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les recherches que j’ai faites à ce sujet ne m’ont conduit à en retrouver
nulle part une gravure.
Ces fragments passent pour avoir été découverts dans les fouilles de la
cathédrale (1), qu’une tradition constante depuis le moyen âg-e, mais
dépourvue de toute preuve, prétend occuper l’emplacement d’un temple de
Minerve. Notre planche 5 représente le premier d’entre eux, l’autel de la
porte de la Libreria, tel qu’on peut le voir aujourd’hui, engdobé dans la
décoration architecturale de la Renaissance. C’est un morceau d’un sérieux
mérite d’art, dont les Allemands ont justement apprécié la valeur en le fai-
sant mouler il y a deux ans pour le Musée de Berlin. On doit le rapporter
au premier siècle de l’existence de la colonie de Sena Julia.
Cet autel est un spécimen des mieux réussis du g-enre de décoration
exubérante, un peu surcharg-ée dans sa richesse étoffée, que les Romains
firent succéder à la sobriété grecque et qu’appréciaient particulièrement
les artistes italiens du xve siècle; car ce g’enre répondait à leur g"oût et ils
l’imitaient d’autant plus volontiers que leurs propres tendances les poussaient
dans cette voie. Aussi, dans la création de l’ornementation extérieure de la
porte qui donne accès du Dôme dans la Libreria, l’autel que nous publions,
mis en œuvre pour supporter une des colonnes, a-t-il été,—si l’on peut em-
prunter cette comparaison à la musique, — comme le thème fondamental
qui se développe ensuite en élég’antes variations et qui sert de point de
départ à tout le reste.
Les festons de feuillages et de fruits décorant les trois faces aujourd’hui
visibles (la quatrième est engagée dans la muraille et cachée), les lions
ailés et cornus placés aux angles dans le registre inférieur, sont d’un
g-rand caractère, d’une exécution large et puissante. Au-dessus du feston
principal, dans la courbe qu’il dessine, on voit sur chaque face un sujet
mythologique de proportions restreintes. Ceux qui se distinguent sur notre
gravure montrent à la face antérieure une Néréide assise sur la croupe d'un
Triton, et à l’une des faces antérieures Hercule portant sur ses épaules le san-
glier d’Erymanthe, qu’il a capturé. Dans le premier sujet, on remarquera,
comme une particularité nouvelle et intéressante, la façon dont la nageoire
caudale, par laquelle se termine la portion ichthyomorphe du corps du
Triton, au lieu d’avoir la forme ordinaire, imitée de celle que l’on observe
dans la réalité chez les poissons, se déploie en imitant des feuillages marins,
ceux d’une des alg-ues les plus répandues dans toutes les mers des climats
tempérés, le Fucus vesicidosus de Linné. Marius BOUSSIGUES.
(1) On raconte ordinairement la même chose
du beau et célèbre groupe des trois Grâces, si
longtemps placé au centre de la salle de la Libreria
et aujourd’hui transporté dans le Musée de l’œu-
vre du Dôme. Mais ici la prétendue tradition n’est
qu’une légende sans valeur, car il est établi au-
jourd’hui, par des documents positifs, que le
roupe des Grâces provient de Rome, où le car-
inal Francesco Piccolomini le conserva un cer-
tain temps dans son palais avant de le faire trans-
porter à Sienne. Voyez la note de la dernière
édition de Vasari par MM. Milanesi et Pini (Flo-
rence, 1849), t. V, p. 267 ; et Gruyer, Raphaël et
l’antiquité, t. I , p. 230.
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les recherches que j’ai faites à ce sujet ne m’ont conduit à en retrouver
nulle part une gravure.
Ces fragments passent pour avoir été découverts dans les fouilles de la
cathédrale (1), qu’une tradition constante depuis le moyen âg-e, mais
dépourvue de toute preuve, prétend occuper l’emplacement d’un temple de
Minerve. Notre planche 5 représente le premier d’entre eux, l’autel de la
porte de la Libreria, tel qu’on peut le voir aujourd’hui, engdobé dans la
décoration architecturale de la Renaissance. C’est un morceau d’un sérieux
mérite d’art, dont les Allemands ont justement apprécié la valeur en le fai-
sant mouler il y a deux ans pour le Musée de Berlin. On doit le rapporter
au premier siècle de l’existence de la colonie de Sena Julia.
Cet autel est un spécimen des mieux réussis du g-enre de décoration
exubérante, un peu surcharg-ée dans sa richesse étoffée, que les Romains
firent succéder à la sobriété grecque et qu’appréciaient particulièrement
les artistes italiens du xve siècle; car ce g’enre répondait à leur g"oût et ils
l’imitaient d’autant plus volontiers que leurs propres tendances les poussaient
dans cette voie. Aussi, dans la création de l’ornementation extérieure de la
porte qui donne accès du Dôme dans la Libreria, l’autel que nous publions,
mis en œuvre pour supporter une des colonnes, a-t-il été,—si l’on peut em-
prunter cette comparaison à la musique, — comme le thème fondamental
qui se développe ensuite en élég’antes variations et qui sert de point de
départ à tout le reste.
Les festons de feuillages et de fruits décorant les trois faces aujourd’hui
visibles (la quatrième est engagée dans la muraille et cachée), les lions
ailés et cornus placés aux angles dans le registre inférieur, sont d’un
g-rand caractère, d’une exécution large et puissante. Au-dessus du feston
principal, dans la courbe qu’il dessine, on voit sur chaque face un sujet
mythologique de proportions restreintes. Ceux qui se distinguent sur notre
gravure montrent à la face antérieure une Néréide assise sur la croupe d'un
Triton, et à l’une des faces antérieures Hercule portant sur ses épaules le san-
glier d’Erymanthe, qu’il a capturé. Dans le premier sujet, on remarquera,
comme une particularité nouvelle et intéressante, la façon dont la nageoire
caudale, par laquelle se termine la portion ichthyomorphe du corps du
Triton, au lieu d’avoir la forme ordinaire, imitée de celle que l’on observe
dans la réalité chez les poissons, se déploie en imitant des feuillages marins,
ceux d’une des alg-ues les plus répandues dans toutes les mers des climats
tempérés, le Fucus vesicidosus de Linné. Marius BOUSSIGUES.
(1) On raconte ordinairement la même chose
du beau et célèbre groupe des trois Grâces, si
longtemps placé au centre de la salle de la Libreria
et aujourd’hui transporté dans le Musée de l’œu-
vre du Dôme. Mais ici la prétendue tradition n’est
qu’une légende sans valeur, car il est établi au-
jourd’hui, par des documents positifs, que le
roupe des Grâces provient de Rome, où le car-
inal Francesco Piccolomini le conserva un cer-
tain temps dans son palais avant de le faire trans-
porter à Sienne. Voyez la note de la dernière
édition de Vasari par MM. Milanesi et Pini (Flo-
rence, 1849), t. V, p. 267 ; et Gruyer, Raphaël et
l’antiquité, t. I , p. 230.