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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.1859

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Viollet-le-Duc, Eugène-Emmanuel: Requète adressée aux parisiens par un étranger
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https://doi.org/10.11588/diglit.16987#0169

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

169

comprends pas comment un peuple délicat, sensible à ce qui est conve-
nable, repoussant ce qui ne l'est pas, permet au milieu de sa ville de
pareilles énormités. Je ne m'explique pas comment les artistes qui savent
si bien décorer les édifices, les maisons, qui les couvrent de délicates
sculptures, admettent qu'un marchand d'habits ou de lorgnettes, ou un
dentiste, ou un tailleur de chemises, détruise l'effet de ses œuvres par
des affiches qui dépassent toute raison. Vous avez des ordonnances qui
règlent la hauteur des maisons , la saillie des corniches , l'espacement des
lucarnes, etc., pourquoi n'avez-vous pas d'ordonnances pour régler la
dimension des affiches? 11 me semble que c'est bien assez de tolérer l'af-
fichage en papier sur les murs banals, à la hauteur de l'œil, sans per-
mettre ainsi au premier venu d'imposer son nom et ses produits aux gens
qui, n'ayant besoin ni de dents, ni de redingotes, se promènent dans la
ville pour admirer ses édifices, la belle ordonnance des maisons et les
œuvres d'art qu'on rencontre à chaque pas. Pourquoi ces gracieux balcons
si on doit les cacher derrière des planches de sapin couvertes de couleurs
criardes et de légendes souvent ridicules? Pourquoi ces sculptures, si à
côté d'elles, ou même devant elles, on pose des placards difformes, rem-
plis d'inscriptions visibles à un kilomètre de distance? Que cela soit admis
à Londres ou à New-York, je le veux bien, mais à Paris, ville signalée
entre toutes par son goût, par sa répulsion pour l'excès en toute chose,
par l'aspect monumental de ses rues, je ne le comprends pas. Évidem-
ment les Parisiens sont amenés par l'habitude à passer devant ces gros-
sières pancartes sans les voir, car s'ils les voyaient ils demanderaient
qu'on les enlevât sans tarder. »

On voit jusqu'où mon ami le chanoine pousse son amour pour Paris,
mais en laissant de côté ce qu'il y a d'exagéré dans son horreur pour les
affiches monstres, il pourrait bien avoir un peu raison.

E. VIOLLET-LE-IHIC.
 
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