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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 11.1861

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Correspondances particulières de la Gazette des Beaux-Arts
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https://doi.org/10.11588/diglit.17227#0095

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CORRESPONDANCE DE ROUEN. 89

revenant à un sujet qui lui appartient par droit d'invention, a ajouté à ces premières
recherches des informations plus précises et plus complètes, et il en a récemment fait
Pobiet d'une communication à la Société française d'archéologie. Les bonnes choses

u

qu'il a dites, il compte les imprimer bientôt, et ce jour-là nous saurons comment est
née la faïence de Rouen, à quelle époque elle a brillé, à quelle date elle a péri.

Qu'il nous suffise de rappeler que, bien que Rouen paraisse avoir fabriqué de la
faïence au xvie siècle, ce n'est qu'après la mort de Louis XIII que Nicolas Poirel, sieur
de Grandval, et huissier du cabinet d'Anne d'Autriche, établit, en 1644, la première
manufacture dont il nous reste des produits authentiques. Deux plats, qui faisaient
partie de l'exposition, et qui portent tous deux au revers les mots : Faict à Rouen en
1647, paraissent pouvoir être attribués au sieur de Grandval. Les dessins qui ornent
ces plats sont colorés d'un bleu très-doux et rappellent le système décoratif que les
faïenciers de Nevers avaient emprunté à l'Italie : l'art, pendant cette première période,
est déjà charmant, mais il n'est pas encore émancipé, il n'a pas son cachet intime et
définitif.

Un privilège de trente ans avait été accordé à Poirel de Grandval : au moment où
sa concession allait expirer, en 1673, on vit arriver à Rouen un autre fabricant muni
d'un nouveau brevet. C'était Louis Poterat, écuyer, sieur de Saint-Etienne. Les lettres
patentes que lui avait octroyées Louis XIV, et dont nous trouvons le texte dans le livre
de M. Ouin-Lacroix, sont infiniment curieuses. Louis Poterat avait fait remontrer au
roi que, « par des voyages dans les pays étrangers et par des applications continuelles,
il avoit trouvé le secret de faire la véritable porcelaine de Chine et celui de la faïence
de Hollande; » mais il prétendait, dans sa supplique, qu'à cause des difficultés de la
cuisson il ne pouvait fabriquer l'une sans l'autre, et il demandait l'autorisation d'éta-
blir au faubourg Saint-Sever une manufacture « pour y faire toutes sortes de vaisselles,
pots et vases de porcelaine semblables à ceux de la Chine, et de faïence violette, peinte
de blanc et de bleu et d'autres couleurs, à la forme de celle de Hollande. » L'autorisa-
tion qu'il sollicitait lui ayant été accordée, les lettres royales furent enregistrées par le
parlement de Rouen, le 9 décembre 1673.

La fabrication de Louis Poterat et celle de ses imitateurs inaugurent la plus brillante
époque de la faïence rouennaise, dont le développement viril coïncide ainsi avec la fin
du règne de Louis XIV. Le caractère de l'art à cette date nous est déjà signalé par la
requête de Louis Poterat qui prétend faire de la faïence « violette, peinte de blanc et
de bleu et d'autres couleurs. » Mais ces indications un peu vagues sont précisées de la
manière la plus éloquente par les monuments réunis à l'exposition de Rouen. Un beau
saladier, au fond duquel on lit cette inscription : Brument, 4 699, montre combien la
gamme de la coloration avait gagné en étendue et en intensité. Les tons, harmonieux
d'ailleurs, dessinent, sur l'émail d'un blanc laiteux, des dessins symétriques diversement
colorés qui, en décorant les bords du plat, se lient à l'ornement central, et qui repré-
sentent des cartouches, des enroulements réguliers, des lambrequins analogues à ceux
qu'on peut voir dans les recueils du temps, dans celui de Daniel Marot, par exemple.
Cette ornementation est élégante et riche, mais, constamment raisonnée dans sa fantaisie,
elle demeure entièrement française. Le dessin est d'ailleurs presque toujours d'accord
avec le galbe et le style du vase qu'il décore. Quant aux formes qu'alïécte la faïence
de Rouen, elles se diversifient à l'infini. La vaisselle de table fut la branche la plus
féconde de cette industrie, qui n'était pas encore un art populaire, puisque ses produits
s'adressaient surtout à la riche bourgeoisie, mais qui le devint vers la seconde moitié
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