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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 37.1888

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Nr. 5
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Fourcaud, Louis de: François Rude, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24191#0405

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FRANÇOIS RUDE.

371

Rien de moins compliqué que la méthode du professeur. Aux
commençants, il fait copier des modèles graphiques, dessins d’orne-
ment et dessins de figure, exécutés par lui-même et suffisamment
gradués pour les initier au principe des formes et les préparer à
travailler d’après la bosse. On dessine, en second lieu, d’après le
plâtre jusqu’à ce qu’on soit en état d’aborder la nature. Le couron-
nement de cette éducation, c’est le modelage, c’est-à-dire le rendu
du relief par le relief. Un tel programme d’enseignement prête,
assurément, à l’éloge. Avec quelle énergie Rude s’attache à le
suivre! Il en franchit tous les degrés sans être jamais content de lui,
s’encourageant à peine de ses progrès, s’acharnant à mieux faire,
peu expansif, tout concentré dans ses réflexions et ses efforts. On se
rappelle la fameuse tirade de Chardin sur les désespoirs des jeunes
gens aux prises avec les longues difficultés de l’art : « Tous n’avez
pas été témoin des larmes que ce Satyre, ce Gladiateur, cette Vénus
de Médicis, cet Antée, ont fait couler... Après avoir séché des journées
et passé des nuits à la lampe devant la nature immobile et inanimée,
on nous présente la nature vivante et, tout à coup le travail de toutes
les années précédentes semble se réduire à rien... On ne fut pas plus
emprunté à la première fois qu’on prit le crayon... Le talent ne se
décide pas en un moment... » C’est là, proprement, la misère de
François Rude, à ceci près qu’il a deux heures par jour, volées à son
métier, pour se vouer à son art, et tout le reste du temps pour en
méditer et en souffrir. A mesure qu’il avance, il est certain que le
rêve, comprimé d’abord, se formule mieux dans sa pensée : être un
artiste. Et pourquoi ne le serait-il pas? Il a obtenu la médaille d’or,
prix du dessin d’ornement, le second prix de dessin d’après nature,
l’accessit de modelage d’après le modèle vivant, ce qui n’est rien;
mais il entrevoit si bien ce qui lui manque, — ce qu’il serait en lui
d’acquérir! — Seulement sa probité le tient : il a donné sa parole
à son père. A plusieurs reprises, Devosge a tenté d’arracher
à l’ouvrier inflexible un peu plus de liberté pour son fils. Inutile
prière! « Nos affaires vont mal, riposte le vieillard, invariablement,
j’ai besoin de François pour m’aider et je ne veux pas qu’il perde
son métier et qu’il apprenne à mourir de faim. Est-ce qu’un artiste
soutiendrait la famille, si je venais à disparaître? Je sais ce que je
fais, parbleu ! Je le sais très bien... »

Mais pendant qu’il dessine, pendant qu’il modèle, le jeune homme
se pose des questions. Des plâtres sont devant lui, des dieux, des héros,
des guerriers, des nymphes... A quoi répondent ces figures? Hélas!
 
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