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GAZETTE UES BEAUX-ARTS.
plus d’éclat, Memling plus de douceur, aucun n’arrive à une réalisa-
tion plus complète, ne modèle avec plus de science. L’expression ne
le cède point en noblesse au dessin lui-même et l’harmonieux
ensemble évoque le souvenir du Francia.
Epris, comme toujours, du détail, Matsys ne se fait pas grâce d’un
fil dans les splendides tissus d’Orient qui drapent le grand prêtre
et servent de tenture au lieu consacré. Les monnaies d’argent et d’or
que l’officiant rejette à l’extrême confusion de Joachim, sont traitées
avec une égale précision.
Mais le sujet triomphe de cette minutie. — L’émotion contenue et
la couleur discrète sont comme une voix qui se modère. Le prêtre à
barbe blanche et flottante n’a point recours à un geste violent pour
repousser Joachim, non plus que ce dernier ne s’emporte. La loi,
dura lex. est subie et appliquée avec une égale résignation.
Plus intéressante peut-être est la scène où les parents de la Yierge
apportent au Temple une partie de leurs biens. Matsys y prodigue les
ressources de son pinceau. L’oblation se fait avec une dignité qui
contraste avec la scène comme l’a interprétée Durer.
Le peintre semble avoir voulu attacher une importance particu-
lière à cette partie de son œuvre. Non seulement c’est ici que, sur un
membre d’architecture qui n’est pas sans analogie avec le Puits de
Moïse, à Dijon, nous pouvons lire la signature : Quinte Metsys, suivie
de la date 1509, et des mots Screef dit, qui veulent dire « traça
ceci », mais, chose étrange, le document tenu par l’un des assistants,
débute par les premières lignes d’un acte de donation fait par Matsys
en faveur de ses enfants, sous la date du 15 mars 1508 h A-t-il voulu
rehausser la solennité des engagements qu’il venait de contracter et
s’est-il représenté peut-être lui-même, donnant lecture de l’acte qui
les consacre ? Ne serait-ce pas une manière comme une autre d’expli-
quer ici l’intervention d’un texte si complètement étranger au sujet de
l’œuvre, et à tout prendre fort inutile à son intelligence?
Le fond du tableau nous montre une tour gothique, qui n’est pas
celle de Notre-Dame d’Anvers, encore inachevée au moment où l’œuvre
voyait le jour, mais plus probablement une sorte de complément ima-
ginaire de Saint-Pierre de Louvain. Cette partie architecturale est
d’un travail des plus délicats.
Passé maitre dans la traduction des mouvements de l’âme, Matsys
1. Van Even, Histoire de l’École de peinture de Louvain, page 377, et Vlaamsche
School, 1863, p. 126.
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plus d’éclat, Memling plus de douceur, aucun n’arrive à une réalisa-
tion plus complète, ne modèle avec plus de science. L’expression ne
le cède point en noblesse au dessin lui-même et l’harmonieux
ensemble évoque le souvenir du Francia.
Epris, comme toujours, du détail, Matsys ne se fait pas grâce d’un
fil dans les splendides tissus d’Orient qui drapent le grand prêtre
et servent de tenture au lieu consacré. Les monnaies d’argent et d’or
que l’officiant rejette à l’extrême confusion de Joachim, sont traitées
avec une égale précision.
Mais le sujet triomphe de cette minutie. — L’émotion contenue et
la couleur discrète sont comme une voix qui se modère. Le prêtre à
barbe blanche et flottante n’a point recours à un geste violent pour
repousser Joachim, non plus que ce dernier ne s’emporte. La loi,
dura lex. est subie et appliquée avec une égale résignation.
Plus intéressante peut-être est la scène où les parents de la Yierge
apportent au Temple une partie de leurs biens. Matsys y prodigue les
ressources de son pinceau. L’oblation se fait avec une dignité qui
contraste avec la scène comme l’a interprétée Durer.
Le peintre semble avoir voulu attacher une importance particu-
lière à cette partie de son œuvre. Non seulement c’est ici que, sur un
membre d’architecture qui n’est pas sans analogie avec le Puits de
Moïse, à Dijon, nous pouvons lire la signature : Quinte Metsys, suivie
de la date 1509, et des mots Screef dit, qui veulent dire « traça
ceci », mais, chose étrange, le document tenu par l’un des assistants,
débute par les premières lignes d’un acte de donation fait par Matsys
en faveur de ses enfants, sous la date du 15 mars 1508 h A-t-il voulu
rehausser la solennité des engagements qu’il venait de contracter et
s’est-il représenté peut-être lui-même, donnant lecture de l’acte qui
les consacre ? Ne serait-ce pas une manière comme une autre d’expli-
quer ici l’intervention d’un texte si complètement étranger au sujet de
l’œuvre, et à tout prendre fort inutile à son intelligence?
Le fond du tableau nous montre une tour gothique, qui n’est pas
celle de Notre-Dame d’Anvers, encore inachevée au moment où l’œuvre
voyait le jour, mais plus probablement une sorte de complément ima-
ginaire de Saint-Pierre de Louvain. Cette partie architecturale est
d’un travail des plus délicats.
Passé maitre dans la traduction des mouvements de l’âme, Matsys
1. Van Even, Histoire de l’École de peinture de Louvain, page 377, et Vlaamsche
School, 1863, p. 126.