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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 8.1912

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Nr. 4
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Dorbec, Prosper: Les paysagistes anglais en France
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https://doi.org/10.11588/diglit.24885#0298

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278

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

graphie, les paysagistes insulaires ont laissé la place libre aux nôtres.
Qui veut s’initier à la peinture des premiers n’a qu’à se rendre chez
Ar rowsmith, lequel, à une époque, aurait même possédé une salle
dite de Constable1. Sensier, dans ses Souvenirs sur Théodore Rousseau,
fait quelque part allusion aux rapports du maître avec le marchand de
tableaux; celui-ci dut faire voir sa collection d’œuvres anglaises
au jeune paysagiste, déjà connu pour ce qu’il avait réalisé dans sa
retraite studieuse au fond de l’Auvergne. Rousseau s’en alla un
moment chercher leur largeur d’effets sur les hauteurs de Sèvres et de
Meudon, mais les productions du peintre du Norfolk laissaient dé-
couvrir un manque de netteté dans leurs plans qui ne pouvait le
satisfaire.

Vers la même époque est venu Turner, commençant sa série des
Fleuves cle France2 et, à Paris, prenant des vues ou plutôt recueillant
de vastes et lumineuses impressions de la Seine aux environs du
Pont-Neuf et du Pont-au-Change. Une gravure nous a même conservé
le souvenir d’un dessin tout à fait amusé et charmé que lui avait
inspiré l’aspect de nos grands boulevards, mais le séjour dans nos
murs de cet indépendant solitaire passa absolument inaperçu3.

Du reste, les artistes anglais se font plus rares à Paris. Quand
Dupré, en 1835, revient d’Angleterre avec cette Vallée de Southampton
qui est un enthousiaste hommage aux ciels mouvementés magni-
fiques, à l’enivrante haleine saline, à la luxuriance des prairies dans
l’humide contrée insulaire, cette toile termine, pour notre peinture
de paysage, la grande période d’instruction britannique. On a désormais
cessé de précipiter ainsi des nuages chargés de vent et de pluie au-
dessus de nos vallées ; notre école reprend conscience du climat,

1. Bazalgette, op. cit., p. 161. — Arrowsmith exécutait lui-même des tableaux
dans la manière anglaise (voir Esquisses, pochades... sur le Salon cle 1827, par
Jal, 237).

2. The rivers ofFranee from drawings by J. M. W. Turner, 1837. Le thème était
assez dans le goût de l’époque; il avait séduit Bonington, qui se disposait à des-
cendre le cours de la Seine avec Paul Huet quand la maladie le terrassa, il avait
même déjà donné lieu à un album français tout àfait analogue à celui deTurner:
Les Rives de la Seine dessinées d’après nature et lithographiées par Deroy, 1831.

3. La première notion qu’on prendra de son art ce sera par la plume do
Gustave Planche dans l’article de la Revue des Deux Mondes du 1er juin 183o, où le
critique rendit compte de l’exposition de Somerset House; le grand magicien y
est rigoureusement défini « un homme qui pétrit l’espace, qui déroule les
plaines, élève les montagnes, qui invente pour les fleuves des sinuosités igno-
rées du monde entier ». Ce n’est que beaucoup plus tard que des œuvres de lui
feront apparition en France, dans un cabinet d’amateur, et cette fois la signifi-
cation de son art sera mise en lumière par la plume enthousiaste des Goncourt.
 
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