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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 8.1912

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Foville, Jean de: Carpeaux et Ricard: á propos d'une exposition récente
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https://doi.org/10.11588/diglit.24885#0026

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

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(1869), l'Inconnue de la collection Sarlin (1871), d’une si émouvante
spiritualité, le portrait de Mme Stephenson, avec son enfant sur ses
genoux, devant un profond paysage de plein air, peinture délicieuse
de tonalité, de composition, de grâce tendre et d’esprit, exécutée à
Londres après la guerre; puis quatre chefs-d’œuvre, datant de 1872 :
Mme L. Arnavon, si blonde, et Mme Charles-Roux, si brune, deux
œuvres à la fois jumelles et antithétiques que le maître s’amusait à
dénommer Vanité et Modestie, enfin le souriant portrait de Mme de
Formeville, et ce portrait du peintre par lui-même, qui a été gravé
pour la Gazette par Le Rat1. Ricard a atteint, en ces toiles, à une
originalité de facture, très complexe, très savante, nullement spon-
tanée, mais qui, pour être aussi consciente, n’en est que plus inté-
ressante et plus belle : c’est une inexprimable dégradation de teintes,
tantôt sombres et tantôt claires, qui semblent flottantes comme une
brume lumineuse, et c’est la nuance même de la vie, à la fois sur-
prise et analysée. Mais combien séduit davantage encore ce rayon-
nement de l’intelligence qui anime ces physionomies recueillies!
Et, devant son propre portrait (qu'il peignit peu de semaines avant
de mourir d’une mort subite et sans souffrances), qui ne sent cette
présence émouvante d’une âme guérie de l’inquiétude parce qu’elle
a découvert Eau delà et pénétré dans l’inconnu?

De son vivant, quoique révéré d’un groupe d’admirateurs dis-
crets, Ricard n’a point cherché la renommée : peu à peu, cependant,
sa mémoire conquiert la gloire la plus pure, puisqu’il compte parmi
les génies méditatifs que la ferveur de l'élite entoure plus étroite-
ment chaque jour. Il ne le doit qu'à sa perfection intime : n’a-t-il
pas peint des portraits aussi révélateurs que celui de Chenavard,
aussi poussés que ceux de M. Marcotte de Quivières et de Mmc Che-
nest, dans le même temps qu'il en peignait d’autres, émus et poé-
tiques, comme ceux de Mme de Galonné et de MUe Laffitte? Donc, il
ne touche pas moins notre intelligence que notre cœur : ce pouvoir
n'a été donné qu’à très peu de grands artistes. Remercions les orga-
nisateurs de cette Exposition d’avoir fourni la preuve visible que
Gustave Ricard appartenait bien à ce petit nombre d’élus.

JEAN DE F0V1LLE

i. Y. Gazette des Beaux-Arts, mars 1873.
 
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