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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
tecte Vespignaniet le peintre Seitz, les appartements du premier étage du Vieux
Palais eurent les destinées les plus diverses. Alexandre VI mort, les Souverains
Pontifes quittèrent les grandes salles qui, à la lin du xve siècle, avaient été
le centre de la vie pontificale. Ils aimèrent mieux les Chambres de Raphaël,
plus aérées et plus lumineuses, abandonnant l’étage inférieur au cardinal
secrétaire d’Etat ou à des dignitaires de la cour pontificale, parents du pape.
D’ailleurs, lorsque l’aile de Sixte-Quint fut achevée, les papes y transpor-
tèrent leur résidence. Les Chambres de Raphaël furent délaissées, et celles de
Pinturicchio commencèrent à se détériorer. En 1760, l’abbé Taja écrivait
dans sa Descrizione del Palazzo Vaticano : (( Pour le plus grand dommage
du bien public et des beaux-arts, le peu de goût et la négligence de nos pères
ont laissé s’abîmer tant de peintures, ornement de l’appartement Borgia, au
premier étage. »
Au début du xixe siècle, on en fit un dépôt des objets d’art et des tableaux
qui, après les traités de Vienne, furent restitués par la France au pape.
Quelques années plus tard, les appartements Borgia devinrent une annexe
de la Bibliothèque vaticane. Au milieu de tous ces avatars, les fresques
se dégradèrent : l’ensemble des merveilleuses salles fut bientôt méconnais-
sable et il fallut beaucoup de travaux et de soins pour leur redonner un peu
de leur éclat primitif.
Dans leur ouvrage capital sur la décoration de ces appartements,
MM. Ehrle et Stevenson indiquent avec précision les salles où travailla Pin-
turicchio. Ce furent les chambres secrètes (ainsi que les appelle Burchard1).
Or, on ne désignait sous ce nom que les seconde, troisième et quatrième
salles de l’appartement Borgia, la première, la salle des Pontifes, étant uni-
quement destinée aux réceptions solennelles, les autres faisant partie de la
tour Borgia (cinquième et sixième) ou étant réservées aux gardes nobles.
En ce meme Vatican, où il était appelé à développer un magnifique cycle
de fresques, Pinturicchio avait déjà travaillé. Il avait été au nombre des
peintres chargés de la décoration de la Sixtine par le pape dont Melozzo da
Forlï a si admirablement reproduit les traits dans la fresque conservée à la
Pinacothèque vaticane. Pinturicchio intervint comme aide de son maître
le Pérugin qu’il avait suivi à Rome : on lui attribue aujourd’hui une collabo-
ration importante dans le Baptême du Christ et le Départ de Moïse pour
l’Egypte. Ce jeune artiste de vingt-cinq ans a le dessin encore rude, et on
prévoit à peine le brillant coloriste qu'il sera quelques années plus tard.
Une fois la chapelle Sixtine ouverte au culte ( 1483), presque tous les
1. Le Diarium de Jean Burchard, qui fut maître des cérémonies au Vatican, est extrê-
mement utile pour l’étude de l’histoire pontificale de 1483 à [5o6.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
tecte Vespignaniet le peintre Seitz, les appartements du premier étage du Vieux
Palais eurent les destinées les plus diverses. Alexandre VI mort, les Souverains
Pontifes quittèrent les grandes salles qui, à la lin du xve siècle, avaient été
le centre de la vie pontificale. Ils aimèrent mieux les Chambres de Raphaël,
plus aérées et plus lumineuses, abandonnant l’étage inférieur au cardinal
secrétaire d’Etat ou à des dignitaires de la cour pontificale, parents du pape.
D’ailleurs, lorsque l’aile de Sixte-Quint fut achevée, les papes y transpor-
tèrent leur résidence. Les Chambres de Raphaël furent délaissées, et celles de
Pinturicchio commencèrent à se détériorer. En 1760, l’abbé Taja écrivait
dans sa Descrizione del Palazzo Vaticano : (( Pour le plus grand dommage
du bien public et des beaux-arts, le peu de goût et la négligence de nos pères
ont laissé s’abîmer tant de peintures, ornement de l’appartement Borgia, au
premier étage. »
Au début du xixe siècle, on en fit un dépôt des objets d’art et des tableaux
qui, après les traités de Vienne, furent restitués par la France au pape.
Quelques années plus tard, les appartements Borgia devinrent une annexe
de la Bibliothèque vaticane. Au milieu de tous ces avatars, les fresques
se dégradèrent : l’ensemble des merveilleuses salles fut bientôt méconnais-
sable et il fallut beaucoup de travaux et de soins pour leur redonner un peu
de leur éclat primitif.
Dans leur ouvrage capital sur la décoration de ces appartements,
MM. Ehrle et Stevenson indiquent avec précision les salles où travailla Pin-
turicchio. Ce furent les chambres secrètes (ainsi que les appelle Burchard1).
Or, on ne désignait sous ce nom que les seconde, troisième et quatrième
salles de l’appartement Borgia, la première, la salle des Pontifes, étant uni-
quement destinée aux réceptions solennelles, les autres faisant partie de la
tour Borgia (cinquième et sixième) ou étant réservées aux gardes nobles.
En ce meme Vatican, où il était appelé à développer un magnifique cycle
de fresques, Pinturicchio avait déjà travaillé. Il avait été au nombre des
peintres chargés de la décoration de la Sixtine par le pape dont Melozzo da
Forlï a si admirablement reproduit les traits dans la fresque conservée à la
Pinacothèque vaticane. Pinturicchio intervint comme aide de son maître
le Pérugin qu’il avait suivi à Rome : on lui attribue aujourd’hui une collabo-
ration importante dans le Baptême du Christ et le Départ de Moïse pour
l’Egypte. Ce jeune artiste de vingt-cinq ans a le dessin encore rude, et on
prévoit à peine le brillant coloriste qu'il sera quelques années plus tard.
Une fois la chapelle Sixtine ouverte au culte ( 1483), presque tous les
1. Le Diarium de Jean Burchard, qui fut maître des cérémonies au Vatican, est extrê-
mement utile pour l’étude de l’histoire pontificale de 1483 à [5o6.