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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 4.1890

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Nr. 5
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Bouchot, Henri: Jean Foucquet, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24448#0455

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418

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Il historia, dans le courant de l’année 1469, un manuscrit de Boccace
pour le compte de son Mécène, Étienne Chevalier, sur le Cas des
nobles malheureux. Ce livre est en Allemagne encore, à Munich, et
renferme la plus étourdissante composition sortie de son pinceau.
Les nobles malheureux, quel thème pour lui qui venait précisément
d’assister au procès du comte d’Alençon ! Il ne manqua point d’en
écrire l’attirail pompeux en frontispice, la salle tendue de tapisse-
ries où siégeaient les juges du prince félon. En cette page de trente
centimètres carrés à peine, il enferma une foule énorme de trois
cents personnes, reconnaissables toutes, prises sur le vif, dans leurs
attitudes variées naturelles et recueillies. Et ce n’est pas le cénacle
de ces hommes graves qui nous doit le plus séduire, mais bien plutôt
la cohue bigarrée des assistants debout, repoussée par les massiers,
foule moderne habituée de nos cours de Justice, avide de tournois,
houleuse, ronronnante et passionnée.

Je reporterais volontiers à ce temps le portrait du chancelier
Jouvenel des Ursins conservé au Louvre. Jouvenel avait tenu une
grande autorité dans le procès, il siégeait le premier aux pieds du
roi, à gauche du bâtard d’Orléans; Foucquet le dut surprendre ainsi
et, sur une ou deux poses, l’amener à sa perfection. Que de fois ce
gros homme vigoureux, aux chairs rosées, réapparaîtra plus tard
dans les inventions du Tourangeau! Tous le verriez à la suite des
rois, avec des apparences de Falstaff joyeux; il sent le grand air,
la vie active, les harnais de guerre, car il n’était pas seulement
garde des sceaux de France, mais pour le moins autant chevalier et
batailleur. Le fond d’or sur lequel il ressort en sombre est d’impor-
tation italienne, l’artiste devait cette gâterie au pseudo-descendant
des Orsini romain, au roturier prétentieux affublé de titres sonores.

Avant que de pleurer tant d’autres richesses disparues, — le
livre d’heures commandé à Foucquet pour Marie de Clèves, duchesse
d’Orléans, celui de Jean Moreau, bourgeois de Tours, — il faudrait
qu’un chercheur maniât l’un après l’autre les livres enluminés
de nos grandes bibliothèques. Voici pour l’instant un manuscrit
inconnu aux historiens du peintre, indiscutablement décoré par
lui, dont les cinquante-trois vignettes serviraient à nous consoler
un peu des pertes passées ; ce sont les Grandes chroniques de France,
cataloguées à la Bibliothèque nationale sous le numéro 6,465 du

tione Turonica (Ap. I). Marlène, Hist. de Mar moût ier II, pièce 308). « Ce Foucquet,
dit-il en latin, Tourangeau de naissance, est facilement le premier des peintres, je
ne dirai pas seulement de son temps, mais de tous les temps! »
 
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