ET DE LA CURIOSITE
et Luc-Olivier Merson ; Muller, élève de M. Le-
fèvre ; Billotey, élève de MM. Lefèvre et Tony
Robert-Fleury ; Robiquet, élève do MM. Gormon
et Blanc ; Fenouillet, de l'atelier Cormon.
Académie des Inscriptions
Séance du 11 avril
Le relablc de Boulbon. — M. de Mély fait une
communication sur le retable de Boulbon (petit
village près de Tarascon), offert au Louvre par le
comité de l'exposition des Primitifs français.
Jusqu'ici, on no savait rien sur l'auteur de cette
belle peinture du quinzième siècle ni sur les
conditions dans lesquelles l'œuvre avait été exé-
cutée.
M. de Mély a découvert à Aix-en-Provence une
miniature signée Chugoinot et non Hugonict,
comme on l'avait cru à tort jusqu'ici. Elle porte
les armoiries du pape Nicolas Y, ce qui permet
d'en faire remonter la date entre les années 1447
à 1455 ; sur la bordure, on voit une petite cigogne,
comme dans le retable de Boulbon. M. do Mély
établit que les deux œuvres doivent être attri-
buées au même artiste, Chugoinot, dont le nom,
en vieux français, signifie « petite cigogne ».
Découvirtes d'Algérie. — M. Héron de Ville-
fosse annonce à l'Académie que M. le comman-
dant Guénin, commandant supérieur du cercle do
Tébessa, a découvert le mois dernier une basilique
située sur le nord d'un mamelon appelé Rouis,
dans la partie ouest du Bahiret cl Arneb, à
28 kilomètres environ de Tébessa. Ce qui donne
un intérêt particulier à cette découverte, c'est la
présence dans cette basilique d'une inscription
mentionnant plusieurs martyrs africains.
Une inscription mentionne trois jeunes femmes
martyrisées à Thiburbo le 30 juillet 304 : Maxima,
Donatilla et Secunda, ainsi que Vincentius et
Crispine martyrisés à Theveste le 5 décembre de
la même année, et enfin le nom de l'évèque de
Theveste, Faustinus. Cette inscription est de
l'époque byzantine.
M. Héron de Villefosse remercie M. le comman-
dant Guénin d'avoir fait connaître sans retard ce
précieux texte à l'Académie.
Le Tombeau de Raphaël
Il y a quelques années, visitant celui des jardins
du Vatican qu'on appelle II giardino délia Pigna
parce qu'on y voit une pomme de pin en bronze
qui décorait jadis le mausolée d'Adrien, j'y re-
marquai une statue grecque de Vénus mutilée,
restaurée et groupée par le restaurateur, un
Amour, statue qui offrait une frappante res-
semblance, malgré une différence importante dans
le costume, avec la Vénus de Milo. La différence
consiste en ce que la Vénus du Vatican porte un
manteau qui enveloppe sa partie inférieure avec
une tunique longue assujettie par deux ceintures
et est chaussée de sandales, tandis que la Vénus
de Milo n'a que le manteau disposé de la même
manière, et point de chaussures.
La statue du Vatican, sculpture d'un beau tra-
vail, me parait être un document d'importance
pour l'histoire et la critique de la Vénus de Milo ;
je la publiai ainsi qu'une autre toute semblable;
peut-être plus belle encore, que je découvris depuis
dans le M usée royal dos Antiques de Madrid et une
Hijgie du Palais royal de Turin, où se retrouve
encore le même type. Je fis mouler les deux statues
du Vatican et de Madrid, et les plâtres en furent
placés dans le musée de moulages qui occupe
maintenant l'ancien manège du Louvre. J'ai ex-
posé, dans l'étude sur la Vénus de Milo qui a été
imprimée dans un volume des Mémoires de l'Aca-
démie des Inscriptions, les raisons pour lesquelles
je crois que ces deux statues représentent, sous sa
forme la plus ancienne, le type auquel appartient
la Vénus de Milo. Je n'y reviendrai pas ici. Je
veux seulement rappeler que, lors d'un récent
voyage à Rome, visitant la chapelle funéraire que
Raphnël se fiteonstruiro dans l'églisede la Rotonde,
je reconnus dans la Madone do marbre qui sur-
monte le tombeau, œuvre de Lorenzetto, qu'on
appelle vulgairement la Madonna del Sasso, parce
qu'elle foule d'un pied un rocher, une évidente
imitation de la Vénus grecque que j'avais décou-
verte dans un jardin du Vatican.
