Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 4.1890)

GRÈGE ET JAPON

Les Japonais modernes, qui
viennent en France apprendre
notre langue et s’assimilent si
rapidement les mœurs pari-
siennes, lisent-ils nos auteurs
du xvme siècle? J’espère que
non, car leur respect pour nos
< connaissances historiques en

serait singulièrement dimi-
nué. Ils se scandaliseraient
fort en apprenant de Montesquieu que
leurs compatriotes sont des gens opiniâ-
tres, capricieux, déterminés, bizarres,
décourageant la rigueur des lois par
l’atrocité de leurs mœurs, et prêts à
s’ouvrir le ventre « pour la moindre
fantaisie » (Esprit des lois, VI, 13). S’ils passaient à Voltaire, ils se
rasséréneraient un peu : « Je ne sais pourquoi, dit l’auteur de
l'Essai sur les mœurs (chap. 142), on a appelé les Japonais nos anti-
podes en morale... Ils ne different de nous, en morale, que sur leur
précepte d’épargner les bêtes. » Mais la suite est moins heureuse;
on y trouve cette opinion singulière que les arts de l’esprit et de la
main sont en complète décadence dans l’extrême Orient. Point de
salut hors des pays ou Bramante et Michel-Ange ont bâti, où Raphaël
a peint, où Newton a calculé, où Corneille et Racine ont écrit. « Les

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