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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.1859

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Nr. 1
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Mantz, Paul: Un nouveau véronèse au Musée de Louvre
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https://doi.org/10.11588/diglit.16987#0031

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UN NOUVEAU VÉRONÈSE

AU MUSÉE DU LOUVRE

Le nom glorieux de Véronèse, que saluent aujourd'hui tant de chaleu-
reuses acclamations, n'a pas toujours obtenu en France le même honneur.
Il a fallu bien du temps à notre critique, plus volontiers préoccupée du
sens moral des œuvres d'art que de leur beauté pittoresque, pour entrer
dans l'intimité de ce fier génie et comprendre un maître qui, épris avant
tout des magnificences de la vie extérieure, paraissait s'inquiéter si peu
des conditions littéraires de la peinture, de la vérité historique et même
de la pensée ou de l'émotion. Nous aimons fort en France les idées
clairement exprimées, nous n'admettons la fantaisie qu'autant qu'elle est
raisonnable, et nous demandons de la logique et peut-être un peu de phi-
losophie, même à ces décorateurs vigoureux ou charmants qui font vivre
sur les murailles et aux plafonds des palais les lumineuses créations du
caprice. Les peintres de Venise, qui ne savaient pas notre goût et qui ne
l'eussent point compris, ne se mirent jamais en peine pour satisfaire à ces
exigences. Paul Véronèse y songea moins que tout autre. Il était splendide,
il avait la puissance et la grâce, il combinait savamment des couleurs et
des formes, et, lorsque après avoir, depuis l'aube jusqu'au soir, tra-
vaillé aux Noces de Cana ou au Repas chez le Pharisien, il descendait
de son atelier pour embrasser sa femme et ses enfants, il croyait naïve-
ment avoir bien employé sa journée, et il s'endormait avec cette sérénité
de l'ouvrier qui a fait sa tâche et qui est sûr de l'avoir bien faite.

Mais Véronèse se trompait, et moins d'un siècle après sa mort les
beaux esprits essayèrent de le lui faire voir. Lorsque le 1er octobre 1667,
l'Académie royale de peinture daigna s'occuper de lui dans l'une de ses
solennelles conférences, Jean Nocret, qui ce jour-là portait la parole, fit
d'abord un assez vif éloge du tableau des Pèlerins d'Emmaùs. Cette noble
page le satisfaisait évidemment : il parla avec admiration, avec justice des
mérites de la composition, des qualités de la couleur et de la lumière; il
 
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