L'ACADÉMIE ROYALE DE LONDRES. 85
aussi bien que nous-même : peut-être nous combattra-t-il sur quelque
point, mais nous sommes assuré de ne point différer de sentiment avec
lui au moins dans l'ensemble.
On ne saurait discuter l'importance, sinon la fréquence, des expositions
universelles. L'Humanité, impatiente de hâter la marche du progrès, ne
peut que gagner en instruction pratique et en idées générales aux com-
paraisons de tout genre qu'elles provoquent, aux problèmes qu'elles sou-
lèvent, aux résultats qu'elles entraînent. Ce sont d'immenses marchés où
le penseur, l'artiste et l'ouvrier viennent faire provision d'outils nouveaux
pour parfaire les travaux de l'esprit, de l'imagination et de la main. La
critique sent son jugement s'affermir sur ce théâtre où toutes les nations
viennent jouer leur rôle au naturel. Les écoles d'art peuvent à leur tour,
sans renier leurs aptitudes natives, bénéficier de l'observation raisonnée
des différents systèmes de composition, de dessin ou de coloris; elles s'y
mesurent aussi et peuvent apporter à leur pays une nouvelle part de
gloire.
Mais si les nations y gagnent dans les résultats généraux, il arrive
souvent que les artistes, y perdent, parce qu'ils ne peuvent, à de rares
exceptions près, se présenter qu'avec des morceaux de leur œuvre re-
cueillis çà et là. Je m'étonne que les artistes anglais, gens pratiques,
n'aient point encore songé, en vendant leurs œuvres, à s'en réserver la
jouissance pendant ces redoutables expositions internationales où l'on
compte les juges par dizaines de millions.
Les particuliers, en Angleterre, se sont prêtés aux envois avec autant
de mauvaise grâce que chez nous certains hauts personnages. Découragés
par l'exhibition des trésors d'art à Manchester, dans laquelle nombre de
tableaux importants furent endommagés par l'humidité et par les varia-
tions de la température ; fatigués par les nouveaux emprunte faits en
1862 à leurs galeries ; inquiétés par les hasards d'un voyage d'outre-
Manche, les grands amateurs ont refusé aux artistes avec un ensemble
qui fait plus d'honneur à leur ténacité qu'à leur patriotisme. C'est une
grande faute au point de vue de l'honneur national : car le jury anglais
ayant cru devoir, — pour ne pas avoir à présenter sir Edwin Landseer,
assure-t-on, —renoncer au concours pour les grandes médailles, l'Angle-
terre reste, aux yeux de la foule, battue par des nations qui, telles que
l'Italie, lui sont infiniment inférieures. C'est une calamité pour les
artistes, parce qu'en fin de compte le public de Paris, qui ne peut asseoir
son jugement que sur ce qu'il a sous les yeux, s'est montré sévère envers
des morceaux qui, nous le répétons, ne sont pas les meilleurs dans
aussi bien que nous-même : peut-être nous combattra-t-il sur quelque
point, mais nous sommes assuré de ne point différer de sentiment avec
lui au moins dans l'ensemble.
On ne saurait discuter l'importance, sinon la fréquence, des expositions
universelles. L'Humanité, impatiente de hâter la marche du progrès, ne
peut que gagner en instruction pratique et en idées générales aux com-
paraisons de tout genre qu'elles provoquent, aux problèmes qu'elles sou-
lèvent, aux résultats qu'elles entraînent. Ce sont d'immenses marchés où
le penseur, l'artiste et l'ouvrier viennent faire provision d'outils nouveaux
pour parfaire les travaux de l'esprit, de l'imagination et de la main. La
critique sent son jugement s'affermir sur ce théâtre où toutes les nations
viennent jouer leur rôle au naturel. Les écoles d'art peuvent à leur tour,
sans renier leurs aptitudes natives, bénéficier de l'observation raisonnée
des différents systèmes de composition, de dessin ou de coloris; elles s'y
mesurent aussi et peuvent apporter à leur pays une nouvelle part de
gloire.
Mais si les nations y gagnent dans les résultats généraux, il arrive
souvent que les artistes, y perdent, parce qu'ils ne peuvent, à de rares
exceptions près, se présenter qu'avec des morceaux de leur œuvre re-
cueillis çà et là. Je m'étonne que les artistes anglais, gens pratiques,
n'aient point encore songé, en vendant leurs œuvres, à s'en réserver la
jouissance pendant ces redoutables expositions internationales où l'on
compte les juges par dizaines de millions.
Les particuliers, en Angleterre, se sont prêtés aux envois avec autant
de mauvaise grâce que chez nous certains hauts personnages. Découragés
par l'exhibition des trésors d'art à Manchester, dans laquelle nombre de
tableaux importants furent endommagés par l'humidité et par les varia-
tions de la température ; fatigués par les nouveaux emprunte faits en
1862 à leurs galeries ; inquiétés par les hasards d'un voyage d'outre-
Manche, les grands amateurs ont refusé aux artistes avec un ensemble
qui fait plus d'honneur à leur ténacité qu'à leur patriotisme. C'est une
grande faute au point de vue de l'honneur national : car le jury anglais
ayant cru devoir, — pour ne pas avoir à présenter sir Edwin Landseer,
assure-t-on, —renoncer au concours pour les grandes médailles, l'Angle-
terre reste, aux yeux de la foule, battue par des nations qui, telles que
l'Italie, lui sont infiniment inférieures. C'est une calamité pour les
artistes, parce qu'en fin de compte le public de Paris, qui ne peut asseoir
son jugement que sur ce qu'il a sous les yeux, s'est montré sévère envers
des morceaux qui, nous le répétons, ne sont pas les meilleurs dans