DOI issue:
Nr. 1
DOI article:Bonnaffé, Edmond: Sabba da Castiglione, [1]: notes sur la curiosité italienne a la renaissance
DOI Page / Citation link:https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0036
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Sforza, ou n’a-t-il modelé que le cheval seulement} sans son cavalier?
Reprenons un à un tous les textes contemporains, les seuls qui fassent
autorité.
1° Sabba da Castiglione : « Si occupo nella forma del cavallo di
Milano ». Le cheval de Milan} comme il dirait les chevaux de Venise • pas
un mot du cavalier, pas une allusion. Et ce n’est pas son habitude, car,
lorsqu'il parle des statues équestres, il ne manque pas de dire, pour
Donatello « il suo Gattamelata » et, pour Verocchio, « la statua equestre
di bronzo di Bartolomeo da Bergamo ».
2° Paul Jove : « Finxit etiam ex argillâ collosseum equum Ludovico
Sfortiæ, ut ab eo pariter æneus, superstante Francisco pâtre illustri impe-
ratore, funderetur ». C’est-à-dire que Léonard fit pour Ludovic Sforza
un cheval colossal de terre, afin de le fondre lui-même (plus tard) en
bronze et de le surmonter de son illustre père Francesco. Et Paul Jove
continuant, célèbre le cheval, son attitude, la science anatomique de l’ar-
tiste, mais ne parle pas du cavalier.
3° Lettre du duc de Ferrare (sept. 1501)1. Le duc Hercule voulait
faire placer sa propre statue équestre sur la place publique de Ferrare ;
mais l’artiste qui avait commencé à modeler le cheval étant mort, le duc
écrit à Giovanni Yalla, son agent à Milan : « Nous souvenant que là-bas,
à Milan, existe un modèle de cheval exécuté par un certain maître Léonard,
nous avons pensé que si nous nous servions de ce modèle, il serait bon
et convenable pour couler le cheval en question. C’est pourquoi nous
voulons que vous alliez trouver incontinent le Cardinal de Rouen (gouver-
neur de Milan pour le roi de France), et que vous priiez sa seigneurie, si
elle n’en a elle-même besoin, de nous faire donner ce modèle... en rap-
pelant que ledit modèle se délabre tous les jours, parce qu’on n’en
prend pas soin ».
S’il s’agissait d’une statue équestre, la requête du duc de Ferrare
serait au moins singulière. En effet, comment utiliser le cheval seul dont
il a besoin pour modèle, sans enlever et par conséquent sans détruire le
cavalier, puisque tout l’ouvrage est de terre? A quel titre, pour quel
motif, le duc de Ferrare ferait-il cette injure à la mémoire des Sforza?
Si, au contraire, il s’agit seulement d’un cheval sans cavalier, la demande
paraît toute naturelle, elle ne blesse aucun souvenir, aucune conve-
nance.
h° Réponse de Giovanni Valla au duc de Ferrare (sept. 1501). « Je
1. Lettre découverte et publiée par M. le marquis Campori. IVuovi documenta per
la vila di L. de Vinci., Modena, '1865.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Sforza, ou n’a-t-il modelé que le cheval seulement} sans son cavalier?
Reprenons un à un tous les textes contemporains, les seuls qui fassent
autorité.
1° Sabba da Castiglione : « Si occupo nella forma del cavallo di
Milano ». Le cheval de Milan} comme il dirait les chevaux de Venise • pas
un mot du cavalier, pas une allusion. Et ce n’est pas son habitude, car,
lorsqu'il parle des statues équestres, il ne manque pas de dire, pour
Donatello « il suo Gattamelata » et, pour Verocchio, « la statua equestre
di bronzo di Bartolomeo da Bergamo ».
2° Paul Jove : « Finxit etiam ex argillâ collosseum equum Ludovico
Sfortiæ, ut ab eo pariter æneus, superstante Francisco pâtre illustri impe-
ratore, funderetur ». C’est-à-dire que Léonard fit pour Ludovic Sforza
un cheval colossal de terre, afin de le fondre lui-même (plus tard) en
bronze et de le surmonter de son illustre père Francesco. Et Paul Jove
continuant, célèbre le cheval, son attitude, la science anatomique de l’ar-
tiste, mais ne parle pas du cavalier.
3° Lettre du duc de Ferrare (sept. 1501)1. Le duc Hercule voulait
faire placer sa propre statue équestre sur la place publique de Ferrare ;
mais l’artiste qui avait commencé à modeler le cheval étant mort, le duc
écrit à Giovanni Yalla, son agent à Milan : « Nous souvenant que là-bas,
à Milan, existe un modèle de cheval exécuté par un certain maître Léonard,
nous avons pensé que si nous nous servions de ce modèle, il serait bon
et convenable pour couler le cheval en question. C’est pourquoi nous
voulons que vous alliez trouver incontinent le Cardinal de Rouen (gouver-
neur de Milan pour le roi de France), et que vous priiez sa seigneurie, si
elle n’en a elle-même besoin, de nous faire donner ce modèle... en rap-
pelant que ledit modèle se délabre tous les jours, parce qu’on n’en
prend pas soin ».
S’il s’agissait d’une statue équestre, la requête du duc de Ferrare
serait au moins singulière. En effet, comment utiliser le cheval seul dont
il a besoin pour modèle, sans enlever et par conséquent sans détruire le
cavalier, puisque tout l’ouvrage est de terre? A quel titre, pour quel
motif, le duc de Ferrare ferait-il cette injure à la mémoire des Sforza?
Si, au contraire, il s’agit seulement d’un cheval sans cavalier, la demande
paraît toute naturelle, elle ne blesse aucun souvenir, aucune conve-
nance.
h° Réponse de Giovanni Valla au duc de Ferrare (sept. 1501). « Je
1. Lettre découverte et publiée par M. le marquis Campori. IVuovi documenta per
la vila di L. de Vinci., Modena, '1865.