LES VÉRITABLES ORIGINES DE LA RENAISSANCE. 31
sorte le monde moderne, était déjà écoulé, et l’Italie attendait encore
dans la nuit et dans le sommeil que l'aurore des temps nouveaux vînt
éclairer ses ruines infécondes et faire jaillir de son sol épuisé les
germes engourdis de la civilisation romaine.
Le fait doit être considéré comme établi d’une manière générale
et sauf les exceptions qui seront indiquées. Le véritable mouvement
de sincère retour à l’antiquité, inauguré intempestivement au
xme siècle par Nicolas dePise, était déjà effacé et oublié depuis plus de
cent ans au moment où s’ouvre, pour l’Italie, l’ère delà Renaissance.
L’Italie alors était à contre-cœur et avec résignation, je le veux bien,
mais était exclusivement ou presque exclusivement gothique, et
gothique dans le sens le plus défavorable, le plus étroit, le plus inin-
telligent du mot.
Abordons immédiatement le xve siècle. Si c’est uniquement l’ins-
piration de l’art antique qui a provoqué la grande révolution traversée
à ce moment par l’art moderne; si la période qualifiée habituellement
du nom de Renaissance n’a pu succéder au style du moyen âge et rem-
placer la période gothique que par suite d’un contact prolongé avec
les monuments de la civilisation grecque et romaine — ainsi que le
voudrait l’opinion courante — c’est en Italie incontestablement que le
mouvement d’émancipation aurait dû commencer d’une façon bien
évidente. Aucune région ne pouvait lutter alors avec l’Italie pour le
nombre et l’importance des souvenirs antiques. Étudions les faits et
voyons s’ils donnent raison à nos contradicteurs.
Avant les premières années du xve siècle, les partisans de la prio-
rité de l’Italie dans le mouvement ne veulent presque rien alléguer.
Ils me semblent n’avoir pas tiré suffisamment parti de certains symp-
tômes bien visibles à Venise, à Orvieto et à Florence même, dans les
travaux du Dôme 1. Mais ce n’est pas à nous à leur suggérer des argu-
ments ni à préparer contre nous d’apparentes objections. Nous aurons
plusieurs fois l’occasion de revenir sur ce sujet. Je tiens seulement
à indiquer en ce moment qu’il serait facile de trouver, en Italie,
quelques notables exceptions au principe absolu qui nie l’apparition
de la Renaissance — de la Renaissance avec tous ses éléments défi-
nitifs — avant l’entrée en scène des trois ou quatre grands acteurs
universellement reconnus, brevetés et acclamés par l’opinion pu-
blique.
1. Voy. le travail de Hans Semper intitulé : Die Donatello's Vorlaüfer, 1870,
in-8°. — Yoy. également Eug. Müntz, Les Précurseurs de la Renaissance, p. SI
et suivantes.
sorte le monde moderne, était déjà écoulé, et l’Italie attendait encore
dans la nuit et dans le sommeil que l'aurore des temps nouveaux vînt
éclairer ses ruines infécondes et faire jaillir de son sol épuisé les
germes engourdis de la civilisation romaine.
Le fait doit être considéré comme établi d’une manière générale
et sauf les exceptions qui seront indiquées. Le véritable mouvement
de sincère retour à l’antiquité, inauguré intempestivement au
xme siècle par Nicolas dePise, était déjà effacé et oublié depuis plus de
cent ans au moment où s’ouvre, pour l’Italie, l’ère delà Renaissance.
L’Italie alors était à contre-cœur et avec résignation, je le veux bien,
mais était exclusivement ou presque exclusivement gothique, et
gothique dans le sens le plus défavorable, le plus étroit, le plus inin-
telligent du mot.
Abordons immédiatement le xve siècle. Si c’est uniquement l’ins-
piration de l’art antique qui a provoqué la grande révolution traversée
à ce moment par l’art moderne; si la période qualifiée habituellement
du nom de Renaissance n’a pu succéder au style du moyen âge et rem-
placer la période gothique que par suite d’un contact prolongé avec
les monuments de la civilisation grecque et romaine — ainsi que le
voudrait l’opinion courante — c’est en Italie incontestablement que le
mouvement d’émancipation aurait dû commencer d’une façon bien
évidente. Aucune région ne pouvait lutter alors avec l’Italie pour le
nombre et l’importance des souvenirs antiques. Étudions les faits et
voyons s’ils donnent raison à nos contradicteurs.
Avant les premières années du xve siècle, les partisans de la prio-
rité de l’Italie dans le mouvement ne veulent presque rien alléguer.
Ils me semblent n’avoir pas tiré suffisamment parti de certains symp-
tômes bien visibles à Venise, à Orvieto et à Florence même, dans les
travaux du Dôme 1. Mais ce n’est pas à nous à leur suggérer des argu-
ments ni à préparer contre nous d’apparentes objections. Nous aurons
plusieurs fois l’occasion de revenir sur ce sujet. Je tiens seulement
à indiquer en ce moment qu’il serait facile de trouver, en Italie,
quelques notables exceptions au principe absolu qui nie l’apparition
de la Renaissance — de la Renaissance avec tous ses éléments défi-
nitifs — avant l’entrée en scène des trois ou quatre grands acteurs
universellement reconnus, brevetés et acclamés par l’opinion pu-
blique.
1. Voy. le travail de Hans Semper intitulé : Die Donatello's Vorlaüfer, 1870,
in-8°. — Yoy. également Eug. Müntz, Les Précurseurs de la Renaissance, p. SI
et suivantes.