L’ÉCOLE FLORENTINE. 93
tait de lésiner avec un homme comme lui. Doni lui avait commandé une Sainte
Famille, celle-là même qui se trouve aujourd’hui dans la galerie des Offices.
L’artiste, après l’avoir terminée, la lui envoya en même temps que la « fac-
ture », qui s’élevait à 70 ducats. Ce prix parut énorme à l’amateur; aussi ne
remit-il au porteur que la somme dérisoire de 40 ducats. Réclamation immé-
diate de Michel-Ange, qui demande 100 ducats ou le renvoi du tableau. Nou-
velle proposition de Doni, qui offre 70 ducats. Exaspéré, Michel-Ange exige
140 ducats, et force fut au trop parcimonieux Mécène de s’exécuter. La maison
de Doni regorgeait d’ailleurs d’œuvres d’art, antiques ou modernes.
On le voit, la période florentine de Raphaël fut plus féconde en enseigne-
ments, en progrès techniques, qu’en succès matériels. Le jeune artiste s’élève
rapidement au rang de maître et produit des chefs-d’œuvre, sans que le gouver-
nement ou ces riches amateurs qui, après l’expulsion des Médicis, avaient pris
en main la protection des arts, les Ruccellaï, les Strozzi et autres, paraissent
se douter de sa présence. On chercherait en vain son éloge dans les écrits
dans lesquels les humanistes toscans prodiguent à des peintres du troisième
ordre les titres de Zeuxis et d’Apelle. Pas une ligne, pas un mot qui constate
les triomphes du jeune étranger. Néanmoins, Raphaël avait contracté envers
Florence une dette qu’il n’eut garde d’oublier. Jamais, sans la forte instruction
qu’il y reçut, il ne serait devenu le dessinateur incomparable qui mérita de
travailler pour Jules II et Léon X, et de fonder l’Ecole romaine.
ENFANTS JOUANT AVEC UN PORC
(Académie de Venise.)
tait de lésiner avec un homme comme lui. Doni lui avait commandé une Sainte
Famille, celle-là même qui se trouve aujourd’hui dans la galerie des Offices.
L’artiste, après l’avoir terminée, la lui envoya en même temps que la « fac-
ture », qui s’élevait à 70 ducats. Ce prix parut énorme à l’amateur; aussi ne
remit-il au porteur que la somme dérisoire de 40 ducats. Réclamation immé-
diate de Michel-Ange, qui demande 100 ducats ou le renvoi du tableau. Nou-
velle proposition de Doni, qui offre 70 ducats. Exaspéré, Michel-Ange exige
140 ducats, et force fut au trop parcimonieux Mécène de s’exécuter. La maison
de Doni regorgeait d’ailleurs d’œuvres d’art, antiques ou modernes.
On le voit, la période florentine de Raphaël fut plus féconde en enseigne-
ments, en progrès techniques, qu’en succès matériels. Le jeune artiste s’élève
rapidement au rang de maître et produit des chefs-d’œuvre, sans que le gouver-
nement ou ces riches amateurs qui, après l’expulsion des Médicis, avaient pris
en main la protection des arts, les Ruccellaï, les Strozzi et autres, paraissent
se douter de sa présence. On chercherait en vain son éloge dans les écrits
dans lesquels les humanistes toscans prodiguent à des peintres du troisième
ordre les titres de Zeuxis et d’Apelle. Pas une ligne, pas un mot qui constate
les triomphes du jeune étranger. Néanmoins, Raphaël avait contracté envers
Florence une dette qu’il n’eut garde d’oublier. Jamais, sans la forte instruction
qu’il y reçut, il ne serait devenu le dessinateur incomparable qui mérita de
travailler pour Jules II et Léon X, et de fonder l’Ecole romaine.
ENFANTS JOUANT AVEC UN PORC
(Académie de Venise.)