Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 4.1890)

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

autres peuples ne sont dans les beaux-arts que des barbares et des
enfants, malgré leur antiquité et malgré tout ce que la nature a
fait pour eux. » Voltaire jouait de malheur, car c’est précisément
au xvne et au xvme siècle que se place chez les Japonais la plus
grande floraison des « arts de la main ».

Notre fin de siècle aura été plus clémente et plus juste à l’égard
du Japon; elle est en train de lui décerner les honneurs d’une véri-
table apothéose. Un de nos écrivains les plus choyés lui consacre
plusieurs volumes de voyages; il mêle à un respect religieux pour
les temples et les idoles des attentions plus profanes à l'égard des

gentilles mousmés; il raconte avec émotion la mort des quarante-sept
Samouraïs qui se tuèrent après avoir vengé leur prince assassiné, et
il nous apprend, en cueillant pieusement un chrysanthème sur leur
tombe, qu’un gentilhomme japonais ne s’ouvre pas le ventre à la
légère, comme voudrait l’insinuer Montesquieu. Ses livres sont sur
toutes les tables, à côté de bibelots et d’ivoires venus de Kioto ou
d’Yédo. On a mis le Japon en coupe réglée; on a exporté tout ce qui
pouvait s’acheter d’albums, de bronzes, de poteries; on en remplit
les magasins, on en garnit les cheminées et les étagères. Peut-être y
a-t-il dans cette réhabilitation quelque peu d’engouement et de mode
passagère; mais le mouvement est au fond sincère et louable. O11
s’aperçoit aujourd’hui que les Japonais ont créé des formules d’art
absolument inédites et exquises, combiné le goût le plus sûr avec
l’imagination la plus fantaisiste, réalisé sous forme tangible des
rêves de poètes. Notre curiosité, avide de sensations neuves, se

Fig. I.

(Annali delV institulo, 1876, pl. DE.)