de nos artistes
paraissent suffisamment « religieux et héroïques »,
selon lo programme ministériel, à M. le chef de
la 2= division. Mais la proposition de Girodet
inquiète cet honorable fonctionnaire et il exprime
toutes les objections qu'elle lui parait soulever
dans cette simple phrase, ou se révèle la prudence
et l'expérience d'un homme qui a vu bien des
régimes so succéder :
« Quant à l'apothéose de Louis XVI que propose
M. Girodet, je dois prier Votre Excellence de mo
faire connaître si elle croit qu'il soit temps do
traiter ce sujet. »
Ce n'est pas l'esthétique de la conception de
Girodet et le moyen do l'exécuter qui l'embarrassent;
il no so demande pas si la corpulente silhouette du
malheureux roi présentera, au milieu des anges et
des nuages qui forment habituellement la figuration
et lo décor do ces sortes do scènes, toute la légèreté
désirable. Un scrupule seulement l'arrête : l'apo-
théose de Louis XVI no serait-elle pas prématurée?
Il y a si pou de temps que Napoléon s'est embarqué
pour Sainte-Hélène !
Lo ministre ratifia les propositions do son subor-
donné et, approuvant sa prudence, prescrivit de
demander un nouveau sujet à Girodet. Lainé ne se
doutait guère qu'il allait recevoir de cet arlisto une
leçon do politique.
En effet, Girodet, qui tenait à son allégorie, se
contenta tout bonnement d'en changer le titre et il
offrit do représenter: L'Arrivée de Louis XVI au
séjour des élus et sa réception par saint Louis.
Il voulait, ajoutait-il, rendre la pensée du confes-
seur : « Fils de saint Louis, montez au ciel. » On
devait voir, autour do Louis XVI, la Reino, Ma-
dame Elisabeth, lo Dauphin et, plus loin, les
victimes les plus illustres de la Révolution.
Telles sont les propositions qui, jointes à celles
des autres artistes, furent soumises au Roi le
10 septembre 1816 et approuvées par lui.
On perd alors la trace de cette affaire, et il est
probable qu'elle en resta là. Les commandes dont
11 s'agit faisaient partie d'un plan d'ensemble qui
prévoyait l'érection, à l'intérieur do la Madeleine,
de monuments à Louis XVI et à d'autres membres
de la familic royale. Co projet ayant été abandonné
pour laisser à l'édifice un caractère exclusivement
religieux, la décision du 31 mai 1816 no reçut pas
d'exécution. Il appartenait à un autre règne et à de
plus humbles artistes de mener à bien la décora-
tion do ces panneaux qui ne sont guère éclairés, i
faut lo reconnaître, do manière à mettre en valeur
des œuvres de maîtres.
Jean-Louis Fouché.
L'exécution du 1" de ces tableaux est confiée à
M. Garnier, colle du 2e à M. Gautherot.
Article 7
La dépense do ces tableaux sera imputée sur les
fonds alloués annuellement pour les travaux de
l'Église de la Madeleine.
Paris, le 31 Mai 1816.
Signé : Lainé. »
Gelait, on le voit, à une dépense totale de 223.000
francs que l'exécution de ces peintures aurait donné
lieu.
Le jour même do la signature de l'arrêté minis-
tériel, les peintres désignés .?n reçurent notification
et furent priés d'indiquer lo sujet qu'ils désiraient
traiter.
Ils no répondirent pas tous avec le même empres-
sement.
Gros, Girodet et Guérin se bâtèrent si peu d'ac-
cuser réception de l'avis officiel qu'une lettre de
rappel dut leur être envoyée lo 12 juillet suivant.
Enfin, toutes les réponses étant parvenues, le
chef do la 2" division du ministère de l'Intérieur,
chargé do suivre celte affaire, fut on mesure d'en
rendre compte au ministre.
Son rapport est intéressant par l'indication qu'il
nous donne des sujets que les artistes avaient
proposes.
Je reproduis textuellement le passage qui en con-
tient la liste :
M. Vcrnot — le premier qui ait écrit — propose
Le Débarquement de saint Louis à Damiette.
« A la vue des ennemis rangés sur la côte le roi
« se jette le premier hors du navire ot, ayant de
o l'eau jusqu'aux épaules, il marche couvert do son
<« bouclier, l'cpée à la main. Son exemple entraîne
« le reste de l'armée.
M. Prudhon propose doux sujets. L'un est
La Cérémonie de la couronne d'épines.