J'ajoute que, selon toute apparence, ce ne fut pas
Lorenzetto qui conçut l'idée hardie de prendre mo-
dèle pour une Vierge chrétienne sur une Vénus
antique, mais que cette idée doit plutôt être attri-
buée à Raphaël lui-même dans ses fréquentes
visites au Vatican, ayant pu remarquer la Vénus
qui en ornait un des jardins et en apprécier les
hautes beautés, imagina de la faire servir à l'exé-
cution d'une Madone qui serait placée sur sa sé-
pulture, et chargea son élève de réaliser cette pen-
sée. Le monument témoignerait ainsi tout ensemble
de sa dévotion a la Vierge et de son culte pour l'art
antique.
J'ajoute encore que le type que nous ont conservé
les deux statues du Vatican et de Madrid, et duquel
dérive la Vénus de Milo, remontant, si je ne me
suis pas trompé dans mes conjectures, à Phidias,
il m'a paru qu'il n'était pas sans intérêt de montrer,
associés dans l'histoire d'un même monument, les
deux noms du grand sculpteur athénien et du grand
peintre d'Urbin.
On ne peut s'empêcher, en comparant les deux
statues, de regretter que fjorenzetto, en conservant
dans la sienne la grandeur de lignes de la Vénus
grecque, n'en ait pas gardé aussi l'élégance.
Mais Raphaël, dans les dernières années de sa
courte carrière, paraissait chercher avec prédilec-
tion l'ampleur et la puissance des formes, comme
le montrent les fresques de la Farnésine et les
mosaïques de Sainte-Marie-du-Peuple. Peut-être
l'auteur de la Madone au rocher crut-il bien faire
de suivre la direction que son maître avait défini-
tivement préférée.
F, Ravaisson-Mollien.
REVUE DES REVUES
Revue des Deux-Mondes (1" avril). — Notre
collaborateur M. Emile Mâle publie dans ce nu-
méro un nouveau chapitre de ses pénétrantes et
savantes études sur L'Art français à la fin du
Moyen âge, et cotte fois, parle de l'idée de la mort
et de la Danse macabre. Il montre, au lende-
main du xiii' siècle, où les artistes avaient repré-
senté la mort parée de sérénité et de poésie, d'ef-
et Luc-Olivier Merson ; Muller, élève de M. Le-
fèvre ; Billotey, élève de MM. Lefèvre et Tony
Robert-Fleury ; Robiquet, élève do MM. Gormon
et Blanc ; Fenouillet, de l'atelier Cormon.
Académie des Inscriptions
Séance du 11 avril
Le relablc de Boulbon. — M. de Mély fait une
communication sur le retable de Boulbon (petit
village près de Tarascon), offert au Louvre par le
comité de l'exposition des Primitifs français.
Jusqu'ici, on no savait rien sur l'auteur de cette
belle peinture du quinzième siècle ni sur les
conditions dans lesquelles l'œuvre avait été exé-
cutée.
M. de Mély a découvert à Aix-en-Provence une
miniature signée Chugoinot et non Hugonict,
comme on l'avait cru à tort jusqu'ici. Elle porte
les armoiries du pape Nicolas Y, ce qui permet
d'en faire remonter la date entre les années 1447
à 1455 ; sur la bordure, on voit une petite cigogne,
comme dans le retable de Boulbon. M. do Mély
établit que les deux œuvres doivent être attri-
buées au même artiste, Chugoinot, dont le nom,
en vieux français, signifie « petite cigogne ».
Découvirtes d'Algérie. — M. Héron de Ville-
fosse annonce à l'Académie que M. le comman-
dant Guénin, commandant supérieur du cercle do
Tébessa, a découvert le mois dernier une basilique
située sur le nord d'un mamelon appelé Rouis,
dans la partie ouest du Bahiret cl Arneb, à
28 kilomètres environ de Tébessa. Ce qui donne
un intérêt particulier à cette découverte, c'est la
présence dans cette basilique d'une inscription
mentionnant plusieurs martyrs africains.
Une inscription mentionne trois jeunes femmes
martyrisées à Thiburbo le 30 juillet 304 : Maxima,
Donatilla et Secunda, ainsi que Vincentius et
Crispine martyrisés à Theveste le 5 décembre de
la même année, et enfin le nom de l'évèque de
Theveste, Faustinus. Cette inscription est de
l'époque byzantine.
M. Héron de Villefosse remercie M. le comman-
dant Guénin d'avoir fait connaître sans retard ce
précieux texte à l'Académie.
