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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 4.1890

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Nr. 5
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Fourcaud, Louis de: François Rude, 10
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https://doi.org/10.11588/diglit.24448#0412

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FRANÇOIS RUDE.

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sent pas la négation pour nous si flagrante, et ceux-mêmes, autour de
lui, qui en peuvent avoir la notion ne s’en effarouchent point. Nous
ne sommes que trop fixés sur les préjugés sociaux où ces confusions
ont leur source.

Ce fut, parmi les républicains, une vive émotion, le 5 mai 1845,
quand la nouvelle se répandit que Godefroy Cavaignac était mort.
En peu d’années, il avait su prendre, dans le parti démocratique,
une situation dirigeante, que son talent de publiciste, son énergie,
son activité, sa droiture et sa bonne grâce agrandissaient toujours.
Son éducation politique s’était faite à Bruxelles, où son père,
ancien conventionnel, compta au nombre des exilés de 1815; mais,
instruit de la Révolution par les révolutionnaires, le jeune homme
avait accepté leur idéal en répudiant leur goût (l’éloquence clas-
sique et leur pompeux philosophisme. Au milieu des indécisions
générales, il sut tout de suite ce qu’il voulait et où il allait; il
marcha vers son but par tous les chemins qui s’offrirent, écrivant,
parlant, conspirant, ne redoutant ni les procès, qui font éclater les
idées, loin de les réduire, ni la prison, dont on ne manque pas de
sortir plus connu et mieux trempé. Un de ses écrits s’intitule :
« Plan pour mettre la France dans une voie progressive au lende-
main d'une révolution victorieuse. » On y reconnaît un esprit
vigoureux, précis et logique. Il ne s’abusait pas, d’ailleurs, sur
grand’chose, ayant coutume de regarder la vie de haut. Qui ne
se rappelle cette phrase, si souvent citée, de ses Souvenirs de
Bruxelles : « Il y a deux sortes de révolutionnaires : ceux qui pro-
duisent les révolutions et ceux qu’elles produisent. Les premiers
sont sacrifiés par elles et les autres avilis. » Mais il ne devait être,
pour sa part, ni avili ni sacrifié. A quarante-cinq ans, la mort le
devait enlever, un triste soir, à sa place de combat, après une
maladie longue et cruelle. Sur le lit funèbre où il reposait, entouré
de ses compagnons en larmes, le peintre Jeanron et Etienne Arago
moulèrent ses traits amaigris. La pensée d’un tombeau à lui ériger
naissait d’elle-mème. Une souscription politique fut ouverte par un
comité dont les Scheffer et Drôlling faisaient partie. Malheureuse-
ment, l’argent n’abonda guère. En 1846, le comité, désespérant du
résultat financier, se demanda chez quel sculpteur il rencontrerait
le désintéressement nécessaire à l’entreprise. David d’Angers par-
courait le monde, mais on avait Rude sous la main. Rude consentirait
peut-être à sculpter le monument. Etienne Arago reçut la mission de
l’aller pressentir.
 
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