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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 37.1888

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Nr. 5
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Fourcaud, Louis de: François Rude, 1
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FRANÇOIS RUDE.

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furieuse marche en avant, ces hordes levées contre nous !... Ses poings
se crispent, son être entier se roidit en ces pensées héroïques; puis,
tranquillement, ayant comprimé ses juvéniles colères, il bâtie fer sur
l’enclume... Après tout, la vie s’offre à lui toute droite : il sera soldat
à son heure et le temps qu’il faudra, mais sa destinée est d’être poêlier-
serrurier, ni plus ni moins que son père. Si quelque vocation supé-
rieure sommeille en lui, nul ne le sait; lui-même l’ignore. Et voici
qu’il atteint sa seizième année en plein labeur.

IV.

L’adolescent, depuis plusieurs jours n’a point paru à l’atelier. On
l’a rencontré deux ou trois fois, l’après-midi, marchant à grand’peine,
appuyé sur un bâton, le teint pâli, les traits tirés, cherchant un
endroit où se reposer à l’ombre et y restant des heures, la jambe
allongée. Que lui est-il donc survenu?— Sachez que, l’autre semaine,
un fer rouge qu’il martelait lui a quasiment écrasé le pied et, dans
l’impossibilité où il est de reprendre l’ouvrage, l’honnête garçon se
distrait comme il peut. Aujourd’hui, en traversant la place d’Armes,
il a vu la foule s’engouffrer dans le palais des Etats. Par curiosité, il
a suivi le tourbillon et le hasard le fait assister à la distribution des
prix de l’Académie fondée par Devosge. Deux ou trois harangues
sont prononcés où l’on vante les bienfaits de l’Ecole de dessin, où l’on
prouve combien il importe aux ouvriers mêmes de savoir dessiner.
Au fond de la salle, les œuvres des lauréats, sculpteurs, dessinateurs
et peintres, sont disposées. Les noms des artistes qui ont fait le plus
d’honneur au restaurateur de l’enseignement des arts, à Dijon, se
lisent sur des cartouches : Bénigne Gagnereaux, Naigeon, Pierre
Prud’hon, Ramey... L’auditoire se compose en grande partie de gens
du commun. « Montrez-moi ce M. Devosge dont on parle tant, »
demande François Rude. On lui montre un homme de taille moyenne,
vêtu de noir, en habits à la vieille mode, les yeux clairs, les lèvres
gaies. C’est lui, ce digne artiste qui a fondé l’école au profit des
humbles et sans autres deniers que son patrimoine et qui la soutient,
moyennant une indemnité presque dérisoire, consacrant toutes ses
heures à ceux qui veulent s’instruire, leur fournissant le papier, les
crayons, les modèles, payant jusqu’à la lampe des soirs d’hiver *. Un

1. Devosge n’a jamais eu qu’un traitement de 2,400 francs, plus 400 francs de
menus frais.

xxxvii. — 2e PÉRIODE.

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