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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

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Michel, André: Exposition des œuvres de M. Meissonier
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https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0018

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

réduits aux proportions de son panneau minuscule, mais non rapetissés;
tant le dessin est large et ressenti. — De pareilles œuvres n’ont à redou-
ter aucun voisinage aux Louvres de l’avenir. — Parmi les plus parfaites
de cette série, qui va de 1855 à 1860, nous pourrions décrire le Peintre
montrant ses dessins et Y Attente, la Lecture du manuscrit1 ou encore
le Gentilhomme Louis XIII lisant. — Mais à quoi bon refaire en prose
infidèle des pages que le peintre a écrites d’une écriture inimitable, du
bout des poils de son pinceau?

C’est dans ces monologues que M. Meissonier est arrivé à la perfec-
tion et qu’il nous fait goûter les plus exquises jouissances. Dès que la
scène s’agrandit et que le drame se complique, en même temps qu’on
admire toujours la science et la force de la composition, des détails
charmants de vérité et de finesse, l’œil éprouve un certain malaise, — et
le dirai-je? comme un agacement dont la cause ne tarde pas à lui être
révélée. — C’est tantôt les clous ou la boucle d’un soulier, l’égratignure
de la faïence d’une assiette, rendus avec la même gravité consciencieuse
que la figure humaine. C’est surtout dans les scènes en plein air, comme
cet adorable Tourne-hride ou les Joueurs de tonneau, de ton si frais et
de travail si précieux, un accent de lumière piqué sur le nez d’un per-
sonnage placé tout au fond du tableau sous un parapluie rouge, dont la
netteté, l’importance et la valeur sont absolument hors de toute propor-
tion, ou bien un clocher dont la silhouette lointaine devrait presque s’es-
tomper dans l’air ambiant et qui menace de tomber sur les personnages
du premier plan, tant le détail de son architecture est rendu avec préci-
sion et acharnement. De même dans les Joueurs de houles d'Antibes, on
se demande avec inquiétude comment le bonhomme qui lance la boule
est à la fois si petit, par rapport aux autres joueurs, qu’il paraît à peine
plus gros que le cochonnet et cependant si précis dans le détail de sa sil-
houette et de son costume. Ces observations, qu’on pourrait multiplier,
on trouverait à les faire même dans les intérieurs où le relief extraor-
dinaire d’une main, d’un doigt ou d’un pied fait craindre parfois qu’ils no
sortent de la toile et ne divorcent avec le corps auxquels ils sont attachés !

On arrive alors à se dire que M. Meissonier a peint surtout pour
satisfaire les exigences de son œil. Dans la poursuite insatiable du détail,
dans les notations minutieuses des moindres accidents d’une surface, des
cassures et des brillants d’une étoffe, des coins et des recoins d’un inté-
rieur, des dos de livres rangés au fond d’une salle sur les rayons d’une
bibliothèque, on reconnaît la qualité et l’autorité de cet œil extraordinaire

La Gazette publiera prochainement une eau-forte d’après ce tableau.
 
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