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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 11.1861

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Nr. 3
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Burty, Philippe: Les eaux-fortes de M. J.-F. Millet
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https://doi.org/10.11588/diglit.17227#0272

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LES EAUX-FORTES DE M. J.-F. MILLET. 263

imprévue, avec celle d'un graveur de l'école de Fontainebleau, Léon
Daven. C'est le même procédé de tailles courbes, un peu espacées et
courtes, qui suivent le muscle, le pli ou la forme de l'objet; de pointillé
robuste pour les demi-teintes; de treillis carrés dans les ombres fortes,
et de franches réserves pour les lumières. Cette analogie est surtout re-
marquable dans les pièces de Léon Daven d'après le Rosso, dont elles
rendent si sobrement l'effet décoratif et l'allure quelque peu sauvage.

M. J.-F. Millet, qui (empressons-nous de le dire) ignorait hier en-
core jusqu'au nom cle Léon Daven, a gravé sa première eau-forte
vers 1856. Elle représente une paysanne qui carde de la laine. Elle prend
les rouleaux posés près d'elle sur un panier renversé, les démêle entre
les dents de fer mobiles de ses deux cardes, et emplit une corbeille de
leurs flocons neigeux. Sur la maie reposent les balances, et derrière sa
chaise on aperçoit la roue d'un grand rouet1 (I). M. Millet fut peu content
de cet essai, qui a cependant une grande allure, mais dont le travail est
moins hardi que clans les autres. 11 grava alors sur une plaque de zinc
deux femmes assises dans une chaumière, et cousant à la lueur d'une
lampe de fer de forme antique accrochée à une barre. Soit que le vernis
ait été mal préparé, soit que l'eau-forte ait été trop violente, le métal
fut atteint si profondément qu'il ne donna à l'impression qu'une image
lourde, et qu'il fut biffé après quelques épreuves d'essai (II). Citons en-
core, comme essai sans résultat (nous n'en connaissons qu'une épreuve),
un croquis à la pointe sèche égratigné sur le revers d'une planche; c'est
une bergère, enveloppée dans un lourd manteau de laine, qui tricote,
adossée à un tertre. Les barbes, que laisse sur le cuivre le sillage de la
pointe, sont demeurées très-apparentes (III).

Les eaux-fortes de M. J.-F. Millet ne sont donc qu'un nouveau chant sur
le même mode, mais avec un autre instrument, de son épopée du paysan.
Le temps n'est plus des idylles ni des églogues. A-t-il même jamais existé
sincèrement dans la Gaule? Je crois que nous avons été longtemps dupes
des prestiges sacrés de la littérature antique ; mais, à coup sûr, ce n'est
ni dans la Brie ni dans la Beauce que fleurissent les lauriers-roses de
Théocrite. Tityre a dû toujours s'y appeler Jean, Jeannot, ou de quelque
nom plus barbare, et les chères brebis de madame Deshoulières feraient
sagement de ne point s'aventurer dans les chaumes arides. Quoi d'éton-
nant à ce que la génération moderne, fatiguée des idoles vieillies du
passé, ait demandé à la nature qui nous entoure le secret de sa poésie

]. Los numéros que nous plaçons dans le texte, à la suite de la description de
chaque planche, correspondent avec ceux du catalogue que nous avons renvoyé à la fin.
 
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