558 Voyages d'A n t e w o a
manteau d'un drap grossier et sombre ; le bord
de sa robe, au lieu d'être garni avec des franges
d'or et d'argent, n'en avoit que de laine. Elle
cacha ses cheveux, très-beaux encore ,se courba
sur un bâton, et attendit ainsi son jeune amant.
Dès qu'il la vit, il recula et resta muet. J'étois
témoin de cette scène. Lasthénie s'avance vers
lui, et lui demande s'il veut la conduire au
temple, ajoutant qu'elle étoit revêtue de ses
habits de noces, et conformément à son âge.
Celui-ci comprit la plaisanterie, et renonça,
quoiqu'avec peine , à ses amoureux projets.
A soixante-dix ans , elle voulut apprendre
les mathématiques, et y fit des progrés. Un
jour on lui vantoit la tranquillité, le bonheur
de sa vieillesse , dont l'approche et la perspec-
tive inspirent tant d'horreur à la plupart des
hommes. «C'est, dit-elle, que j'ai employé la
première partie de ma vie à rendre l'autre plu*
heureuse». Enfin, jusqu'à sa quatre-vingt-
cinquième année, époque de sa mort, elle
suivit, à très-peu-prés, le même système de vie
qu'elle avoit adopté à l'âge de trente ans.: elle
pouvoit dire qu'elle avoit vécu toute entière
jusqu'à son dernier jour, ayant parcouru cette
longue période sans avoir essuyé aucune ma-
ladie un peu grave.
Cette aimable philosophe eut le pressenti-
manteau d'un drap grossier et sombre ; le bord
de sa robe, au lieu d'être garni avec des franges
d'or et d'argent, n'en avoit que de laine. Elle
cacha ses cheveux, très-beaux encore ,se courba
sur un bâton, et attendit ainsi son jeune amant.
Dès qu'il la vit, il recula et resta muet. J'étois
témoin de cette scène. Lasthénie s'avance vers
lui, et lui demande s'il veut la conduire au
temple, ajoutant qu'elle étoit revêtue de ses
habits de noces, et conformément à son âge.
Celui-ci comprit la plaisanterie, et renonça,
quoiqu'avec peine , à ses amoureux projets.
A soixante-dix ans , elle voulut apprendre
les mathématiques, et y fit des progrés. Un
jour on lui vantoit la tranquillité, le bonheur
de sa vieillesse , dont l'approche et la perspec-
tive inspirent tant d'horreur à la plupart des
hommes. «C'est, dit-elle, que j'ai employé la
première partie de ma vie à rendre l'autre plu*
heureuse». Enfin, jusqu'à sa quatre-vingt-
cinquième année, époque de sa mort, elle
suivit, à très-peu-prés, le même système de vie
qu'elle avoit adopté à l'âge de trente ans.: elle
pouvoit dire qu'elle avoit vécu toute entière
jusqu'à son dernier jour, ayant parcouru cette
longue période sans avoir essuyé aucune ma-
ladie un peu grave.
Cette aimable philosophe eut le pressenti-