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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 6.1860

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Nr. 4
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Siret, Adolphe: Correspondance particulière de la Gazette des Beaux-Arts: l'École d'Anvers en 1860
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https://doi.org/10.11588/diglit.17222#0247

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CORRESPONDANCE D'ANVERS.

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succès se sont rencontrés chez des artistes qui sortent presque tous de l'Académie.
Quant aux autres artistes de valeur qui ont réclamé, il leur a été répondu que leurs
tableaux se vendant très-bien, ils n'avaient pas besoin d'encouragement officiel ; que,
d'ailleurs, la grande peinture historique et religieuse n'étant pas soutenue par le public,
il fallait qu'elle fût soutenue par l'Etat.

Ces arguments, vrais au fond, ont produit dans le courîmt libre un vif mécontente-
ment, et la lutte n'en a continué que de plus belle; mais, je dois le dire, de part et
d'autre, c'est une lutte loyale dont, en définitive, l'art profite, et qui fait dire aux gens
éclairés que de pareils combats sont tout à l'avantage du public.

La guerre que l'on fait à l'Académie comme établissement enseignant, me paraît
moins loyale. Ici, pour bien faire comprendre ce qui va suivre, je dois remonter un
peu haut et citer des noms propres.

Lorsque M. le baron Wappers quitta la direction de l'Académie, il fallut lui trouver
un successeur. Deux hommes de talent furent mis en avant : MM. de Keyser et Leys.
Ce dernier n'était pas un peintre d'histoire proprement dit; c'est M. de Keyser qui fut
nommé. C'est à partir de ce moment que la lutte commença. Loin de moi la pensée de
laisser soupçonner que M. Leys y donna les mains; mais il fut, malgré lui, la tète de
colonne du parti anti-académique.

Les reproches faits à l'Académie d'Anvers sont ceux qui peuvent être adressés à
tous les établissements du même genre; ils se traduisent par ces mots : le pédantisme
dans l'art. On a eu beau perfectionner l'enseignement, on a eu beau créer des chaires
d'histoire nationale, etc., la haine veut rester aveugle, et l'on a continué un système de
récriminations qui n'a pas tardé à atteindre le directeur de l'établissement.

Je n'ai nulle envie de me constituer, dans cette circonstance, l'avocat de qui que ce
soit; je ne suis que l'historien de ce que j'ai vu. Or, les récriminations adressées à
M. de Keyser avaient plutôt pour objet le talent du peintre que les capacités du direc-
teur. Nous ne toucherons pas aujourd'hui à son talent; mais, comme directeur, je puis
certifier que ceux qui l'accusent ne font point vu à l'œuvre. On lui demande les résul-
tats d'un enseignement qu'il ne fait que depuis quelques années! C'est aller vite en
besogne, et cette exigence porte en elle-même un principe qui la condamne.

Tels sont donc les éléments vitaux auxquels nous devons, de part et d'autre, des
œuvres remarquables; car tout le monde travaille, tout le monde veut donner gain de
cause aux principes qu'il préconise : et ainsi se perfectionne tout doucement l'École
d'Anvers, dont je vais maintenant vous définir le caractère propre.

La couleur! voilà le rêve et le travail incessant de l'artiste anversois. La pensée, la
passion, le mouvement, l'esprit, l'occupent beaucoup moins, quoique cependant, sous
ce rapport, il y ait un mieux sensible depuis quelques années, grâce à l'École française
que l'artiste flamand étudie avec attention. Cette adoration pour la couleur est dans nos
mœurs; on la constate aussi loin que remonte l'histoire de notre peinture, et il semble
qu'elle doive y régner perpétuellement, à considérer les préférences du public à nos
expositions. Le peintre anversois néglige son instruction et cultive peu son esprit; il
lit peu, il médite peu; il voit, il n'aime que l'art qui, pour lui, est la couleur, et il fait
bon marché du reste. Il y a d'honorables exceptions, mais elles sont rares, et je me
réserve de vous les faire connaître. Les peintres anversois que vous connaissez le mieux
en France vous donneront une idée de ce que sont les autres, en tenant compte, bien
entendu, des divers degrés de mérite. M. Wappers et M. Leys sont les peintres dent la
fougue coloriste sert de modèle à presque tous nos peintres. Or, comme l'Académie
 
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