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GAZETTE DES BEAUX-AIITS.
dolid où allait avoir lieu sa rencontre avec le roi, ne pouvait donner
naissance à aucune entreprise développée. A l’encontre du monarque
peu soucieux, à ce qu’il semble, de rehausser par les arts l’éclat déjà
bien effacé de son règne, le duc de Lerrne, son premier ministre, se
fît le promoteur de quelques travaux dont, au surplus, l’intérêt
d’histoire prime la valeur intrinsèque. Le Prado conserve une suite
des figures à?Apôtres que Rubens, dans une lettre à sir Dudley Carie-
ton, dit avoir peinte pour le duc de Lerme, en Espagne même, peut-
être en Italie à son retour. La série se répète à Rome, dans le Casino
du palais Rospigliosi. Elle fut gravée à Anvers. Les figures à mi-corps
sont imposantes, surtout par leur grandeur, mais d’une froideur
rem arquable.
De la même époque dateraient, d’après le catalogue, deux autres
toiles : Heraclite et Démocrite, assertion fondée sur le passage d’une
lettre de l’envoyé de Mantoue près la Cour d’Espagne. Ces amples
figures de philosophes allèrent, sous le règne de Philippe IV, orner
la Torre de la Parada où, pour leur servir de pendants, l’on exposa
les magnifiques morceaux d'Esope et de Mênippe de Vélasquez. Je ne-
puis me défendre de croire que, dans leur état présent, elles sont le
fruit d’une retouche contemporaine du second voyage du maître en
Espagne, sinon plus tardive encore.
Le Prado possède de Rubens d’autres peintures antérieures à sa
seconde venue en Espagne, mais elles y sont arrivées par voie indi-
recte. Ainsi, le grandiose ensemble de Saint Georges combattant le
dragon, est de toute évidence une œuvre de jeunesse; M. Rooses la
suppose antérieure même au retour d’Italie et, en effet, l’exécution
se caractérise par une sûreté de lignes, qui, chez Rubens, est l’indice
constant d’une période peu avancée de sa carrière. Cela n’empêche que
déjà, vraiment, nous sommes en présence d’un maitre. La vaste toile
prit place dans les collections royales après la mort de son auteur.
J en ai vu, au Musée de Naples, une première version aussi grande
que le tableau de Madrid.
Les Rubens d Espagne ont de tout temps intéressé la critique.
Cumberland en décrit avec enthousiasme plusieurs, et tout spéciale-
ment une immense Adoration des Mages d’autant plus frappante qu’elle
a moins de réputation. Aussi Clément de Ris, Waagen et bien d’autres
se complaisent-ils à en souligner les mérites.
Le tableau dont il s’agit et que reproduit notre planche manque
dans la série des compositions que le grand Anversois livra au burin
de ses graveurs. Outre qu’à l’époque où l’œuvre voyait le jour il
GAZETTE DES BEAUX-AIITS.
dolid où allait avoir lieu sa rencontre avec le roi, ne pouvait donner
naissance à aucune entreprise développée. A l’encontre du monarque
peu soucieux, à ce qu’il semble, de rehausser par les arts l’éclat déjà
bien effacé de son règne, le duc de Lerrne, son premier ministre, se
fît le promoteur de quelques travaux dont, au surplus, l’intérêt
d’histoire prime la valeur intrinsèque. Le Prado conserve une suite
des figures à?Apôtres que Rubens, dans une lettre à sir Dudley Carie-
ton, dit avoir peinte pour le duc de Lerme, en Espagne même, peut-
être en Italie à son retour. La série se répète à Rome, dans le Casino
du palais Rospigliosi. Elle fut gravée à Anvers. Les figures à mi-corps
sont imposantes, surtout par leur grandeur, mais d’une froideur
rem arquable.
De la même époque dateraient, d’après le catalogue, deux autres
toiles : Heraclite et Démocrite, assertion fondée sur le passage d’une
lettre de l’envoyé de Mantoue près la Cour d’Espagne. Ces amples
figures de philosophes allèrent, sous le règne de Philippe IV, orner
la Torre de la Parada où, pour leur servir de pendants, l’on exposa
les magnifiques morceaux d'Esope et de Mênippe de Vélasquez. Je ne-
puis me défendre de croire que, dans leur état présent, elles sont le
fruit d’une retouche contemporaine du second voyage du maître en
Espagne, sinon plus tardive encore.
Le Prado possède de Rubens d’autres peintures antérieures à sa
seconde venue en Espagne, mais elles y sont arrivées par voie indi-
recte. Ainsi, le grandiose ensemble de Saint Georges combattant le
dragon, est de toute évidence une œuvre de jeunesse; M. Rooses la
suppose antérieure même au retour d’Italie et, en effet, l’exécution
se caractérise par une sûreté de lignes, qui, chez Rubens, est l’indice
constant d’une période peu avancée de sa carrière. Cela n’empêche que
déjà, vraiment, nous sommes en présence d’un maitre. La vaste toile
prit place dans les collections royales après la mort de son auteur.
J en ai vu, au Musée de Naples, une première version aussi grande
que le tableau de Madrid.
Les Rubens d Espagne ont de tout temps intéressé la critique.
Cumberland en décrit avec enthousiasme plusieurs, et tout spéciale-
ment une immense Adoration des Mages d’autant plus frappante qu’elle
a moins de réputation. Aussi Clément de Ris, Waagen et bien d’autres
se complaisent-ils à en souligner les mérites.
Le tableau dont il s’agit et que reproduit notre planche manque
dans la série des compositions que le grand Anversois livra au burin
de ses graveurs. Outre qu’à l’époque où l’œuvre voyait le jour il