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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 8.1912

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Nr. 2
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Vitry, Paul: Les monuments à J.-J. Rosseau: de Houdon à Bartholomé
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https://doi.org/10.11588/diglit.24885#0131

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116

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Certes l’œuvre est inatlendue. Elle n’a rien d’un pastiche, disions-
nous, et, si une saveur antique s’en dégage, l'on n’y sent guère la
raideur davidienne des allégories révolutionnaires et la plastique
implacablement correcte et sans âme des émules de Canova. Elle
déconcerterait également au premier abord quiconque ne connaîtrait
et n’apprécierait que la véhémence turbulente des allégories sco-
laires de notre sculpture officielle, que les morceaux de bravoure et
de virtuosité académique auxquels l’art d’Etat — celui que l’on
enseigne à l’Ecole des Beaux-Arts et que l’on perfectionne à l’Aca-
démie de France à Rome—nous condamne d’ordinaire. Elle n’a rien
non plus qui soit fait pour séduire les amateurs de cette sculpture
qui, sous prétexte d’indépendance et d’expression forcenée, violente
les formes naturelles, bouleverse les lignes architecturales, et
aboutit à un ensemble confus et mal équilibré où éclate la puis-
sance solitaire de quelque admirable morceau mal entouré.

Non, l’art de M. Bartholomé est aussi loin des uns que des autres,
et qui l’aime le reconnaîtra ici sans peine tout entier. La puissance
d’expression du geste humain, vrai et simple, guidé par l’émotion
intérieure, telle que le Monument aux Morts nous l’a révélée, la grâce
souple des Pleureuses et des Baigneuses qui ont suivi, la qualité
suprême de ces modelés tranquilles et sûrs, délicatement caressés,
le charme prenant de ces types familiers interprétés avec une sorte
de culte attendri de la beauté vivante, tout est là. Mais il y a plus
encore dans cette œuvre conduite avec une âpre et tenace volonté
d’aboutir, mais sans hâte, à loisir, dans ce calme méditatif où la
réflexion lentement mûrie dégage peu à peu, des lignes combinées et
des formes caressées, une pensée maîtresse, une harmonie d’en-
semble : il y a une intention manifeste, et réalisée jusqu’au bout, de
composer, avec des éléments très sobres et très grands, un ensemble
qui se tienne, où moins de part soit laissé au pur pittoresque que
dans le Monument aux Morts lui-même; il y a un sentiment d’équi-
lib re sans lourdeur, de raison sans pédantisme, qui est vraiment
unique et qui, du reste, est l’homme même.

L’œuvre est achevée, complète, harmonisée avec son cadre, elle
est probe et faite de main d’ouvrier, comme disaient nos vieux
maîtres d’autrefois. Non seulement la pensée fut personnelle et
l’invention créatrice de beauté expressive, mais la composition fut
patiente et raisonnée du modèle repris et modifié, non par ces
brusques et radicaux changements de partis qui ne sont que l’effet
de sautes d’humeur inconstante, mais par ces recherches de nuances
 
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