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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 11.1861

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Gedeonov, Stepan Aleksandrovič: Notice sur les objets d'art de la Galerie Campana à Rome
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LA GALERIE G A M PAN A.

87

tant du bain, toute revêtue de pudeur, bien
({ne pleine d'animation ; et le groupe d'Her-
maphrodite et Salmacis1, que l'on dirait une
peinture pompéienne de la plus grande beauté ; I
et Cupidon, qui, par un geste plein de mutine-
rie, montre une flèche à Vénus; et Vénus elle-
même se chaussant dans une attitude pleine I
de grâce et de volupté. Ces figures font un
merveilleux effet sous une voûte couverte
d'arabesques par Jean d'Udine. » (P. 205.)

Sans vouloir désavouer ces expressions d'un
enthousiasme légitime, nous croyons pourtant
que l'on ne peut signaler comme émanant di-
rectement du maître (quant à la composition
et au dessin) que les numéros 1, 2, 3 et 7 de
nos fresques ; on y retrouve l'empreinte tout
entière du génie de Raphaël, si gracieux et si
noblement chaste à la fois. La fable de Syrinx
et de Pan, celle aussi des amours de Vénus "et
d'Adonis, révèlent une conception plus hardie,
un faire moins délicat et moins sobre; et nous
savons en effet qu'un beau dessin au crayon
rouge ainsi que le carton (fig. de grandeur na-
turelle) de la dernière de ces fresques, par
Jules Romain, se trouvent à Vienne dans la
collection de l'archiduc Charles.

La villa de la porta Pinciana (détruite par la
Révolution de 4848) contenait également des
peintures à fresque attribuées à Raphaël et à
son école, et, dans le nombre, la plus célèbre
de toutes (car on la croit due tout entière au
pinceau du maître), représentant :

L'Enlèvement d'Hélène. Deux Troyens en-
traînent la belle Grecque vers une barque;
Hélène, à genoux, se retourne éplorée vers
Paris, qui la retient par un bout de son voile.
Dans le fond, combat de Troyens et de Grecs;
à gauche, des vaisseaux; à droite, un palais.
(Haut., 1 m. 10 cent.; larg., 1 m. 45 cent.)

En 1785 (car les documents authentiques
connus ne vont pas au delà), le marquis Olgiati,
alors possesseur de la villa de Raphaël, la vendit
au cardinal Joseph Doria. Plus tard elle passa
à l'avocat Nelli, et en dernier lieu au prince
Camille Borghèse, qui l'enclava dans son parc
de la porte du Peuple et en fit enlever et trans-
porter dans sa galerie les trois fresques repré-
sentant les noces d'Alexandre et de Roxane, le
tir à la cible et la fête de Flore. L'Enlèvement
(VHélène, la plus belle et la plus célèbre de
toutes, avait été extrait plusieurs années au-
paravant, pour le compte de M. Nelli, par le
peintre Palmaroli. En 1820 nous la retrouvons
dans l'atelier du peintre baron Camuccini
(voy. pl. bas), dont les héritiers l'ont finale-
ment vendue au marquis Campana.

Raphaël paraît avoir fait plusieurs esquisses
de cette merveilleuse composition, avant d'en
aborder l'exécution sur les murs de la villa.

1. C'est celui que l'on appelle encore Vénus et
Adonis, Angélique et Midor, etc.

Parmi les dessins originaux de ce maître fai-
sant partie des collections de sir Thomas Law-
rence et du duc de Devonshire (à Chatsworth)
il en est deux qui ont pour sujet l'enlèvement
d'Hélène, et dont les variantes témoignent des
modifications successivement apportées par le
peintre à son idée première. L'un est une com-
position de six figures seulement : deux hom-
mes se sont emparés d'Hélène, qui paraît leur
résister. Un guerrier accourt, portant des
objets précieux dans une caisse; deux autres
semblent le protéger. L'autre dessin, riche
d'une vingtaine de figures, reproduit le même
motif principal : Hélène en larmes est entraî-
née par Paris et ses compagnons vers le vais-
seau qui l'attend; deux serviteurs les précè-
dent, portant des objets précieux. Les mêmes
variantes se font remarquer dans quelques
plats en majolique qui répètent le sujet de
l'enlèvement d'Hélène, d'après les dessins de
Raphaël. En revanche, la célèbre gravure
de Marc-Antoine et de Marc de Ravenne
(Bartsch XIV, n° 209-210) reproduit notre fres-
que avec une exactitude scrupuleuse ; il en est
de même d'un grand plat en majolique faisant
partie de la collection Campana et signé au
revers du nom de Francesco-Xanto Rovighese.
D'anciennes copies au pastel de VEnlèvement
d'Hélène et des autres peintures de la villa de
Raphaël se voient aussi à la galerie Doria, à
Rome, comme autant de témoignages de la
constante admiration des contemporains et de
la postérité pour ces précieuses peintures.

Nota. M. Passavant croit les fresques de la
villa Palatine répétées par Jules Romain d'après
les peintures de la salle de bain {Rafaël, etc.,
von J. D. Passavant. I, 287) ; ces dernières au-
raient été exécutées à leur tour par des élèves
de Raphaël, sur les dessins du maître (ibid., II.
279). Même appréciation des peintures de la
villa Pinciana (ibid., I, 288, 289; II, 288, 289,
602). Tout au plus admet-il l'action à peu près
directe de Raphaël sur les figures principales
des fresques du Vatican (ibid., I. 103). C'est
pousser trop loin l'esprit de critique et de
doute. Raphaël est inséparable de son école,
et rien ne nous autorise à admettre que son
pinceau soit demeuré systématiquement étran-
ger à l'exécution des merveilleuses peintures
qui portent son nom.

Trois mois, — jour pour jour, — après notre
acquisition conclue, le Musée du Louvre s'est
rendu acquéreur, à son tour, des objets restant
du musée Campana. A la suite de nos choix
faits et limités, comme il a été dit, aux œuvres
de premier ordre, la France a payé le surplus
812,000 écus romains, ou 4,360,140 fr.

Paris, juin 1861.
 
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