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Champeaux, Alfred de; Gauchery, Paul: Les travaux d’architecture et de sculpture, [1]: exécutés pour Jean de France, duc de Berry
DOI Page / Citation link: https://doi.org/10.11588/diglit.25011#0029
LES TRAVAUX D’ARCHITECTURE ET DE SCULPTURE
EXÉCUTÉS POUR JEAN DE FRANCE , DUC DE RERRY
(Planche 3.)
La vie du duc de Berry appartient à une période néfaste de notre histoire. Mêlé à toutes
les intrigues ambitieuses qui attristèrent le long règne de l’infortuné Charles VI, il fut
amené par les circonstances à jouer un rôle qui dépassait ses forces et auquel se prê-
tait mal son tempérament d’épicurien. Il n’aimait du pouvoir que la facilité de puiser
dans le trésor public, pour satisfaire ses caprices sans cesse renaissants d’amateur et de
curieux, et pour prodiguer l’argent aux officiers avides qui vivaient autour de lui.
Devenu le chef du parti des Armagnacs, après la mort du duc d’Orléans, il fut contraint
de s’humilier devant son neveu, Jean sans Peur, pour obtenir de passer ses derniers
jours dans la tranquillité dorée qui lui était si chère.
Attaqué violemment par le parti bourguignon qui lui reprochait avec raison son avi-
dité insatiable et ses exactions financières, Jean de Berry s’est refait une popularité pos-
thume par suite de l’intérêt passionné qu’il a porté à toutes les manifestations artistiques.
Malgré les injures du temps, ce qui subsiste des œuvres commandées par lui excite
notre admiration et fait regretter la destruction qui semble s’être étendue systématique-
ment à tout ce qu’il a touché. Nous avons essayé de reconstituer un des côtés de cette
existence si bien remplie au point de vue de l’art, en recueillant ce qui concerne les édi-
fices et les œuvres de la sculpture. Ces recherches pourront peut-être compléter, dans
une certaine mesure, la publication de l’inventaire du duc de Berry, préparée par le
regretté M. Demav, qui permettra bienlôt d’apprécier la valeur des richesses artistiques
rassemblées par ce prince. M. Léopold Delisle a déjà fait revivre la partie la plus inté-
ressante de ces collections, celle de la librairie, dans une série d'études dont la méthode
et la précision ne laissent rien à ajouter après elles.
Les monuments élevés par les princes de la maison de Valois portent l’empreinte d’un
style nouveau moins sobre et moins sévère, mais plus personnel et plus mouvementé
que celui du xme siècle. Cette transformation était la conséquence de la prépondérance
prise par le pouvoir royal sur la féodalité, et des immenses progrès faits par l’industrie.
Le roi Charles V et ses frères les ducs d’Anjou, de Bourgogne et de Berry, renonçant
aux sombres forteresses de leurs ancêtres, se firent construire des châteaux dont les
galeries éclairées par de larges baies laissaient voir librement les richesses artistiques
qu’ils y avaient accumulées. Chaque jour le luxe suivait une marche ascendante
EXÉCUTÉS POUR JEAN DE FRANCE , DUC DE RERRY
(Planche 3.)
La vie du duc de Berry appartient à une période néfaste de notre histoire. Mêlé à toutes
les intrigues ambitieuses qui attristèrent le long règne de l’infortuné Charles VI, il fut
amené par les circonstances à jouer un rôle qui dépassait ses forces et auquel se prê-
tait mal son tempérament d’épicurien. Il n’aimait du pouvoir que la facilité de puiser
dans le trésor public, pour satisfaire ses caprices sans cesse renaissants d’amateur et de
curieux, et pour prodiguer l’argent aux officiers avides qui vivaient autour de lui.
Devenu le chef du parti des Armagnacs, après la mort du duc d’Orléans, il fut contraint
de s’humilier devant son neveu, Jean sans Peur, pour obtenir de passer ses derniers
jours dans la tranquillité dorée qui lui était si chère.
Attaqué violemment par le parti bourguignon qui lui reprochait avec raison son avi-
dité insatiable et ses exactions financières, Jean de Berry s’est refait une popularité pos-
thume par suite de l’intérêt passionné qu’il a porté à toutes les manifestations artistiques.
Malgré les injures du temps, ce qui subsiste des œuvres commandées par lui excite
notre admiration et fait regretter la destruction qui semble s’être étendue systématique-
ment à tout ce qu’il a touché. Nous avons essayé de reconstituer un des côtés de cette
existence si bien remplie au point de vue de l’art, en recueillant ce qui concerne les édi-
fices et les œuvres de la sculpture. Ces recherches pourront peut-être compléter, dans
une certaine mesure, la publication de l’inventaire du duc de Berry, préparée par le
regretté M. Demav, qui permettra bienlôt d’apprécier la valeur des richesses artistiques
rassemblées par ce prince. M. Léopold Delisle a déjà fait revivre la partie la plus inté-
ressante de ces collections, celle de la librairie, dans une série d'études dont la méthode
et la précision ne laissent rien à ajouter après elles.
Les monuments élevés par les princes de la maison de Valois portent l’empreinte d’un
style nouveau moins sobre et moins sévère, mais plus personnel et plus mouvementé
que celui du xme siècle. Cette transformation était la conséquence de la prépondérance
prise par le pouvoir royal sur la féodalité, et des immenses progrès faits par l’industrie.
Le roi Charles V et ses frères les ducs d’Anjou, de Bourgogne et de Berry, renonçant
aux sombres forteresses de leurs ancêtres, se firent construire des châteaux dont les
galeries éclairées par de larges baies laissaient voir librement les richesses artistiques
qu’ils y avaient accumulées. Chaque jour le luxe suivait une marche ascendante