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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 6.1891

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Nr. 2
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Fourcaud, Louis de: L' art gothique, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24450#0109

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L’ART GOTHIQUE.

91

I

L’ARCHITECTURE. - LE PRINCIPE.

La France a été, du xe au xve siècle, l’un des plus extraordi-
naires foyers d’idées, l’un des centres de création les plus magni-
fiques que mentionne l’histoire humaine. On ne craint pas d’avancer
qu’elle a mis en circulation, lentement, progressivement, dans cette
période, tous les'grands principes qui ont resplendi sur le monde en
dominant ses propres destinées. Au plus obscur de nos origines
nationales, après le choc des invasions du nord, la Gaule s’est trouvée
détachée du cercle antique comme un vaisseau dont on a rompu les
amarres. Ces peuples jeunes, violemment rassemblés, jetés plutôt les
uns sur les autres, qui occupent le sol gaulois, ennemis d’hier, alliés
d’aujourd’hui, n’ayant pour s’unir entre eux et pour se relier à la
tradition civilisée que la foi chrétienne, neuve en leur cœur, ont dû,
tout de suite et sur bien des points, s’inspirer d’eux seuls. On s’ex-
plique par là qu’ils soient parvenus de bonne heure à cet état d’esprit
naïf et robuste, où l’on conçoit tout en vertu de données personnelles,
en dehors des conventions ignorées et selon ses besoins. La paix
refleurit, les cités se reforment, des châteaux couronnent les hauteurs;
des abbayes s’établissent dans les plaines; des bourgs se tapissent à
l’ombre des forteresses. Au milieu de toute agglomération, l’église
se dresse comme un étendard et s’ouvre comme un refuge. Construite
avec plus ou moins de grandeur, ornée avec plus ou moins de richesse,
elle affirme partout une sociabilité nouvelle, dont on est fier. C’est,
formellement, une nation qui sort de ses limbes. Encore un peu de
temps, nous verrons le sentiment de la liberté s’engendrer. Le Gallo-
Frank, en effet, ne se sent pas plus tôt fort qu’il veut être libre : il
réclame, il obtient ou il conquiert son indépendance, en la scellant,
s’il le faut, de son sang. En lui, deux caractères s’accointent, harmo-
nisés par un sens tout latin de logique et d’ordre, jamais identifiés
ni brisés : la mâle simplicité du Germain et la fantaisie du Celte. De
ces deux caractères, ainsi tempérés, mais irréductibles, se façonne
l'esprit français. Ils se donnent sans cesse la réplique dans nos
mœurs et dans nos actes, dans le déroulement de nos chansons de
geste comme dans la prodigieuse invention de nos cathédrales. Les
 
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