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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 6.1891

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Nr. 1
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Rod, Édouard: Les salons de 1891 au Champ-de-Mars et aux Champs-Élysées, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24450#0037

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LES SALONS DE 1891.

25

M. Jarraud est, je crois, un nouveau venu. Les cinq petites toiles
qu’il a données, qui ne sont point de celles qui tirent l’oeil, méritent
cependant une attention particulière. Avec leurs nuances finement
arrangées, leurs demi-teintes, la douceur caressante de leurs tons,
leurs gammes douces de blanc sur blanc avec effets de rose pâle ou
de jaune pâle, elles révèlent un talent délicat, un peu timide peut-être,
auquel une juste conscience de soi-même ne tardera certainement
pas à donner plus de hardiesse et plus de force. M. Jarraud ne fuit
pas les difficultés : il les cherche plutôt, et il les cherche avec tant de
bonne foi et de modestie qu’on s’aperçoit à peine qu’il les a vaincues.
Aussi est-il de ceux qu’on ne remarque pas tout de suite, mais qu’on
n’oublie plus une fois qu’on les a remarqués.

On me permettra de réunir ici trois peintres suisses, qui n’ont
entre eux d’autre lien que leur nationalité :

L’éloge de M. Giron n’est plus à faire, et quoi qu’il soit encore
jeune, il y a longtemps déjà que ses brillantes qualités ont solidement
établi sa réputation. Coloriste jusqu’aux moelles, il réussit à com-
biner l’éclat, l’agrément et la délicatesse des couleurs, ce par quoi il
diffère de M. Carolus Duran, qui s’en tient à l’éclat, et dont l’exposition
de cette année, avec ses roses aigus et ses lilas aveuglants, vous
force à recourir aux lunettes à verres brûlés. Des deux portraits que
M. Giron nous donne, le plus important ne me paraît pas être de ses
meilleures oeuvres: c’est un arrangement en différents gris, ingénieux,
brillant, habile, mais qui manque de charme et de sympathie. Au
contraire son portrait en buste de Madame Georges J... est une de ses
plus gracieuses compositions. Sur un fond chamois se détache une
élégante figure au teint mat, aux yeux noirs veloutés, vêtue de noir
et tenant sur sa poitrine, de sa main gauche gantée d’une couleur
qui rappelle le fond, une rose thé, qui rompt finement l’unité du ton
général. C’est tout ce qu’il y a de plus délicat et de plus « artiste »,
avec un rien de recherche et de maniérisme bien actuels : on pense
à de sourdes musiques savantes où un petit nombre d’instruments de
choix sont harmoniés avec une surprenante maestria.

M1,e Breslau ne possède peut-être pas une science des couleurs
égale à celle de M. Giron : ses couleurs se marient cependant avec
beaucoup de charme, surtout dans ses pastels qui rappellent un peu
certains portraits anglais, admirés à la Grosvenor Gallery. Sa Petite fille
en rose, sa Petite fille en vert et sa Petite fille anglaise, sont trois pages
qui suffisent à lui assigner une place en tête des peintres d’enfants.

VI. — 3e PÉRIODE. 4
 
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