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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 37.1888

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Nr. 4
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Chennevières, Henry de: Les suédois en France
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https://doi.org/10.11588/diglit.24191#0363

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LES SUÉDOIS EN FRANGE.

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les plus sûres de faire fleurir et de retenir en Suède toutes les sortes
d’arts. Entre temps, il s’applique, avec sa coquetterie d’amateur éclairé,
à mettre le jeune prince au fait des differentes Écoles de peinture :
« Tout n’est pas donné à tous : l’École romaine a la prééminence pour
la correction du dessin qui est la partie la plus noble ; l’École flamande
l’emporte pour le coloris, et l’École française excelle dans l’ordon-
nance. Mais, comme il n’est pas de règle si générale qui ne souffre son
exception, les Français Lesueur et Lemoyne ont aussi bien dessiné que
jamais ait pu faire peintre né et élevé à Rome. Chardin, leur compa-
triote, imite encore aujourd’hui la nature aussi exactement qu’ait
jamais fait Teniers ou Gérard Dow. Ne vous étonnez pas, Monseigneur,
si je m’arrête à vous donner quelque idée de la peinture. C’est un art
auquel je me suis attaché. J’ai toujours mis mon plus grand plaisir
à posséder un grand nombre de tableaux curieux. Je suis bien charmé
qu’ils aient changé de demeure et qu’ils soient aujourd’hui dans une
place aussi glorieuse et aussi durable que celle qu’ils occupent à
Drottningliolm. J’espère que quand je ne serai plus, ils vous rappel-
leront, mon cher Prince, le souvenir d’un homme qui vous a donné
toute sa tendresse. »

Gustave III répondit à cette éducation et fut le Louis XIV de la
Suède. Non content d’encourager la tendance française des peintres
de Stockholm, il fît mieux et attira près de lui plusieurs de nos natio-
naux, Desprès Masrelier, Guilbert et d’autres, comme pour infuser
de plus près à ses régnicoles notre vivacité d’humeur et de touche.
Il aurait paru difficile au comte de Tessin de rêver davantage.

Ainsi, l’École suédoise fut au ton de Paris pendant tout le siècle.
Avec un peu de malice on pourrait peut-être reprocher à Tessin de
n’ètre pas resté dans le vrai du caractère national en forçant les
esprits calmes de son pays à une éducation française par trop exté-
rieure et spirituelle, mais si l’on prend garde au nombre d’élèves
étrangers inscrits à l’Académie du Louvre, et ce nombre était d’un
dixième ! on aurait mauvaise grâce à ne pas lui passer sa belle ardeur
française si bien mise en pratique, même au détriment de l’art du
Nord. 11 y a, en effet, chez les natures Scandinaves, un besoin du style
reposé, fort inconnu de l’idéal du Paris d’alors, et les deux seuls vrais
artistes de la Suède et du Danemarck, Sergell et Thorvaldsen, durent
se grandir à Rome pour devenir eux-mêmes.

HENRY DE CHENNEVIERES.
 
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