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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 37.1888

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Nr. 4
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Mantz, Paul: La caricature moderne
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https://doi.org/10.11588/diglit.24191#0337

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

figurer dans sa grande mascarade, il ne les invente pas, il se borne
à les constater avec un peu d’exagération et d’outrance. Il s’exalte,
il s’amuse, mais il demeure fidèle à la loi du caractère et il reste
essentiellement portraitiste. Dans la série des Représentants représen-
tés, il 7 a des figures qui font sourire : elles sont conçues et inter-
prétées dans le sens caricatural ; mais bien qu’ils soient outrepassés
dans leur ressemblance et transfigurés par l’ironie, les modèles —
nous en avons connu plusieurs — fournissaient la donnée initiale, et
leur laideur particulière a été comme le tremplin sur lequel a
rebondi la fantaisie de l’artiste. Dans ses lithographies hâtives et pas-
sionnées, Daumier n’a pas ignoré les emportements du crayon; mais
la vérité essentielle n’a jamais cessé de régler sa verve, et il est tou-
jours resté humain. C’est bien à propos de lui qu’on pourrait repren-
dre l’ancien mot : la caricature est l’idéal à l’envers.

C’est surtout comme peintre du mouvement que Daumier mérite
qu’on l’étudie : beaucoup de ses croquis sont évidemment improvisés,
mais grâce à une initiation préalable et à une longue pratique, il
savait si bien la nature qu’il n’avait plus besoin de lui demander de
conseils. Si sommaire que soit le trait, si résumé que soit le contour,
sa mimique est toujours juste et expressive, sa gesticulation ne se
trompe pas. Pour la vérité de l’attitude et la signification de la
silhouette, Daumier peut, malgré ses larges abrévations, s’apparen-
ter à la famille des grands peintres de la pantomime, Jan Steen par
exemple et même Brauwer.

Ni Daumier, ni Gavarni n’ont été remplacés. La génération qui
leur a succédé n’a pu, malgré tout son esprit, que substituer de la
menue monnaie aux largesses princières que les deux maîtres nous
avaient faites. Après eux, le niveau baisse : le dessin perd sa largeur
et sa grâce séductrice. La fin du siècle pourra cependant citer plus
d’un nom qu’il serait injuste d’oublier. Chain a eu son rayon de gloire.
Il débute en 1839 par des albums publiés chez Aubert, et qui, dans
leur écriture un peu maigre, accommodent à la française l’idéal exo-
tique de Tôpfer. Dans cette manière primitive, le fantaisiste est sec
et sans couleur : il s’agrandit plus tard en abordant la lithographie
où il trouva des linéaments plus gras, un clair-obscur plus savou-
reux. Charn est du reste devenu bien vite l’historien de l’actualité,
une sorte de reporter au crayon. C’est là qu’il a brillé. Les faits
comiques du mois et de la semaine lui ont inspiré, dans le Charivari
et ailleurs, des séries de vignettes dont le style n’est pas grandiose,
mais dont l’esprit est d’un parisianisme très éveillé. On s’est amusé
 
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