« Saint Louis, accompagné do la reine Blanche,
« des princes ses frères, do plusieurs prélats et do
« toute sa cour, alla au devant de cette relique
« sainte, jusqu'à Villencuve-l'Archevêquc.
L'autre sujet est celui dcSaint François de Sales
toréchant devant Henri IV, en 160?.
M. Gérard présente également doux sujets :
Le premier : La Conversion de Clovis et son
baptême.
Le second : Le départ de saint Louis pour la
Terre Sainte.
M. Meynier propose aussi deux sujets :
1° Pliilippe-Auguste.
« Après avoir déposé la couronne sur l'autel,
« donne la bénédiction aux chevaliers ot barons du
« royaume avant la bataille do Bovines. »
2" Le corps de saint Louis est après sa mort ex-
posé à la vénération de l'armée.
M. Gros demande à traiter le sujet de : Saint
Denis prêchant dans les Gaules.
M. Guérin demande à consacrer Le Rachat des
esclaves chrétiens par les religieux de la Merci.
M. Girodet voudrait être admis à représenter:
^'Apothéose de Louis XVI.
tous ces sujets me paraissent susceptibles do
°urnir aux peintres l'occasion de développer les
CURIOSITÉ 309
qualités propres à leur talent et je ne pense pas
que sous le rapport pittoresque il y ait rien à dire.
On pourrait autoriser ces Messieurs à traiter :
M. Vernct. — Saint Louis à Damiette.
M. Prudhon. — La Couronne d'épines.
M. Gérard. — Le Baptême do Clovis.
M. Meynier. — Philippe-Auguste à Bouvinos.
M. Gros. — Saint Denis dans les Gaules.
M. Guérin. — Le Piachat des esclaves.
Jusqu'ici, tout va bien: les projets de nos artistes
paraissent suffisamment « religieux et héroïques »,
selon lo programme ministériel, à M. le chef de
la 2= division. Mais la proposition de Girodet
inquiète cet honorable fonctionnaire et il exprime
toutes les objections qu'elle lui parait soulever
dans cette simple phrase, ou se révèle la prudence
et l'expérience d'un homme qui a vu bien des
régimes so succéder :
« Quant à l'apothéose de Louis XVI que propose
M. Girodet, je dois prier Votre Excellence de mo
faire connaître si elle croit qu'il soit temps do
traiter ce sujet. »
Ce n'est pas l'esthétique de la conception de
Girodet et le moyen do l'exécuter qui l'embarrassent;
il no so demande pas si la corpulente silhouette du
malheureux roi présentera, au milieu des anges et
des nuages qui forment habituellement la figuration
et lo décor do ces sortes do scènes, toute la légèreté
désirable. Un scrupule seulement l'arrête : l'apo-
théose de Louis XVI no serait-elle pas prématurée?
Il y a si pou de temps que Napoléon s'est embarqué
pour Sainte-Hélène !
Lo ministre ratifia les propositions do son subor-
donné et, approuvant sa prudence, prescrivit de
demander un nouveau sujet à Girodet. Lainé ne se
doutait guère qu'il allait recevoir de cet arlisto une
leçon do politique.
En effet, Girodet, qui tenait à son allégorie, se
contenta tout bonnement d'en changer le titre et il
offrit do représenter: L'Arrivée de Louis XVI au
séjour des élus et sa réception par saint Louis.
Il voulait, ajoutait-il, rendre la pensée du confes-
seur : « Fils de saint Louis, montez au ciel. » On
devait voir, autour do Louis XVI, la Reino, Ma-
dame Elisabeth, lo Dauphin et, plus loin, les
victimes les plus illustres de la Révolution.
Telles sont les propositions qui, jointes à celles
des autres artistes, furent soumises au Roi le
10 septembre 1816 et approuvées par lui.
On perd alors la trace de cette affaire, et il est
probable qu'elle en resta là. Les commandes dont
11 s'agit faisaient partie d'un plan d'ensemble qui
prévoyait l'érection, à l'intérieur do la Madeleine,
de monuments à Louis XVI et à d'autres membres
de la familic royale. Co projet ayant été abandonné
pour laisser à l'édifice un caractère exclusivement
religieux, la décision du 31 mai 1816 no reçut pas
d'exécution. Il appartenait à un autre règne et à de
plus humbles artistes de mener à bien la décora-
tion do ces panneaux qui ne sont guère éclairés, i
faut lo reconnaître, do manière à mettre en valeur
des œuvres de maîtres.
Jean-Louis Fouché.