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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 11.1894

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Hymans, Henri: Le Musée du Prado, [7], Les écoles du nord - Rubens et le XVIIe siècle: les musées de Madrid
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https://doi.org/10.11588/diglit.24664#0090

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

paille, sa sœur Suzanne. L’ingénieuse supposition de notre savant
confrère expliquerait ainsi que Rubens eût tenu à faire du Jardin
d’Amours un ornement de sa propre demeure.

Envisagée à bon droit comme une des perles du Prado, la compo-
sition se répète dans un second chef-d’œuvre, de moindre format et
quelque peu modifié, dans la collection du baron Edmond de Roths-
child. Lord Aylesforden possédait un grandiose dessin adjugé lors de
sa vente récente à sir Charles Robinson ; on en connaît des études des-
sinées au Louvre et encore ailleurs, notamment à Francfort, enfin
une gravure magistrale sur bois, par Christophe Jegher, faite sur un
dessin de Rubens, d’une composition encore modifiée, mais encore
exquise.

De tout ceci résulte que Rubens avait comme caressé un sujet
dont les personnages lui étaient chers. Un roi seul pouvait aspirer à
le posséder; ce bonheur échut à Philippe IV.

Le licencié Michel, dans son curieux ouvrage sur Rubens, publié
en 1771, fournit des détails intéressants sur le sort des œuvres dépen-
dant de la succession du maître. La vente publique, d’abord annoncée,
n’eut pas lieu; sans doute la famille avait reçu des offres assez bril-
lantes pour s’en dispenser. Mais voici dans le livre de l’homme de
loi brabançon un passage qui nous intéresse :

« Malgré que le nombre de 93 tableaux de la main de Rubens,
qu’on trouve au présent catalogue, parait excessif, cependant la
dame sa douairière avait encore retenu plusieurs pièces, dans le des-
sein de ne pas s’en défaire, par modestie et scrupule, pour les grandes
nudités des figures dont elles étaient composées, craignant de scan-
daliser les yeux et cœurs chastes, par des objets piquant la sensua-
lité et égales à la plus belle nature, qui, par des contemplations
indécentes auraient pu blesser la pureté de l’âme; même elle cacha
ces pièces dans une place retirée de sa maison et se laissa tenter
du projet de les sacrifier au feu ; les deux plus éclatantes de ces pièces
étaient le Bain de Diane, dont les figures étaient plus que demi-
nature, l’autre d’hauteur humaine représentoit les Trois Grâces. »

Le Bain de Diane a disparu. Il ne fut point sacrifié aux scrupules
d Hélène Fourment, attendu que Michel lui-même nous apprend de
quelle façon le duc de Richelieu parvint à en triompher, et l’on sait
l’enthousiaste appréciation de Piles à propos d’une page vainement
cherchée jusqu’ici. Pour les Trois Grâces, Philippe IV ne craignit pas de
scandaliser ses chastes yeux ni ceux de la postérité. Elles sont aujour-
d’hui au Prado. Certes, nous devons de bien vifs remerciements au
 
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