ALEXANDRE BENING.
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c’est un sentiment tout aussi profond de la nature, mais d’une
nature plus souriante, plus aimable, plus épanouie, respirant plus la
joie et l’abondance.
L’école précédente, du temps des ducs de Bourgogne, éveille
le souvenir de Rogier Van der Weyden et de Dirk Bouts. La
nouvelle, au contraire, fait penser à Memling, à Quentin Metsys, et
un peu plus tard à Mabuse et à Van Orley. Cette évolution se com-
plète par l’adoption définitive, pour les bordures et toute la partie
décorative, de ce système, fondé sur l’imitation aussi parfaite que
possible de la réalité, dont j’ai eu occasion d’exposer le principe et
de noter l’apparition.
Or, les qualités caractéristiques de toute cette jeune école de la
fin du xve siècle et du commencement du xvie, que l’on peut appeler,
d’aprèssacréationtype, l’Ecole du bréviaireGrimani, sont précisément
aussi celles qui établissent la différence entre les dernières œuvres du
maitre du Boëce et ses productions plus anciennes. Leur auteur est
donc comme un trait d’union entre deux générations d’enlumineurs.
Encore soumis à ses débuts aux vieilles traditions gothiques, il
nous apparaît, à la fin de sa carrière, rallié aux principes qui
triomphent avec la Renaissance du xvie siècle. La suite des volumes
auxquels il a travaillé présente, dans son ensemble, le tableau
complet de toutes les phases successives de cette rénovation dans
l’art de la miniature. On peut y saisir les modifications amenées par
les tendances nouvelles, à leurs divers degrés d’avancement, se
développant suivant un ordre en quelque sorte logique et naturel,
qui correspond à l’épanouissement de plus en plus accentué du
talent de l’artiste. Le maître du Boëce occupe par conséquent, parmi
les miniaturistes de la Flandre, la place d’un promoteur de mouve-
ment, d’un initiateur qui a hardiment rompu avec des dogmes
surannés pour entrer dans une voie de progrès où de nombreux
adeptes l’ont suivi. S’il n’a peut-être pas fondé à lui seul l’école du
Bréviaire Grimani, il en a du moins été l’un des plus anciens chefs et
il en est resté un des plus brillants représentants.
Toutes les circonstances concourent, on le voit, à attacher un
prix tout particulier à la solution du problème que soulève l’attribu-
tion des miniatures du Boëce et des autres peintures de la même
main. Fixer l’identité de leur auteur, ce ne serait pas seulement
donner satisfaction à la curiosité, ce serait apporter un élément
nouveau d’une réelle importance à l’histoire de l’art flamand, pris
dans une de ses branches les plus florissantes.
VI. — 3' PÉRIODE.
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c’est un sentiment tout aussi profond de la nature, mais d’une
nature plus souriante, plus aimable, plus épanouie, respirant plus la
joie et l’abondance.
L’école précédente, du temps des ducs de Bourgogne, éveille
le souvenir de Rogier Van der Weyden et de Dirk Bouts. La
nouvelle, au contraire, fait penser à Memling, à Quentin Metsys, et
un peu plus tard à Mabuse et à Van Orley. Cette évolution se com-
plète par l’adoption définitive, pour les bordures et toute la partie
décorative, de ce système, fondé sur l’imitation aussi parfaite que
possible de la réalité, dont j’ai eu occasion d’exposer le principe et
de noter l’apparition.
Or, les qualités caractéristiques de toute cette jeune école de la
fin du xve siècle et du commencement du xvie, que l’on peut appeler,
d’aprèssacréationtype, l’Ecole du bréviaireGrimani, sont précisément
aussi celles qui établissent la différence entre les dernières œuvres du
maitre du Boëce et ses productions plus anciennes. Leur auteur est
donc comme un trait d’union entre deux générations d’enlumineurs.
Encore soumis à ses débuts aux vieilles traditions gothiques, il
nous apparaît, à la fin de sa carrière, rallié aux principes qui
triomphent avec la Renaissance du xvie siècle. La suite des volumes
auxquels il a travaillé présente, dans son ensemble, le tableau
complet de toutes les phases successives de cette rénovation dans
l’art de la miniature. On peut y saisir les modifications amenées par
les tendances nouvelles, à leurs divers degrés d’avancement, se
développant suivant un ordre en quelque sorte logique et naturel,
qui correspond à l’épanouissement de plus en plus accentué du
talent de l’artiste. Le maître du Boëce occupe par conséquent, parmi
les miniaturistes de la Flandre, la place d’un promoteur de mouve-
ment, d’un initiateur qui a hardiment rompu avec des dogmes
surannés pour entrer dans une voie de progrès où de nombreux
adeptes l’ont suivi. S’il n’a peut-être pas fondé à lui seul l’école du
Bréviaire Grimani, il en a du moins été l’un des plus anciens chefs et
il en est resté un des plus brillants représentants.
Toutes les circonstances concourent, on le voit, à attacher un
prix tout particulier à la solution du problème que soulève l’attribu-
tion des miniatures du Boëce et des autres peintures de la même
main. Fixer l’identité de leur auteur, ce ne serait pas seulement
donner satisfaction à la curiosité, ce serait apporter un élément
nouveau d’une réelle importance à l’histoire de l’art flamand, pris
dans une de ses branches les plus florissantes.
VI. — 3' PÉRIODE.
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