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Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux — 4.1878

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Mansell, C. –W.: Les premiers êtres vivants: d'après la tradition chaldéo-babylonienne
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https://doi.org/10.11588/diglit.24674#0139

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répare le mal que produisent les démons, il s’est fait le législateur des hommes. Mais
Tiamat, la source encore confuse d’où toutes choses sont sorties, jalouse des dieux
émanés d’elle, qui ont organisé l’univers et mis fin au chaos où elle régnait seule, se
déclare leur ennemie. Elle tente les hommes et les induit à désobéir aux préceptes
de Ea. Le péché est ainsi introduit pour la première fois dans le monde. Il faut faire
cesser ce désordre, et, pour réduire à l’impuissance Tiamat, il s’engage une grande
lutte entre les deux mondes du ciel et des enfers, de la lumière et des ténèbres, lutte
qui est comme la Gigantomacliie des traditions chaldéennes. Dans cette lutte, Marou-
douk, suscité par son père, est le champion des dieux. Ceux-ci l’arment de la foudre
et de la harpe, et à la tête des légions des anges, il va combattre Tiamat, suivie de
l’armée des démons et des êtres monstrueux nés dans le chaos. Tiamat est vaincue
et rejetée dans l’abîme inférieur.

On le voit, la principale différence qu’offre avec ce récit d’Orchoé celui de Baby-
lone et de Borsippa, recueilli par Bérose, consiste en ce que la lutte contre Tiamat
s’y confond avec l’œuvre de la création, dont elle est le mode. De plus, le rôle de
tous les autres dieux s’y efface devant celui de Bel Maroudouk, le dieu spécial de Ba-
bylone, qui devient le seul démiurge. Mais, bien qu’un tel point de vue soit fortpeu
développé dans la narration orchoénienne, il est une donnée commune aux deux ré-
cits, sur laquelle nous voulons insister ici : c’est celle d’une première génération
titanique et monstrueuse d’êtres vivants, développée dans le sein du chaos bien avant
l’apparition des êtres de la création acLuelle, et dans laquelle toutes les formes de la
nature étaient confondues.Ces habitants monstrueux du chaos, formés à son image,
n’ont pas survécu à l’état confus dans lequel ils avaient pris naissance ; incapables de
supporter l’éclat de la lumière, ils se sont évanouis quand les dieux qui représentent
un développement plus parfait ont organisé l’univers, séparé le ciel de la terre, la
lumière des ténèbres. Tiamat, leur mère et leur reine, les a alors entraînés avec elle
dans l’abîme infernal où elle est désormais reléguée ; là ils se confondent avec les
démons et demeurent comme eux les adversaires des dieux célestes.

La fin de la sixième tablette ou du sixième chant de l’épopée d’Izdhubar, dont la
rédaction parvenue jusqu’à nous est manifestement d’origine orchoénienne, repré-
sente Istar, irritée d’avoir vu son amour méprisé par le héros et se préparant à des-
cendre dans la demeure des morts, dans le « Pays sans retour » (en accadien kur
nugâ, en assyrien irçit la tarai), correspondant au schéôl hébraïque, pour y chercher
l’époux de sa jeunesse, Doumouzi ou Tammouz (1), qui a été frappé dans la sombre
forêt d’Eridhou, « dans le cœur de laquelle aucun homme n’a pénétré », où se trouve
« le centre de la terre » et « la couche de Zikoum, la mère primordiale de tous les
dieux et de tous les êtres », autre forme de Tiamat. Cette déesse y repose au pied du
pin mystérieux, de l’arbre géant et cosmique, dont les fruits sont « d’onyx bril-
lant », qui étend son ombre sur le monde entier comme le frêne Yggdrasil de la
mythologie Scandinave, tandis que ses racines plongent « dans l’abîme inférieur » (2).

(1) On sait que celte Descente d’Istar aux Enfers
est le sujet d’un poëme particulier et désormais
célèbre, qui a été l’objet des études successives de
MM. Schradsr, F. Lenormant, G. Smith , Oppert
et Friedrich Delitzsch. Le texte en est publié dans
les Cuneiform inscriptions of Western Asia,
t. IV, pl. 31.

(2) Nous empruntons ces traits au début d un
hymne publié dans les Cuneif. inscr. of IL est. As.,

t. n, pi. 15, col. 2, 1. 62-91; voy. Sayce, dans les
Records of the past, t. IX, p. 146 — La sombre
forêt d'Eridhou, de ce morceau lyrique, n’est cer-
tainement pas une localité réelle des en\irons de
la ville d’Eridhou, la Rata de Ptolémée, près du
golfe Persique, siège principal du culte de Êa.
C’est une localité de la pure géographie mystique,
une autre forme d’expression de la demeure des
ténèbres où réside Tiamat. — La donnée de l’arbre

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