1 y /, G A Z G T T E DES I ; K A U X - A R T S.
C'était, je le répète, une entreprise alors absolument nouvelle en
France, que de prévenir la chute d'un ancien monument, et d'en pro-
longer l'existence sans en altérer le style et l'aspect extérieur. De 1789
à 1800, on n'avait fait que démolir; de 1800 à 181/j, la destruction s'était
plutôt ralentie qu'arrêtée, bien que, dans quelques villes, à Nîmes, par
exemple, l'autorité municipale eût fait certains efforts, plus méritoires
qu'habiles, pour protéger ses monuments. C'est seulement cinq ans
après 1814 qu'on aperçoit un temps d'arrêt et comme le premier signe
d'un mouvement réparateur. Une circulaire du ministre de l'intérieur, en
date du 8 avril 4 849, demandait à tous les préfets des renseignements
circonstanciés sur les monuments et les antiquités de leurs départements,
ainsi que sur les mesures à prendre pour en assurer la conservation. Par
suite de cette circulaire, une ordonnance du roi établissait, au sein de
l'Académie des inscriptions et belles-lettres, une commission chargée de
procéder à l'examen et au classement des documents transmis par les
préfets ; malheureusement cette bonne volonté demeura presque stérile
pendant les onze années écoulées de 1819 à 1830. Quelques rares notices
parvinrent à l'Institut, et la commission fut souvent très-embarrassée de
savoir à qui donner les médailles dont elle disposait chaque année. Au-
jourd'hui c'est un autre embarras : on a beau diviser, fractionner ces
médailles, chaque année la commission regrette de ne pouvoir les multi-
plier assez.
Si le zèle manquait en 1819 pour décrire nos monuments, qu'était-ce
donc pour les réparer ? Personne n'y songeait, ou si, par grand hasard,
l'autorité prenait pitié de quelque édifice en péril, c'était presque toujours
pour lui porter malheur. Ainsi, à Paris même, on avait vu, vers cette
époque, un architecte en renom ne rien trouver de mieux, pour garantir
la voûte de la grande salle du palais des Thermes, que de la coiffer de
cet immense et affreux chapeau de tuiles copié trait pour trait sur les toits
delà halle aux vins, masse informe et disparate, qu'on vient de corriger
il y a seulement quelques années. Nous n'avons pas besoin de dire que
M. Caristie avait conçu tout autrement son projet cle restauration. *
U était temps de se mettre à l'œuvré. La ruine était imminente.
Millin, dans son voyage, daté de 1807, décrit l'état de l'édifice en termes
très-alarmants et prédit un prochain désastre. Quatre ans après son pas-
sage à Orange, en 1811, la nécessité d'une consolidation devenait plus
évidente encore. En redressant, aux abords de la ville, la route impériale
de Paris à Antibes, on l'avait dirigée en ligne droite dans l'axe de l'arc
de triomphe, que jusque-là elle laissait de côté, et, comme à Paris, pour
l'arc de l'Étoile, on avait fait contourner la chaussée autour du monu-
C'était, je le répète, une entreprise alors absolument nouvelle en
France, que de prévenir la chute d'un ancien monument, et d'en pro-
longer l'existence sans en altérer le style et l'aspect extérieur. De 1789
à 1800, on n'avait fait que démolir; de 1800 à 181/j, la destruction s'était
plutôt ralentie qu'arrêtée, bien que, dans quelques villes, à Nîmes, par
exemple, l'autorité municipale eût fait certains efforts, plus méritoires
qu'habiles, pour protéger ses monuments. C'est seulement cinq ans
après 1814 qu'on aperçoit un temps d'arrêt et comme le premier signe
d'un mouvement réparateur. Une circulaire du ministre de l'intérieur, en
date du 8 avril 4 849, demandait à tous les préfets des renseignements
circonstanciés sur les monuments et les antiquités de leurs départements,
ainsi que sur les mesures à prendre pour en assurer la conservation. Par
suite de cette circulaire, une ordonnance du roi établissait, au sein de
l'Académie des inscriptions et belles-lettres, une commission chargée de
procéder à l'examen et au classement des documents transmis par les
préfets ; malheureusement cette bonne volonté demeura presque stérile
pendant les onze années écoulées de 1819 à 1830. Quelques rares notices
parvinrent à l'Institut, et la commission fut souvent très-embarrassée de
savoir à qui donner les médailles dont elle disposait chaque année. Au-
jourd'hui c'est un autre embarras : on a beau diviser, fractionner ces
médailles, chaque année la commission regrette de ne pouvoir les multi-
plier assez.
Si le zèle manquait en 1819 pour décrire nos monuments, qu'était-ce
donc pour les réparer ? Personne n'y songeait, ou si, par grand hasard,
l'autorité prenait pitié de quelque édifice en péril, c'était presque toujours
pour lui porter malheur. Ainsi, à Paris même, on avait vu, vers cette
époque, un architecte en renom ne rien trouver de mieux, pour garantir
la voûte de la grande salle du palais des Thermes, que de la coiffer de
cet immense et affreux chapeau de tuiles copié trait pour trait sur les toits
delà halle aux vins, masse informe et disparate, qu'on vient de corriger
il y a seulement quelques années. Nous n'avons pas besoin de dire que
M. Caristie avait conçu tout autrement son projet cle restauration. *
U était temps de se mettre à l'œuvré. La ruine était imminente.
Millin, dans son voyage, daté de 1807, décrit l'état de l'édifice en termes
très-alarmants et prédit un prochain désastre. Quatre ans après son pas-
sage à Orange, en 1811, la nécessité d'une consolidation devenait plus
évidente encore. En redressant, aux abords de la ville, la route impériale
de Paris à Antibes, on l'avait dirigée en ligne droite dans l'axe de l'arc
de triomphe, que jusque-là elle laissait de côté, et, comme à Paris, pour
l'arc de l'Étoile, on avait fait contourner la chaussée autour du monu-