LA SCULPTURE FLORENTINE.
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la fin du siècle, par des œuvres d’une remarquable beauté Les
deux portes latérales du Dôme, la Porte des Chanoines et la Porte de la
Mandorla, sont parmi les œuvres les plus parfaites et les plus person-
nelles de l’art italien. La porte de la Mandorla surtout, avec ces
jolies figurines et ces anges si gracieux qui alternent au milieu
d’enroulements de feuillage, peut être tenue pour la plus belle de
l’Italie. Si les architectes grecs qui ont sculpté la porte de l’Erechteion
et le temple de la Victoire aptère revenaient parmi nous, c’est cette
porte qu’il faudrait leur montrer.
Dans la première porte, dite des Chanoines, on remarquera le
motif des petits enfants nus jouant parmi les feuillages. On a pu y
voir une première influence de la Renaissance, mais d’autre part on
peut faire remarquer que ce motif, qui est incontestablement romain,
n’a pas cessé d'être familier aux sculpteurs du moyen âge et que son
emploi ne saurait servir d’argument pour prouver une action nou-
velle de l’art antique à la fin du xive siècle. Ce motif d’enfants nus
entrelacés dans des rinceaux, nous le trouvons fréquemment en
France, notamment sur les fûts de colonne du portail occidental de
Chartres et sur des chapiteaux de Langres. En Italie, il est partout
au xive siècle — à Pistoia, sur les chapiteaux du Baptistère, — à
Florence, au monument Baroncelli de 1327 à Santa-Croce, et au
candélabre de S. Maria novella, — à Pise, sur la porte de l’église
San-Guisto, — à Sienne, sur les colonnes de la porte du Dôme et
sur celles du monument de Benoit X, de Jean de Pise. Le plus bel
exemple de ce motif se voit sur la façade de la cathédrale de Citta
di Castello 1 2.
1. Combien ne devons-nous pas regretter la perle des deux grandes composi-
tions, la Nativité et la Mort de Marie, qui décoraient le tympan des deux portes
mineures de la façade ! Un bas-relief du Bargello représentant des animaux provient
peut-être du tympan de la Nativité.
2. En examinant la porte des Chanoines, il est impossible de ne pas être frappé
de la naïveté du style et de la maladresse d’exécution de la partie qui borde la
porte. Ces figures courtes, ces têtes énormes, cette disproportion des corps, tout
cela paraît bien étrange dans une époque aussi avancée que la fin du xive siècle.
Si l’on compare cette partie avec les œuvres contemporaines, telles que la porte
de la Mandorla ou même simplement la partie supérieure de la porte des Chanoines,
si l'on songe aux œuvres antérieures de l’art florentin, on est surpris par un
tel archaïsme. Pour moi, je l’expliquerais par ce fait que cette partie de la porte est
l’œuvre de Piero di Giovanni Tcdesco, maître du nord, plus savant que les Floren-
tins dans l’art de composer un motif architectural, mais moins habile qu’eux
dans l’art de ciseler les détails. Dans cette hypothèse, cette porte, œuvre de Piero
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la fin du siècle, par des œuvres d’une remarquable beauté Les
deux portes latérales du Dôme, la Porte des Chanoines et la Porte de la
Mandorla, sont parmi les œuvres les plus parfaites et les plus person-
nelles de l’art italien. La porte de la Mandorla surtout, avec ces
jolies figurines et ces anges si gracieux qui alternent au milieu
d’enroulements de feuillage, peut être tenue pour la plus belle de
l’Italie. Si les architectes grecs qui ont sculpté la porte de l’Erechteion
et le temple de la Victoire aptère revenaient parmi nous, c’est cette
porte qu’il faudrait leur montrer.
Dans la première porte, dite des Chanoines, on remarquera le
motif des petits enfants nus jouant parmi les feuillages. On a pu y
voir une première influence de la Renaissance, mais d’autre part on
peut faire remarquer que ce motif, qui est incontestablement romain,
n’a pas cessé d'être familier aux sculpteurs du moyen âge et que son
emploi ne saurait servir d’argument pour prouver une action nou-
velle de l’art antique à la fin du xive siècle. Ce motif d’enfants nus
entrelacés dans des rinceaux, nous le trouvons fréquemment en
France, notamment sur les fûts de colonne du portail occidental de
Chartres et sur des chapiteaux de Langres. En Italie, il est partout
au xive siècle — à Pistoia, sur les chapiteaux du Baptistère, — à
Florence, au monument Baroncelli de 1327 à Santa-Croce, et au
candélabre de S. Maria novella, — à Pise, sur la porte de l’église
San-Guisto, — à Sienne, sur les colonnes de la porte du Dôme et
sur celles du monument de Benoit X, de Jean de Pise. Le plus bel
exemple de ce motif se voit sur la façade de la cathédrale de Citta
di Castello 1 2.
1. Combien ne devons-nous pas regretter la perle des deux grandes composi-
tions, la Nativité et la Mort de Marie, qui décoraient le tympan des deux portes
mineures de la façade ! Un bas-relief du Bargello représentant des animaux provient
peut-être du tympan de la Nativité.
2. En examinant la porte des Chanoines, il est impossible de ne pas être frappé
de la naïveté du style et de la maladresse d’exécution de la partie qui borde la
porte. Ces figures courtes, ces têtes énormes, cette disproportion des corps, tout
cela paraît bien étrange dans une époque aussi avancée que la fin du xive siècle.
Si l’on compare cette partie avec les œuvres contemporaines, telles que la porte
de la Mandorla ou même simplement la partie supérieure de la porte des Chanoines,
si l'on songe aux œuvres antérieures de l’art florentin, on est surpris par un
tel archaïsme. Pour moi, je l’expliquerais par ce fait que cette partie de la porte est
l’œuvre de Piero di Giovanni Tcdesco, maître du nord, plus savant que les Floren-
tins dans l’art de composer un motif architectural, mais moins habile qu’eux
dans l’art de ciseler les détails. Dans cette hypothèse, cette porte, œuvre de Piero