GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
ZiO
malade, lui confia le soin d’accompagner l’illustre maître : tous deux
voyagèrent de concert pendant quatorze jours, et Sandrart, alors enthou-
siaste et jeune, a consigné dans son gros livre le souvenir des bonnes
choses qui lui furent dites par Rubens sur l’art et sur les artistes. 11 ne
le quitta qu’à la frontière du Brabant1. Mais, je le répète,, l’histoire du
voyage de Rubens en Hollande n’est malheureusement pas précisée. Il
faudra regretter toujours qu’il n’ait point griffonné quelques notes pen-
dant cette excursion ou que ces notes aient été perdues.
De retour à Anvers, Rubens reprend sa correspondance avec ses
savants amis ; il leur demande les livres nouveaux, il leur fait passer ceux
qu’il peut se procurer. Mais ni les joies de l’érudition ni les curiosités de
la littérature ne parviennent à distraire sa pensée du mouvement
politique et des détails militaires; il enregistre avec soin les allées et
venues de la flotte anglaise ; il suit avec une passion qui ne se lasse pas
les péripéties de l’interminable siège de la Rochelle, et il interroge les
événements au point de vue de sa préoccupation constante, qui est la
réconciliation de deux royaumes. Il écrit souvent à Gerbier ; mais les
maîtres au nom desquels il aurait aimé à parler avec décision sont en
proie à toutes les incertitudes. Le duc d'Olivarès est hostile; il ne veut
pas du raccommodement; la cour de Madrid va même jusqu’à examiner
de nouveau le projet d’une descente en Angleterre. Pour se consoler,
Rubens affecte de dire que ces perpétuelles menaces du comte-duc ne
sont qu’un « tonnerre sans foudre » ; au fond de l’âme, le peintre est
mécontent de ses souverains ; il éprouve un certain dépit à la pensée
qu’une affaire à laquelle il s’est mêlé si ardemment pourrait ne pas
aboutir, et il se réfugie dans la sérénité de sa conscience (septembre
1627).
Buckingham et son roi avaient cependant de grands ennuis; humiliés
de l’insuccès de leur tentative contre l’île de Ré, ils ne renonçaient pas
à l’espoir d’un arrangement avec l’Espagne. L’Infante, de son côté, y
songeait toujours. Après s’être munie de l'autorisation de Philippe IV,
elle lui envoya, le 3 janvier 1628, Ambroise Spinola, qui avait mission
d’exposer verbalement au roi la situation réelle des affaires et de tâcher
de vaincre ses hésitations. Cette démarche ne fut pas inutile, car bientôt
Spinola put écrire à Rubens que Philippe IV faisait paraître au sujet de la
paix des dispositions meilleures.
Six mois se passèrent cependant sans que les intéressés parvinssent
à prendre une résolution définitive. Tout le premier semestre de 1628
\. Academia artis picloriœ. Nuremberg, ^ 683.
ZiO
malade, lui confia le soin d’accompagner l’illustre maître : tous deux
voyagèrent de concert pendant quatorze jours, et Sandrart, alors enthou-
siaste et jeune, a consigné dans son gros livre le souvenir des bonnes
choses qui lui furent dites par Rubens sur l’art et sur les artistes. 11 ne
le quitta qu’à la frontière du Brabant1. Mais, je le répète,, l’histoire du
voyage de Rubens en Hollande n’est malheureusement pas précisée. Il
faudra regretter toujours qu’il n’ait point griffonné quelques notes pen-
dant cette excursion ou que ces notes aient été perdues.
De retour à Anvers, Rubens reprend sa correspondance avec ses
savants amis ; il leur demande les livres nouveaux, il leur fait passer ceux
qu’il peut se procurer. Mais ni les joies de l’érudition ni les curiosités de
la littérature ne parviennent à distraire sa pensée du mouvement
politique et des détails militaires; il enregistre avec soin les allées et
venues de la flotte anglaise ; il suit avec une passion qui ne se lasse pas
les péripéties de l’interminable siège de la Rochelle, et il interroge les
événements au point de vue de sa préoccupation constante, qui est la
réconciliation de deux royaumes. Il écrit souvent à Gerbier ; mais les
maîtres au nom desquels il aurait aimé à parler avec décision sont en
proie à toutes les incertitudes. Le duc d'Olivarès est hostile; il ne veut
pas du raccommodement; la cour de Madrid va même jusqu’à examiner
de nouveau le projet d’une descente en Angleterre. Pour se consoler,
Rubens affecte de dire que ces perpétuelles menaces du comte-duc ne
sont qu’un « tonnerre sans foudre » ; au fond de l’âme, le peintre est
mécontent de ses souverains ; il éprouve un certain dépit à la pensée
qu’une affaire à laquelle il s’est mêlé si ardemment pourrait ne pas
aboutir, et il se réfugie dans la sérénité de sa conscience (septembre
1627).
Buckingham et son roi avaient cependant de grands ennuis; humiliés
de l’insuccès de leur tentative contre l’île de Ré, ils ne renonçaient pas
à l’espoir d’un arrangement avec l’Espagne. L’Infante, de son côté, y
songeait toujours. Après s’être munie de l'autorisation de Philippe IV,
elle lui envoya, le 3 janvier 1628, Ambroise Spinola, qui avait mission
d’exposer verbalement au roi la situation réelle des affaires et de tâcher
de vaincre ses hésitations. Cette démarche ne fut pas inutile, car bientôt
Spinola put écrire à Rubens que Philippe IV faisait paraître au sujet de la
paix des dispositions meilleures.
Six mois se passèrent cependant sans que les intéressés parvinssent
à prendre une résolution définitive. Tout le premier semestre de 1628
\. Academia artis picloriœ. Nuremberg, ^ 683.