Overview
Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 2.1920

DOI Heft:
Nr. 4
DOI Artikel:
Michel, Édouard: L' exposition des maîtres belges de 1830 à 1914 à Anvers: correspondance de Belgique
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.24919#0371

DWork-Logo
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
348

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

lumières et de colorations variées, indiquaient nettement ce que l’école impression-
niste doit à ce grand peintre, disparu trop tôt.

De l’austère et grave Baron, continuant les recherches de Boulenger, l’on admirait
une simple Dune, forte harmonie de jaune, de brun, de vert.

Autour de ces peintres, l’exposition groupait les œuvres de paysagistes comme De
Knyff, De Greef, Coosemans, de rudes campagnards comme Stobbaerts ou Verwée,
des peintres de marines comme Artan ; mais ces toiles, intéressantes par elles-mêmes,
ne montraient de ces artistes aucune qualité particulière que l’on ne pût apprendre
à connaître par une visite aux Musées de Bruxelles ou d’Anvers : elles n’ont donc
pas leur place marquée dans ce court résumé.

Evenepoel, au contraire, même après ses œuvres de Bruxelles, de Gand ou de Liège,
étonnait encore ici par sa vision originale, sans cesse renouvelée, sa curiosité tou-
jours en éveil, la solidité de ses constructions, les particularités de son riche coloris.
Un portrait comme celui à1 Henriette au grand chapeau affirmait la maîtrise du jeune
homme de vingt-neuf ans, qui promettait à la Belgique un de ses plus beaux peintres.
Dans Y Annonce de la fête nègre, en dehors des harmonies de tons si neuves et
si heureuses, il y avait là des recherches de mouvements, de gestes, non encore vus
ailleurs. Une toile fort décorative, avec des roses, des verts et des jaunes bizarrement
opposés, montrait une Ère charmante, dont la figure et les épaules restaient ina-
chevées, mais dont le reste du corps, amoureusement traité, proclamait une fois de
plus les solides qualités du jeune peintre.

Telle était cette exposition dont nous avons essayé de montrer les principales
caractéristiques, en laissant forcément de côté, dans cette rapide étude, bien des noms
et bien des œuvres importantes. Cette brillante réunion d’Anvers proclamait très
haut la grandeur de l’art belge au xixe siècle, et montrait dans un lumineux abrégé
son long et persévérant effort pour se dégager de l’emprise française, beaucoup trop
absolue au commencement du siècle, et retrouver sa forte personnalité. C’est en
revenant aux traditions de sa race, en recherchant des forces dans son sol, et ses
tendances originelles, mais aussi en portant attention à ce qui se passait chez nous
et en faisant même appel par deux fois à notre influence, au temps du réalisme avec
Courbet, au temps de l’impressionnisme avec Manet, que la peinture belge a pu par-
venir à ses fins. Aujourd’hui nous assistons à sa pleine floraison avec des peintres
comme Laermans, Frédéric, Claus, Baertsoen et tant d’autres, tous en pleine pro-
duction et dont les œuvres, par suite, ne figuraient pas à l’exposition ; mais elles en
restaient cependant l’aboutissement et le couronnement, et il était impossible de
quitter Anvers sans aller une fois de plus admirer dans les salles du musée ces mer-
veilleux Emigrants de Laermans, puissant héritage, laissé à la jeune école par le
xixe siècle finissant, tragique et poignante prophétie des tribulations qui attendaient
les populations de la Belgique dans ce cruel été de 1914 ; mais le peuple et l’art
étaient désormais assez forts pour ne faire que grandir dans les malheurs. C’est ce que
l’avenir devait montrer.

ÉDOUARD MICHEL
 
Annotationen