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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 4.1890

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Nr. 4
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Fourcaud, Louis de: François Rude, 9
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https://doi.org/10.11588/diglit.24448#0360

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328

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

blir entre nous des malentendus : vous me saurez gré de vous parler
sans détour. Je dois vous prévenir, avant tout, que je n’entends pas
l’office d’un chef d’atelier à la manière de tout le monde. D’ordinaire,
lorsqu’un groupe de jeunes gens se place sous la direction d’un
maître, le maître attend de ses élèves la popularité, de même qu’ils
attendent de lui la protection. Ce compromis vulgaire peut être
nuisible à l’éclosion des talents, il ne lui est jamais favorable et je
n’en veux, pour mon compte, à aucun prix. Vous me donnez, en
recourant à moi, une marque de haute estime, une preuve de con-
fiance qui me touche bien vivement : cela me suffit. Je redoute des
coteries, je fais de mon mieux pour me contenter moi-même; soyez
assurés que je n’ai pas besoin d’éloges de convenance ou de complai-
sance. De deux choses l’une : mes œuvres valent qu’on les loue — et
j’accepte, en ce cas, avec gratitude et avec plaisir la louange spon-
tanée — ; ou elles ne le valent pas — et, en ce cas, visant à m’élever
plus haut, je n’ai que faire d’approbations factices, de nature à
m’égarer. Voilà pour ce qui me concerne. Quant à vous, mes amis, à
supposer que vous deveniez mes élèves, dites-vous bien que je n’aurai
jamais ni le crédit, ni le goût de vous pousser vis-à-vis du public et
de l’administration. Je ne suis pas membre de l’Institut et je ne le
serai probablement jamais, — ce qui vous montre mon isolement.
Sans compter qu’il se pourrait que mon aversion, très souvent
exprimée, pour les théories académiques, vous fût imputée à crime.
Je n’ose presque plus envoyer au Salon, de crainte d’être refusé comme
Barye, comme Du Seigneur, comme Maindron, comme tous ceux qui
se détournent des chemins battus. Combien il me serait pénible de
vous voir exclus de l’exposition à cause de moi! D’autre part, fussé-je
en situation de vous favoriser, je ne vous dissimule pas que je m’en
ferais scrupule, car toute faveur est un manquement à la justice,
laquelle est supérieure à tout. Hors de l’atelier, je serai votre
camarade, votre compagnon dévoué, mais, où que ce soit, ne faites
fonds sur ma bonne volonté pour vous ménager un passe-droit
quelconque. J’ai une devise qui me plaît : « A chacun selon ses
œuvres, » et je m’y tiens. Cela dit, s’il vous faut, pour vous diriger
en vos études, un homme sans préjugé, amoureux du vrai, attentif à
vos efforts, aussi désireux que vous-mêmes de voir s’accuser votre
tempérament individuel et parfaitement résolu à écarter de vous
toute influence extérieure, fût-ce la sienne, prenez ma main : je suis
cet homme-là. Le meilleur enseignement est celui qui donne aux
élèves les plus grands moyens d’émancipation et leur fait contracter
 
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