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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 37.1888

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Nr. 5
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Renan, Ary: Torcello, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24191#0446

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412

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Ladite Amphitrite tient elle-même dans sa main un gros poisson, de
la bouche duquel s’échappe un buste d’homme plein de vie ; enfin les
flots sont remplis de poissons qui restituent des membres coupés.

Du même côté, entre ce tableau et l’adoration du Livre, est un
personnage que nous ne sommes pas sûr de bien expliquer. C’est un
ange qui marche à grands pas en tenant une sorte de rouleau qu’on
pourrait prendre pour une corne d’abondance à cause de sa rigidité,
sur lequel sont peints des ornements en forme d’étoiles. Nous nous
contenterons d’émettre l’hypothèse d’un rapprochement avec les ver-
sets suivants de l’Apocalypse : Etstellæ de cœlo ceciderunt super terram ;
Et cœlum recessit sicut liber involutus L

Mais revenons sur les deux scènes de l’appel des morts dont nous
parlions à l’instant; elles soulèvent une question intéressante, et
M. Ernest Renan veut bien nous communiquer à ce sujet la note
suivante :

« A droite, la Terre rend ses morts. Parmi ces morts, il y a d’abord
les déterrés qui tendent leurs mains vers le Christ. Leur situation ne
présente aucun embarras, car la Terre, bien que prompte à dévorer
les corps, est censée cependant en garder le bon creux, comme ces
empreintes vides des cendres de Pompeï d’ou l’on a pu, en y coulant
du plâtre, obtenir l’image du mort. Beaucoup plus grave est le sort
de ceux qui ont été dévorés par des bêtes. Une fois que la chair
dévorée par un animal a été digérée, le Créateur lui-même, malgré
sa toute-puissance, doit avoir fort à faire pour en retrouver les
débris. Les premiers siècles chrétiens, héritiers des idées juives sur
la résurrection des corps, éprouvaient devant de pareils cas une
véritable terreur. M. Leblant a épuisé la question dans de savants
mémoires lus à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Il a
montré le trouble que la disparition, ou même simplement la division
du cadavre inspiraient aux premiers croyants et le soin qu’on remar-
que, dans les premiers récits des martyres, d’éviter que le corps du
saint soit brûlé. Les Pères de l’Eglise, surtout saint Augustin, se
donnent une peine extrême pour calmer sur ce point l’imagination
des fidèles. Sainte Monique, partageait les idées spiritualistes de son
fils, puisqu’elle lui disait à Ostie, comme il la supposait attristée
par la pensée de ne pas être inhumée dans la terre d’Afrique : « Eh
quoi, la distance est-elle plus longue de la terre au ciel à Ostie qu’en 1

1. Apoc., vi, 13, 14.
 
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