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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 20.1879

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Nr. 4
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Gueullette, Charles: Mademoiselle Constance Mayer et Prud'hon, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.22840#0366

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

se composait que de son atelier et d'un cabinet où était son lit ; celui
de Mlle Mayer, dans un autre corps de logis, était un appartement de
plusieurs petites pièces, mais commodes. Elle travaillait dans l'atelier de
son maître; il mangeait chez elle, et, absorbé qu'il était par son art, il
laissait à son amie le soin de tout le reste. Elle s'en acquitta avec la pas-
sion qu'elle mettait à toutes choses. C'était une nature ardente et sensible
qui s'identifiait avec tout ce qu'elle aimait. Elle ne vécut plus que pour
et par Prud'hon. Son talent même devint comme un reflet de celui du
maître. 11 paraît, du reste, que cette disposition d'imitation lui était natu-
relle. Elle avait été élève de Greuze avant de l'être de Prud'hon, et alors
elle faisait du Greuze ; car je tiens d'elle-même que plusieurs des têtes
qui passent dans le commerce des tableaux pour des Greuze sont d'elle
ou de MUe Ledoux, autre élève du même maître. Que vous dirai-je
encore, monsieur? J'ai vu souvent, durant bien des années, Prud'hon et
son élève, car ils étaient inséparables, soit chez mon père, soit chez eux.
J'ai passé de longues heures dans leur atelier, à les voir travailler l'un
et l'autre sans avoir à en dire rien de particulier. Entre eux le ton était,
du côté de Prud'hon, celui d'une affection sérieuse et tranquille; plus
vif chez MJh Mayer, il avait quelque chose de la sollicitude maternelle.
Mais il n'y avait de part ni d'autre aucune familiarité. Elle disait « mon-
sieur Prud'hon », lui l'appelait « mademoiselle ». Les amis étaient tou-
jours les bienvenus.

« Mlle Mayer, sans être jolie, avait une de ces figures que l'on n'oublie
point. Elle était de taille moyenne, un peu forte, très brune de cheveux
et de teint; ses yeux noirs étaient d'autant plus brillants qu'ils se mouil-
laient à la moindre émotion. La coupe de ses traits, l'expression de son
visage, par un hasard singulier, rappelaient les figures de Prud'hon, ce
qui a fait dire à tort qu'elle les avait inspirées. Ce caractère de tête
appartenait à Prud'hon, bien avant qu'il connût Mlle Mayer. Il lui venait
d'une statue antique qui était l'objet de sa prédilection particulière et
qu'il avait beaucoup étudiée, celle du petit Faune.

« Voilà, monsieur, tout ce que je puis dire d'une personne que j'ai
longtemps connue et beaucoup aimée. Quant à des lettres, je n'ai vu
d'elle que des billets insignifiants, comme on en écrit à propos d'une
invitation ou de quelque événement de famille entre amis qui se voient
souvent.

« Je ne vous parle pas de sa fin tragique, les détails en ont été publiés.
Les causes de ce suicide ne peuvent être que conjecturées. Elle était à
une époque de la vie où la santé des femmes subit une crise dangereuse;
à ce moment, elle fut victime d'un vol domestique qui l'affecta beaucoup.
 
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