Le Tombeau de Raphaël
Il y a quelques années, visitant celui des jardins
du Vatican qu'on appelle II giardino délia Pigna
parce qu'on y voit une pomme de pin en bronze
qui décorait jadis le mausolée d'Adrien, j'y re-
marquai une statue grecque de Vénus mutilée,
restaurée et groupée par le restaurateur, un
Amour, statue qui offrait une frappante res-
semblance, malgré une différence importante dans
le costume, avec la Vénus de Milo. La différence
consiste en ce que la Vénus du Vatican porte un
manteau qui enveloppe sa partie inférieure avec
une tunique longue assujettie par deux ceintures
et est chaussée de sandales, tandis que la Vénus
de Milo n'a que le manteau disposé de la même
manière, et point de chaussures.
La statue du Vatican, sculpture d'un beau tra-
vail, me parait être un document d'importance
pour l'histoire et la critique de la Vénus de Milo ;
je la publiai ainsi qu'une autre toute semblable;
peut-être plus belle encore, que je découvris depuis
dans le M usée royal dos Antiques de Madrid et une
Hijgie du Palais royal de Turin, où se retrouve
encore le même type. Je fis mouler les deux statues
du Vatican et de Madrid, et les plâtres en furent
placés dans le musée de moulages qui occupe
maintenant l'ancien manège du Louvre. J'ai ex-
posé, dans l'étude sur la Vénus de Milo qui a été
imprimée dans un volume des Mémoires de l'Aca-
démie des Inscriptions, les raisons pour lesquelles
je crois que ces deux statues représentent, sous sa
forme la plus ancienne, le type auquel appartient
la Vénus de Milo. Je n'y reviendrai pas ici. Je
veux seulement rappeler que, lors d'un récent
voyage à Rome, visitant la chapelle funéraire que
Raphnël se fiteonstruiro dans l'églisede la Rotonde,
je reconnus dans la Madone do marbre qui sur-
monte le tombeau, œuvre de Lorenzetto, qu'on
appelle vulgairement la Madonna del Sasso, parce
qu'elle foule d'un pied un rocher, une évidente
imitation de la Vénus grecque que j'avais décou-
verte dans un jardin du Vatican.
J'ajoute que, selon toute apparence, ce ne fut pas
Lorenzetto qui conçut l'idée hardie de prendre mo-
dèle pour une Vierge chrétienne sur une Vénus
antique, mais que cette idée doit plutôt être attri-
buée à Raphaël lui-même dans ses fréquentes
visites au Vatican, ayant pu remarquer la Vénus
qui en ornait un des jardins et en apprécier les
hautes beautés, imagina de la faire servir à l'exé-
cution d'une Madone qui serait placée sur sa sé-
pulture, et chargea son élève de réaliser cette pen-
sée. Le monument témoignerait ainsi tout ensemble
de sa dévotion a la Vierge et de son culte pour l'art
antique.
J'ajoute encore que le type que nous ont conservé
les deux statues du Vatican et de Madrid, et duquel
dérive la Vénus de Milo, remontant, si je ne me
suis pas trompé dans mes conjectures, à Phidias,
il m'a paru qu'il n'était pas sans intérêt de montrer,
associés dans l'histoire d'un même monument, les
deux noms du grand sculpteur athénien et du grand
peintre d'Urbin.
On ne peut s'empêcher, en comparant les deux
statues, de regretter que fjorenzetto, en conservant
dans la sienne la grandeur de lignes de la Vénus
grecque, n'en ait pas gardé aussi l'élégance.
Mais Raphaël, dans les dernières années de sa
courte carrière, paraissait chercher avec prédilec-
tion l'ampleur et la puissance des formes, comme
le montrent les fresques de la Farnésine et les
mosaïques de Sainte-Marie-du-Peuple. Peut-être
l'auteur de la Madone au rocher crut-il bien faire
de suivre la direction que son maître avait défini-
tivement préférée.
F, Ravaisson-Mollien.
REVUE DES REVUES
Revue des Deux-Mondes (1" avril). — Notre
collaborateur M. Emile Mâle publie dans ce nu-
méro un nouveau chapitre de ses pénétrantes et
savantes études sur L'Art français à la fin du
Moyen âge, et cotte fois, parle de l'idée de la mort
et de la Danse macabre. Il montre, au lende-
main du xiii' siècle, où les artistes avaient repré-
senté la mort parée de sérénité et de poésie, d'ef-