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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
étroit des anciennes conventions archaïques et introduit dans l’art
plus de liberté. Il y a plus. Les fouilles d’Athènes ont fait surgir des
questions imprévues, qui semblent encore nous ramener vers Argos.
On a constaté, non sans surprise, que peu de temps avant les guerres
médiques, l’école attique réagit contre le maniérisme où l’avait
entraînée l’exemple des maîtres ioniens de Chios, et qu’elle subit
l’influence d’un style plus sévère, émanée sans doute du Pélopo-
nèse. Or, c’est le moment où l’école d’Argos 1 tient le pi’emier rang,
parmi les écoles de la Grèce continentale, et où l’atelier d’Agélaïdas,
le maître qui formera Myron, Polyclète et Phidias, est en pleine
activité. Ilyadonc quelque intérêt à résumer les recherches récentes
qui peuvent jeter quelque lumière sur l’histoire d’un artiste que les
textes anciens nous désignent comme le chef incontesté de l’école
argienne.
I.
On sait que le caractère le plus saillant des écoles péloponésiennes
est une prédilection marquée pour le travail du bronze. Au vie siècle,
Argos, Sicyone et Egine sont les trois grands centres où s’exécutent,
dans les ateliers des fondeurs, les groupes et les statues de bronze,
ex-votos, images d’athlètes vainqueurs, qui prennent place sur les
terrasses de Delphes ou sous les platanes de l’Altis, à Olympie. Dans
la pi’atique sévère des arts du métal, les sculpteurs du Péloponèse
contractent de bonne heure, avec une rare habileté technique, des
habitudes de précision qui donnent à leurs œuvres un remarquable
accent de sévérité. .Un des maîtres de l’archéologie classique,
M. Brunn, a depuis longtemps mis en relief les caractères essentiels
du style péloponésien archaïque : un goût décidé pour les propor-
tions robustes, une construction solide, presque architecturale, et
surtout une conception raisonnée, mathématique, pour ainsi dire, des
formes du corps 3. On peut déjà prévoir que l’effort des sculpteurs
doriens se tournera vers l'étude des proportions, et qu’il appartiendra
à un maître d’Argos, à Polyclète, de formuler les règles d’un canon
t. Voir Botho Graef, Mittheilungen des arch. Inst.; Alhen Abtheil. XV, t890,
p. 1-39.
2. Brunn, Arch. Zeitung, 1876, p. 20 et suiv. Mittheil. Athen, VII, 1882, p. 112
et suivantes.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
étroit des anciennes conventions archaïques et introduit dans l’art
plus de liberté. Il y a plus. Les fouilles d’Athènes ont fait surgir des
questions imprévues, qui semblent encore nous ramener vers Argos.
On a constaté, non sans surprise, que peu de temps avant les guerres
médiques, l’école attique réagit contre le maniérisme où l’avait
entraînée l’exemple des maîtres ioniens de Chios, et qu’elle subit
l’influence d’un style plus sévère, émanée sans doute du Pélopo-
nèse. Or, c’est le moment où l’école d’Argos 1 tient le pi’emier rang,
parmi les écoles de la Grèce continentale, et où l’atelier d’Agélaïdas,
le maître qui formera Myron, Polyclète et Phidias, est en pleine
activité. Ilyadonc quelque intérêt à résumer les recherches récentes
qui peuvent jeter quelque lumière sur l’histoire d’un artiste que les
textes anciens nous désignent comme le chef incontesté de l’école
argienne.
I.
On sait que le caractère le plus saillant des écoles péloponésiennes
est une prédilection marquée pour le travail du bronze. Au vie siècle,
Argos, Sicyone et Egine sont les trois grands centres où s’exécutent,
dans les ateliers des fondeurs, les groupes et les statues de bronze,
ex-votos, images d’athlètes vainqueurs, qui prennent place sur les
terrasses de Delphes ou sous les platanes de l’Altis, à Olympie. Dans
la pi’atique sévère des arts du métal, les sculpteurs du Péloponèse
contractent de bonne heure, avec une rare habileté technique, des
habitudes de précision qui donnent à leurs œuvres un remarquable
accent de sévérité. .Un des maîtres de l’archéologie classique,
M. Brunn, a depuis longtemps mis en relief les caractères essentiels
du style péloponésien archaïque : un goût décidé pour les propor-
tions robustes, une construction solide, presque architecturale, et
surtout une conception raisonnée, mathématique, pour ainsi dire, des
formes du corps 3. On peut déjà prévoir que l’effort des sculpteurs
doriens se tournera vers l'étude des proportions, et qu’il appartiendra
à un maître d’Argos, à Polyclète, de formuler les règles d’un canon
t. Voir Botho Graef, Mittheilungen des arch. Inst.; Alhen Abtheil. XV, t890,
p. 1-39.
2. Brunn, Arch. Zeitung, 1876, p. 20 et suiv. Mittheil. Athen, VII, 1882, p. 112
et suivantes.