470
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
complète, et d’une admirable conservation. Son ton adouci est celui
de l’acier au clair, qui n’a point été fourbi. A-t-elle perdu son poli
primitif sous des nettoyages réitérés? Cela est peu probable. Car en
nul endroit la délicatesse du décor n’est entamée. La vigueur de
certains traits de burin indiquerait peut-être qu’elle n’a point été
terminée et n’a point reçu la dorure posée en plein que méritaient de
semblables harnois.
Par ses caractères généraux, nous dirons architectoniques,
cette armure ne se rapporte pas absolument au règne de Henri II.
Ses grèves complètes n’étaient guère de mise à cette époque.
Les passe-gardes tendent cependant à la faire rentrer parmi les
panoplies encore en usage vers 1550, et le beau profil de son armet,
nullement camard, est fait pour nous confirmer dans cette idée. On
remarquera que l’armet ne possède point ce porte-plumail habituel-
lement rivé à la queue du timbre, ce qui pourrait donner à croire que
l’armure n’a point été absolument terminée.
Nous ne nous arrêterons pas davantage à la structure même de
cette belle panoplie, car elle vaut surtout par son admirable décora-
tion ; devant elle, la critique ne sait où se prendre. Les sujets qui
ornent la cuirasse représentent l’histoire de la mort de Pompée; le
reste des pièces est couvert d’ornements courants, de mascarons, de
trophées, de figures allégoriques d’un élégant et somptueux arrange-
ment dont l’heureux caractère est augmenté par le bon parti de bas-
relief qui laisse en valeur tous les détails sans faire papilloter
l’ensemble.
A quelle école, à quels ouvriers, à quel atelier doit-on cette
superbe armure? La chose est difficile à dire nettement; non moins
ardu de fixer la date exacte de sa fabrication. Qu’elle ait appar-
tenu à Henri II, la chose est possible. La forte saillie des épaules est
faite pour rappeler la stature un peu voûtée du fils de François Ier.
L’absence complète de croissants, d’initiales entrelacées, d’autres
emblèmes que l’on retrouve sur d’autres harnois et armes du roi
Henri II, pourrait faire supposer que cette panoplie aurait été
exécutée lorsqu’il n’était encore que dauphin et n’osait point encore
rendre officiel son culte pour la belle Diane de Poitiers. Aurait-elle
appartenu à quelque autre prince? Toute affirmation en ce sens serait
dangereuse. Nous savons que Charles IX, à son entrée àParis en 1571,
portait une armure blanche richement ciselée. Mais ce document n’est
pas suffisant pour lui attribuer celle du Louvre. Et, jusqu’à ce qu’une
enquête définitive nous ait éclairés sur ce point, il convient de res-
i
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
complète, et d’une admirable conservation. Son ton adouci est celui
de l’acier au clair, qui n’a point été fourbi. A-t-elle perdu son poli
primitif sous des nettoyages réitérés? Cela est peu probable. Car en
nul endroit la délicatesse du décor n’est entamée. La vigueur de
certains traits de burin indiquerait peut-être qu’elle n’a point été
terminée et n’a point reçu la dorure posée en plein que méritaient de
semblables harnois.
Par ses caractères généraux, nous dirons architectoniques,
cette armure ne se rapporte pas absolument au règne de Henri II.
Ses grèves complètes n’étaient guère de mise à cette époque.
Les passe-gardes tendent cependant à la faire rentrer parmi les
panoplies encore en usage vers 1550, et le beau profil de son armet,
nullement camard, est fait pour nous confirmer dans cette idée. On
remarquera que l’armet ne possède point ce porte-plumail habituel-
lement rivé à la queue du timbre, ce qui pourrait donner à croire que
l’armure n’a point été absolument terminée.
Nous ne nous arrêterons pas davantage à la structure même de
cette belle panoplie, car elle vaut surtout par son admirable décora-
tion ; devant elle, la critique ne sait où se prendre. Les sujets qui
ornent la cuirasse représentent l’histoire de la mort de Pompée; le
reste des pièces est couvert d’ornements courants, de mascarons, de
trophées, de figures allégoriques d’un élégant et somptueux arrange-
ment dont l’heureux caractère est augmenté par le bon parti de bas-
relief qui laisse en valeur tous les détails sans faire papilloter
l’ensemble.
A quelle école, à quels ouvriers, à quel atelier doit-on cette
superbe armure? La chose est difficile à dire nettement; non moins
ardu de fixer la date exacte de sa fabrication. Qu’elle ait appar-
tenu à Henri II, la chose est possible. La forte saillie des épaules est
faite pour rappeler la stature un peu voûtée du fils de François Ier.
L’absence complète de croissants, d’initiales entrelacées, d’autres
emblèmes que l’on retrouve sur d’autres harnois et armes du roi
Henri II, pourrait faire supposer que cette panoplie aurait été
exécutée lorsqu’il n’était encore que dauphin et n’osait point encore
rendre officiel son culte pour la belle Diane de Poitiers. Aurait-elle
appartenu à quelque autre prince? Toute affirmation en ce sens serait
dangereuse. Nous savons que Charles IX, à son entrée àParis en 1571,
portait une armure blanche richement ciselée. Mais ce document n’est
pas suffisant pour lui attribuer celle du Louvre. Et, jusqu’à ce qu’une
enquête définitive nous ait éclairés sur ce point, il convient de res-
i