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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 8.1912

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Nr. 6
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Jean, René: L' exposition de M. Eubène Béjot
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https://doi.org/10.11588/diglit.24885#0499

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470

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

En toute saison, sans répit, il a continué sa tâche, et s’il préfère,
pour l’accomplir, avoir pour spectateur le soleil qui joue parmi les
frondaisons et permet aux enfants de s’ébattre dans les bosquets, il
a subi aussi le charme des heures, rares sous le ciel de Paris, où
la neige change l’aspect des choses, enserre de blancheur le lit res-
serré du fleuve, donne aux arbres des silhouettes inattendues et
prête à tous les édifices, comme aux moindres murailles, une archi-
tecture nouvelle, des saillies plus larges, des moulurations d’un
galbe plus gras et plus immatériel, habille toutes choses pour en
faire des merveilles éphémères.

Mais, alors encore qu’il s’attarde au pittoresque que le temps
limite, M. Béjot ne se laisse pas séduire par les jeux mouvants de la
lumière, il ne s’attarde pas à analyser les variations nuancées des
heures qui font un paysage différent de minute en minute, au gré
du nuage qui passe, du vent qui souffle ou des feuillages qui
s’inclinent. Lorsqu’il s’attarde à étudier les arbres, il les voit comme
masse dans le site qu’il a choisi, ou, en dressant le tronc au premier
plan, il les oppose à l’horizon fuyant, peuplé de maisons et d'édi-
fices, qui apparaît derrière comme un tableau encadré avec art.

M. Béjot est historien avant tout ; rien ne le distrait de la pour-
suite de la vérité objective. C’est la ville, c’est son image fidèle à
l’heure où il la contemple, qu’il s’est donné à tache de fixer. Et il on
est d’elle comme de toutes les choses ici-bas. Soumis aux lois qui
régissent la vie, Paris change chaque jour, comme change à chaque
heure un visage humain.

Et lorsque, sa moisson faite, M. Béjot se retrouve devant la
plaque de cuivre qui lui sert à multiplier pour ses semblables les
impressions qu’il a recueillies, il n’a plus qu’à reporter les notes
qu’il a transcrites, qu’à copier ligne à ligne les dessins qu’il vient de
tracer. Ces dessins, parce que leur auteur est graveur dans l’âme,
semblent exécutés pour être reproduits par la gravure, afin que,
comme un livre véridique, ils puissent porter aux chroniqueurs
d’aujourd’hui et à ceux de demain, les aspects de Paris, vus par
l’intelligence éveillée et sensible d’un artiste épris d’exactitude et
de véracité.

RENÉ JEAN
 
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