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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 6.1891

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Nr. 1
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Rod, Édouard: Les salons de 1891 au Champ-de-Mars et aux Champs-Élysées, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24450#0014

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GAZETTE DES BEAUX-A 11TS.

opaques de nénuphars flottent surune mare étendue au soleil couchant.
Un autre vase évoque avec un charme indicible l’impression mélan-
colique d’un ciel d’hiver et d’une couche de neige fraîchement tombée
sur laquelle on peut suivre « les pas étoilés des oiseaux ». — Il est
impossible d’exprimer par des mots la puissance suggestive de cet art
dont M. Gallé a le mérite d’être l’absolu créateur. Il est arrivé à
représenter aux yeux, non des formes, mais des sensations; et aux
objets qu’il fixe dans ses cristaux, il laisse tout leur mystère, la
rêverie qu’ils comportent, l’infini qui les enveloppe, les correspon-
dances intimes et insaisissables qu’ils ont entre eux. On ne saurait
unir une imagination plus riche à une sensibilité plus délicate, plus
frémissante au choc de tout ce qui se voit et de tout ce qui se cache
derrière les choses visibles; et l'on n’a jamais fait entrer dans l’âme
par les yeux des impressions plus mystérieuses, qui ressemblent à
celles qu’éveillent les musiques les plus suggestives. M. Gallé me
semble une sorte de Schumann, je ne vois jamais un de ses chefs-
d’œuvre sans me demander par quelle magie il arrive ainsi à chanter
ses rêves avec une matière brute, à laquelle ses fours donnent une
âme et un esprit.

Tout autres sont les qualités des vases de M. Delaherche. Ceux-là
visent avant tout à la décoration, et leurs tons savants semblent des-
tinés à compléter, dans des salons élégants, les effets des belles
étoffés. L’éminent céramiste réussit surtout lorsqu’il oublie les grès
japonais, dont il cherche volontiers à se rapprocher, pour s’aban-
donner à sa propre fantaisie. Les nombreux vases, de tout format,
qu’il a exposés, donnent une haute idée de son activité et de son
esprit de recherches : il en est, dans ce nombre, qui sont vraiment
fort beaux.

On remarquera aussi les objets en émaux translucides, sertis d’or
à la manière de la coupe sassanide de la Bibliothèque nationale, de
M. Thesmar. Ce sont des pièces de décor oriental, dont une au moins,
une coupe jaune clair décorée de branches de gui avec leurs graines,
est absolument exquise. Cette intéressante tentative, de laquelle on
peut rapprocher les petits candélabres à branches de tulipes et les
coupes d’orfèvrerie décorées de fleurs indigènes de M. Falize, nous
montre tout le parti que l’art décoratif peut tirer de l’observation
directe de la nature.

Je citerai encore le vitrail et les cartons de vitraux de M. Besnard,
dans lesquels le puissant artiste — que nous retrouvons plus loin —
affirme sous une forme nouvelle la richesse dé son sens coloriste, et
 
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