LA
COLLECTION DE TABLEAUX
ET
D’OBJETS D’ART
DE FEU M. S. GOLDSCHMIDT
lNS quelques jours va être dispersée une
collection de tableaux modernes d’une
rare valeur : le marché parisien n’a
pas vu depuis longtemps une vente de
cette importance. L'Amérique, qui nous
enlève nos meilleures toiles sans bruit,
sournoisement, à grand renfort de dol-
lars , devra cette fois opérer à visage
découvert : on prévoit une lutte des
plus vives, la collection est vaste, elle
renferme quelques chefs-d’œuvre depuis
longtemps classés et, dirons-nous, surveillés par les amateurs des
deux mondes. Puisse notre Musée, si pauvre en œuvres nationales
modernes, entrer en lice bien armé de toutes pièces, sans quoi il nous
faudra une fois de plus saluer d’un regret le départ d’œuvres glo-
rieuses pour le nom français !
M. S. Goldschmidt fut un collectionneur indépendant. Dans le
milieu où se passa sa jeunesse, le goût des œuvres d’art était peu
répandu. Sans imiter ni consulter personne, guidé par sa sagacité
personnelle, par un instinct inné du beau, il acheta ce qui lui plut,
non ce qui plaisait alors. Sur beaucoup de points il devança le goût
actuel. On le traitait d’imprudent, de téméraire même, pour quel-
ques milliers de francs employés à des Delacroix qu’il achetait dans
l’atelier même du maître, très heureux de les vendre si cher; à
quelques Decamps, qu’on eût couverts d’or vingt ans plus tard. Ses
COLLECTION DE TABLEAUX
ET
D’OBJETS D’ART
DE FEU M. S. GOLDSCHMIDT
lNS quelques jours va être dispersée une
collection de tableaux modernes d’une
rare valeur : le marché parisien n’a
pas vu depuis longtemps une vente de
cette importance. L'Amérique, qui nous
enlève nos meilleures toiles sans bruit,
sournoisement, à grand renfort de dol-
lars , devra cette fois opérer à visage
découvert : on prévoit une lutte des
plus vives, la collection est vaste, elle
renferme quelques chefs-d’œuvre depuis
longtemps classés et, dirons-nous, surveillés par les amateurs des
deux mondes. Puisse notre Musée, si pauvre en œuvres nationales
modernes, entrer en lice bien armé de toutes pièces, sans quoi il nous
faudra une fois de plus saluer d’un regret le départ d’œuvres glo-
rieuses pour le nom français !
M. S. Goldschmidt fut un collectionneur indépendant. Dans le
milieu où se passa sa jeunesse, le goût des œuvres d’art était peu
répandu. Sans imiter ni consulter personne, guidé par sa sagacité
personnelle, par un instinct inné du beau, il acheta ce qui lui plut,
non ce qui plaisait alors. Sur beaucoup de points il devança le goût
actuel. On le traitait d’imprudent, de téméraire même, pour quel-
ques milliers de francs employés à des Delacroix qu’il achetait dans
l’atelier même du maître, très heureux de les vendre si cher; à
quelques Decamps, qu’on eût couverts d’or vingt ans plus tard. Ses