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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
c’est vers le Delta que nous devons regarder pour trouver l’origine
des motifs plastiques que les industriels de la Gaule romaine ont
répétés et quelquefois enlaidis.
Après les Vénus, les déesses-mères sont les plus nombreuses. On
les a déjà plus d’une fois rapprochées du type de l’Isis égyptienne
allaitant Horus. Evidemment, la conception d’une divinité kourotrophe
devait exister dans la religion gauloise, et il serait insensé de parler,
à ce propos, de la religion isiaque en Gaule; mais nous sommes
d’autant plus tenté d’attribuer au groupe de la déesse-mère une
origine gréco-égyptienne ou gréco-syrienne que le type hellénique
de la kourotrophe, à une époque bien antérieure, paraît avoir
précisément été emprunté par l’art grec à l'Egypte et à la Phé-
nicie 1.
VII.
Il n’est pas jusqu’aux deux types les plus singuliers de l’art gallo-
romain dont l’origine égyptienne ne soit probable : elle me paraît
même certaine pour le premier et le plus répandu, celui du Pluton
gaulois ou Disputer2.
Le Disputer est identifié à Sérapis ou au Pluton gréco-égyptien
non seulement dans la statuette de Niège, où la tète est surmontée du
polos3, mais dans un bas-relief de Hongrie, où il est debout à côté
d’Isis tenant une clef4. Les premiers artistes qui voulurent figurer le
Disputer gaulois prirent sans doute modèle sur les images du Sérapis
alexandrin, dont le caractère était analogue, en substituant seule-
ment le costume gaulois au costume grec et en changeant le sceptre
en maillet, soit par un emprunt au type italique de Charon, soit pour
se conformer à une tradition orale que nous ignorons. C’est là un
point qui me paraît établi.
La question du dieu accroupi est plus difficile, parce qu’il n en
subsiste que peu d’exemplaires, appartenant tous à la région orien-
tale de la Gaule, et parce que le nom et le caractère précis de ce dieu
4. Cf. Heuzey, Figurines du Louvre, p. 9.
2. L’identification de ce type avec le Disputer dont parle César a été mise hors
de doute par M. A. de Barthélemy (Revue celtique, t. I, p. 1).
3. J’ai signalé ce fait en 1887 (Comptes rendus de l'Académie des Inscriptions,
p. 443).
4. Le Musée de Saint-Germain doit un moulage de ce bas-relief à M. J. de Baye.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
c’est vers le Delta que nous devons regarder pour trouver l’origine
des motifs plastiques que les industriels de la Gaule romaine ont
répétés et quelquefois enlaidis.
Après les Vénus, les déesses-mères sont les plus nombreuses. On
les a déjà plus d’une fois rapprochées du type de l’Isis égyptienne
allaitant Horus. Evidemment, la conception d’une divinité kourotrophe
devait exister dans la religion gauloise, et il serait insensé de parler,
à ce propos, de la religion isiaque en Gaule; mais nous sommes
d’autant plus tenté d’attribuer au groupe de la déesse-mère une
origine gréco-égyptienne ou gréco-syrienne que le type hellénique
de la kourotrophe, à une époque bien antérieure, paraît avoir
précisément été emprunté par l’art grec à l'Egypte et à la Phé-
nicie 1.
VII.
Il n’est pas jusqu’aux deux types les plus singuliers de l’art gallo-
romain dont l’origine égyptienne ne soit probable : elle me paraît
même certaine pour le premier et le plus répandu, celui du Pluton
gaulois ou Disputer2.
Le Disputer est identifié à Sérapis ou au Pluton gréco-égyptien
non seulement dans la statuette de Niège, où la tète est surmontée du
polos3, mais dans un bas-relief de Hongrie, où il est debout à côté
d’Isis tenant une clef4. Les premiers artistes qui voulurent figurer le
Disputer gaulois prirent sans doute modèle sur les images du Sérapis
alexandrin, dont le caractère était analogue, en substituant seule-
ment le costume gaulois au costume grec et en changeant le sceptre
en maillet, soit par un emprunt au type italique de Charon, soit pour
se conformer à une tradition orale que nous ignorons. C’est là un
point qui me paraît établi.
La question du dieu accroupi est plus difficile, parce qu’il n en
subsiste que peu d’exemplaires, appartenant tous à la région orien-
tale de la Gaule, et parce que le nom et le caractère précis de ce dieu
4. Cf. Heuzey, Figurines du Louvre, p. 9.
2. L’identification de ce type avec le Disputer dont parle César a été mise hors
de doute par M. A. de Barthélemy (Revue celtique, t. I, p. 1).
3. J’ai signalé ce fait en 1887 (Comptes rendus de l'Académie des Inscriptions,
p. 443).
4. Le Musée de Saint-Germain doit un moulage de ce bas-relief à M. J. de Baye.