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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 4.1890

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Nr. 2
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Pottier, Edmond: Grèce et Japon
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https://doi.org/10.11588/diglit.24448#0129

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

différente, et dit à la servante que si Apelles revenait en son
absence, on lui montrât sa réponse. Nouvelle visite d’Apelles et
nouvelle preuve de son adresse : il réussit à insérer au centre des
deux lignes un troisième trait. Cette fois, Protogène s’avoua vaincu
et garda précieusement le tableau comme un chef-d’œuvre. Ce récit
de Pline aurait fait la joie d’Outamaro ou d’Hokousaï s’ils l’avaient
connu. Ils ont inventé des amusettes analogues, par exemple de
composer un album avec des personnages tracés tout entiers d’un
seul coup de pinceau, sans que la pointe quitte le papier une seule
fois ni repasse deux fois sur le même contour.

La technique du dessin a donc de frappantes ressemblances en
Grèce et au Japon : la perfection réside dans la pureté absolue du
trait, l’outillage est identique, le maniement des instruments s’opère
d’après les mêmes règles. On ne s’étonnera pas dès lors que les
résultats soient fort semblables. Détachez d’un lécythe blanc attique
une tête et un bras de pleureuse; prenez un détail analogue dans une
figure de dame Nipponne à sa toilette et rapprochez les deux calques
(fig. 5 et 6) ; où sera l’œuvre japonaise, où sera l’œuvre grecque?
Abstraction faite des deux visages, on pourrait aisément s’y tromper :
le contour délicat du bras s’enlève en traits rougeâtres sur un fond
blanc avec les mêmes accents de grâce et de ferme rondeur. Prenez
encore dans cette même catégorie de vases grecs un cavalier paradant
sur son coursier de guerre et mettez en regard un gentilhomme
japonais sur son cheval de promenade (fig. 7 et 8). Supprimez par la
pensée les différences de costumes et de types : les deux images
supporteront la comparaison la plus attentive. Les animaux sont
rendus avec la même sobriété de moyens; le pinceau s’arrondit et
s’étale dans le dessin de la croupe et du ventre, dans la ligne
sinueuse du col ; il marque en quelques touches rapides et légères les
plis du poitrail et les crins flottants de la queue ; le mouvement des
jambes est saisi avec la même précision ; le corps du cavalier repose à
l’aise en selle, souple et solide. Ces deux écuyers peuvent marcher de
pair.

Le dessin japonais, comme celui des Grecs, use de conventions.
L’habitude de croquer rapidement des silhouettes humaines prédis-
pose la main à reproduire de préférence certaines attitudes qui
paraissent plus faciles à rendre. La loi du moindre effort agit en art
comme dans la formation du langage. On remarque chez les enfants
qui s’essayent à crayonner une tendance particulière à copier leur
modèle de profil, et surtout du profil droit. Les Grecs ont eu long-
 
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