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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 8.1860

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Nr. 3
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Cousin, Jules: Le pont au Change
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https://doi.org/10.11588/diglit.17224#0157

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152 GAZETTE DES BEAI X-ARTS.

nivellements implacables vous acquièrent des droits superbes à la recon-
naissance des chevaux de fiacres futurs. Mais quel terrible compte vous
aurez à rendre un jour aux historiens, aux artistes, aux poètes, qui
vous demanderont ce que vous avez fait de tous ces trésors, de tous ces
souvenirs que le passé vous avait confiés pour les transmettre à l'avenir!

Donc le vieux pont au Change n'est plus, et un autre s'élève tout
pimpant, dressant coquettement, en face de la colonne du Palmier, sa
crête en pierre de Saint-Ylie. Au milieu des applaudissements qui ont ac-
cueilli le nouveau venu, et qui sans doute vont se changer en cris d'ad-
miration quand sa toilette sera complètement terminée, qu'il nous soit
permis de faire entendre quelques regrets en l'honneur de l'ancien : c'est
son histoire que nous allons ébaucher, l'histoire de ce vieil édifice que
nous avons vu égrener pierre à pierre pendant près d'un an et pénible-
ment arracher du lit du fleuve.

Que le pont au Change ait été ou non élevé sur l'emplacement du
grand pont construit par Charles le Chauve pour barrer la Seine aux
Normands, ce n'est pas ici le lieu d'agiter cette question, sur laquelle
Jaillot et Bonamy se sont largement étendus, et, chose rare, ont fini par
s'entendre. Nous admettons volontiers avec eux que le pont de Charles
le Chauve, devant lequel se passent les principaux épisodes du fameux
siège de 885 dont Abbon a été l'Homère, se trouvait un peu plus bas, sur
l'emplacement où s'éleva plus tard le pont Marchant. Quoi qu'il en soit,
notre pont, appelé tout simplement le Grand Pont jusqu'au xne siècle, où
Louis le Jeune y établit les changeurs, remonte comme fondation à la
plus haute antiquité. Jusqu'en l/il*2, époque de la première construction
du pont Notre-Dame, il fut avec le Petit Pont le seul lien qui rattachait
la Cité au rivage. Les Romains, ses premiers constructeurs, lui donnèrent,
ainsi que les travaux d'arrachement opérés à deux reprises différentes, en
1639 et en 1859, l'ont démontré, ce caractère de solidité à toute épreuve
qu'ils imprimaient à leurs édifices. Ce pont romain, évidemment détruit
par suite de nécessités stratégiques, à une époque que nous ne pou-
vons préciser, mais qui se rapporte très-probablement aux dernières
invasions des Francs, fut ensuite reconstruit à plusieurs reprises, tantôt
en pierre, tantôt en bois, suivant les ressources dont on pouvait disposer.

Les ouvriers des ponts, ou frères pontifs. étaient alors si malhabiles
que la première débâcle ou la première crue un peu forte jetait dans la
rivière pont, maisons et habitants, quand ces derniers n'avaient pas eu la
précaution de se retirer, avec leurs meubles et leurs richesses, aux pre-
mières apparences de danger. La série de ces catastrophes, les moyens
employés plus encore pour les prévoir que pour les combattre, donnent
 
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